Société Générale : la plus grande escroquerie de l'hisoire ?

24/01/2008 - 12:54 - Boursier.com

Nick Leeson, Yasuo Hamanaka ou Brian Hunter, ces noms vous disent-ils quelque-chose ? Le premier est au coeur du fameux scandale de la banque Barings,...

Nick Leeson, Yasuo Hamanaka ou Brian Hunter, ces noms vous disent-ils quelque-chose ? Le premier est au coeur du fameux scandale de la banque Barings, en 1995, qu'il a contribué à couler après avoir accumulé 1,8 milliard de dollars de pertes sur négociations. Le second avait coûté plus de 2,5 milliards de dollars au japonais Sumitomo en 1996, après avoir spéculé sur le cuivre. Le troisième a pris des positions hasardeuses sur le gaz naturel en 2006, provoquant une perte de 6,6 milliards de dollars et l'effondrement du fonds spéculatif ("hedge fund") Amaranth. Il faudra désormais ajouter à cette liste un "trader" en charge d'activités de couverture sur les indices boursiers européens de la Société Générale, dont le nom est pour l'instant tenu secret. "Le groupe Société Générale a mis à jour une fraude exceptionnelle de par son ampleur et sa nature : un trader, en charge d'activités de couverture de futures 'plain vanilla' sur des indices boursiers européens, a pris des positions directionnelles frauduleuses courant 2007 et début 2008 allant bien au-delà des limites faibles qui lui avaient été attribuées", a expliqué ce matin la banque française dirigée par Daniel Bouton. Et exceptionnelle, cette "fraude" ("une fraude et pas de mauvais paris", ont insisté les dirigeants) l'est avant tout par son montant : la banque a perdu une somme absolument colossale de 4,9 milliards d'euros sur les paris de ce trader sur les produits dérivés. Rapporté aux trois illustres cas précités, cela représente quelque 7,2 milliards de dollars, soit une nouvelle, et triste, référence. La banque a découvert le montage le 19 janvier dernier et a aussitôt soldé les positions pour éviter que le gouffre ne se creuse encore. Dans un contexte de marché explosif, accentué par une suspicion accrue sur l'exposition des établissements financiers à la crise du crédit, la nouvelle pouvait difficilement plus mal tomber pour la Société Générale. Son président Daniel Bouton a d'ailleurs présenté immédiatement sa démission, que le conseil d'administration a refusée en lui réitérant sa confiance. Contrairement aux banques américaines dont plusieurs dirigeants ont été évincés ces dernières semaines pour ne pas avoir anticipé la crise qui a éclaté à l'été, la Société Générale ne veut pas perdre son capitaine en pleine tempête. La Banque de France a indiqué, juste après les révélations, que la Société Générale l'avait prévenue dès la découverte de la fraude. Une enquête sera diligentée par la Commission Bancaire pour examiner l'affaire. Heureusement, la banque a les reins solides : en intégrant cette perte et celles liées à son exposition au marché américain du crédit dans ses comptes 2007, elle terminera l'année sur un bénéfice net de l'ordre de 600 à 800 millions d'euros, contre 5,2 milliards d'euros en 2006. Elle devra cependant reconstituer son capital en faisant appel au marché. Une augmentation de capital de 5,5 milliards d'euros est programmée dans les prochaines semaines. A ce titre, les groupes américain Morgan Stanley et JP Morgan ont garanti l'opération, en se portant acquéreurs des titres qui ne seraient pas souscrits par les actionnaires actuels. "La Société Générale n'est pas confrontée à des problèmes de liquidité", a affirmé ce matin en conférence de presse Daniel Bouton, qui s'est excusé auprès de ses salariés mais n'a pas souhaité nommer le trader indélicat, qui "agissait seul". Outre celui-ci, le patron de la division Global Equities & Derivatives Solutions, Luc François, fait les frais de l'opération et sera remercié. Il va désormais falloir que l'établissement se penche sur ses procédures de contrôle interne pour comprendre comment une perte aussi abyssale, du fait d'un seul homme bien renseigné sur les garde-fous dont disposait la banque, a pu être accumulée. La Société Générale va également devoir s'employer à redorer son blason, clairement entaché par les révélations du jour. Ironie du sort, elle avait reçu l'année dernière le titre de "Meilleure maison de dérivée de l'année 2007" décerné par le prestigieux magazine 'The Banker', et figure depuis le début de la décennie parmi les banques les plus réputées dans le monde dans le domaine des produits dérivés. Mais l'ampleur de la fraude révélée ce matin ne doit pas masquer une autre réalité : la banque avait mal estimé son exposition aux remous nés de la crise du crédit aux Etats-Unis. Rassurante l'été dernier, quand elle jugeait son exposition "limitée", la Société Générale a dû changer son fusil d'épaule. "Le groupe va enregistrer des dépréciations supplémentaires au 4ème trimestre 2007 pour un montant total de 2,05 milliards d'euros", a-t-elle précisé ce matin, dont 1,1 milliard d'euros relatifs à son exposition au secteur immobilier résidentiel américain, 550 millions d'euros relatifs à l'exposition aux assureurs monolines américains (les "rehausseurs de crédit") et 400 millions d'euros de provisions additionnelles non allouées relatives aux deux risques précédents. On est certes loin des dépréciations énormes enregistrées dans la finance américaine, mais l'annonce fait tâche alors que l'établissement avait jusque-là communiqué sur le faible impact, en termes bilanciels, de la crise immobilière américaine. Au final, la banque de Daniel Bouton va donc enregistrer une perte exceptionnelle de près de 7 milliards d'euros sur le dernier trimestre 2007 dont le détail sera présenté en février. Grâce notamment à ses 4,3 milliards d'euros de bénéfices sur les neuf premiers mois de l'année, elle sera cependant en mesure de solder son exercice 2007 sur un bénéfice de 600 à 800 millions d'euros. Touchée donc, mais pas coulée, même si les marchés financiers spéculent déjà, on ne se refait pas, sur un rachat de la banque par l'un de ses concurrents.



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