Economie : la Fed vole au secours des marchés boursiers

19/09/2007 - 13:28 - Boursier.com

Avec succès, mais pour combien de temps ?

La Fed est allée plus loin que ne l'espéraient les économistes en abaissant d'un demi-point son principal taux directeur hier soir, à l'issue de son comité de politique monétaire. Les marchés actions mondiaux s'offrent ainsi un copieux rebond. C'est la première fois que la banque centrale américaine abandonne son biais haussier depuis le 30 juin 2004, date du début de son cycle de resserrement. "Ca va mal, tout va bien !". Ainsi pourrait se résumer la réaction des marchés boursiers à l'annonce hier soir d'une décision de politique monétaire musclée de la part de la Réserve Fédérale (Fed), la banque centrale américaine. Son gouverneur Ben Bernanke et les membres de son conseil ont en effet décidé à l'unanimité d'abaisser d'un demi-point, de 5,25 à 4,75%, le principal taux directeur américain. Traditionnellement, les actions d'assouplissement monétaire se font à coups de quarts de point, une baisse plus modérée que près de 80% des économistes anticipaient. Mais devant les risques que faisait peser la crise immobilière et financière sur la croissance de la première économie du monde, la Fed a sorti l'artillerie lourde. En baissant ses taux, la banque centrale espère relancer la demande en facilitant l'accès au crédit. "La Fed a donné un puissant signal au marché", selon l'économiste Marco Annunziata (Unicredit). Pour le spécialiste, le message est très clair : la Fed ne laissera pas la crise financière se transformer en récession. "Le fait que la décision ait été unanime est très important", ajoute-t-il, estimant qu'en réussissant à former un consensus, Bernanke envoie un message positif sur la perception de l'économie du pays. Malgré cette confirmation que la croissance américaine va mal, assez en tout cas pour nécessiter un changement de politique monétaire, les marchés boursiers se sont envolés. Historiquement en effet, les baisses de taux américains comblent d'aise les investisseurs. Depuis 1984, la première baisse de taux après un cycle haussier entraîne une progression des marchés actions dans 100% des cas sur le mois suivant la décision, expliquent les analystes du Crédit Suisse. Sur une durée d'un an, c'est aussi le cas 4 fois sur 5, l'exception qui confirme la règle étant 2001 et l'explosion de la bulle spéculative liée à internet couplée aux attentats du 11 septembre aux Etats-Unis. Du pain-bénit donc pour les investisseurs, qui n'en demandaient pas tant. Mais une décision qui ne manquera pas de soulever des interrogations. D'abord, parce que l'unanimité obtenue par Ben Bernanke paraît assez surprenante. Il y a quelques jours encore, plusieurs des membres du comité de politique monétaire de la Fed avaient fait entendre des voix dissonantes sur leur appréciation de la crise actuelle et la façon d'y remédier. Sont-ils depuis au fait de problèmes plus graves que redoutés pour l'économie américaine ? La teneur des débats au sein du conseil ne sera rendue publique, c'est la tradition, que dans quelques semaines et devrait éclaircir ce point. L'autre conséquence néfaste la plus visible est le chèque en blanc fait à ceux qui avaient profité du système. Jusque-là, Bernanke semblait plutôt se démarquer du penchant marqué de son prédécesseur Alan Greenspan pour le soutien aux marchés financiers. En optant pour une mesure "choc", il prend le risque de sauver ceux qu'il fustigeait encore récemment pour avoir pris trop de risques et favorisé les déséquilibres. "A court terme, cette action est positive pour la confiance des investisseurs, notamment sur le marché actions, mais ne risque-t-elle pas de créer une nouvelle bulle spéculative sur un marché dans les prochains mois ? La banque centrale doit-elle soutenir des ménages déjà endettés ?", s'interrogent ce matin les économistes d'Aurel Leven. Cette décision monétaire fait suite à deux événements qui avaient déjà rassuré les boursiers. Lundi, la Banque d'Angleterre a sauvé le prêteur immobilier britannique Northern Rock en apportant une garantie sans limite à ses clients. Hier, le géant bancaire américain Lehman Brothers a fait état de résultats plus solides que prévus pour le compte du dernier trimestre écoulé, malgré les remous estivaux rencontrés sur les marchés financiers et sa large exposition au secteur des titres adossés à des créances hypothécaires. Pour le bureau d'études GaveKal, l'action de la Banque d'Angleterre lundi avait tout de la "charge de la brigade légère", tandis que la décision de la Fed tient plutôt de "la cavalerie américaine qui arrive toujours juste à temps". La conjonction d'éléments favorables a quoi qu'il en soit redonné une orientation fermement haussière à la finance mondiale, toujours aussi prompte à s'enthousiasmer au premier signe positif qu'à sombrer dans le marasme au moindre grain de sable. A Paris en milieu de journée mercredi, le CAC40 s'offrait un bond de 2,1%, les autres places européennes étant au diapason, emmenées par les secteurs bancaire et des matières premières. Hier à Wall Street, le Dow Jones a terminé sur gain de 2,5%, le plus important en une seule séance depuis quatre ans et demi. Aujourd'hui, la profonde crise financière de l'été est donc mise de côté. Pour combien de temps ?



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