POINT DE VUE/Thierry Million, Allianz Global Investors France

11/02/2008 - 15:31 - Option Finance

La diffusion de la crise du crédit sur l'économie américaine ne fait plus de doute. A chaque publication de chiffres d'activité pourtant attendus décevants, les investisseurs sont surpris par l'ampleur et la vitesse de la dégradation de la conjoncture. L'Europe, qui croyait en être préservée, commence elle aussi à afficher des signes tangibles de ralentissement. L'urgence de la situation pousse la FED à des réductions massives de ses taux directeurs. De son côté la BCE campe, pour l'instant, sur ses positions, mais les marchés font pression sur elle, car ils prévoient déjà 50 bps de baisse. Anticipées ou déjà en cours, les décisions des instituts d'émissions se propagent instantanément sur les courbes de taux des deux côtés de l'Atlantique. Celles-ci se pentifient sous l'effet d'une diminution rapide des taux des obligations d'échéance courte (de 2 à 5 ans) alors que les rendements des titres à long terme (supérieurs à 10 ans) restent quasiment inchangés. Ainsi, la configuration convexe de la courbe des taux des emprunts d'Etat en fonction de l'horizon, traduit la conviction des intervenants du caractère passager du fléchissement de l'expansion des pays de l'OCDE. Elle valide également la réussite des banques centrales dans leur capacité à endiguer efficacement la crise et à faire repartir la croissance d'ici la fin de l'année 2008. Les parties très courtes des courbes sont plébiscitées car les investisseurs se précipitent sur les titres d'Etat, dans l'unique but de préserver leur capital de la chute des marchés d'actions, rendant secondaire le rendement obtenu ("fly to safety"). En revanche la partie longue, plus volatile, est délaissée, dans un contexte où les banques centrales adoptent une position plus laxiste vis-à-vis de l'inflation pour soutenir la croissance, contrairement à ce qu'elles affirment. Le potentiel d'accentuation de la pentification reste important aux US, car la pente 2 ans/10 ans actuellement de 150 bps atteint généralement 250 pbs au plus fort de l'action de la FED (en fin de période de récession). Les oscillations extrêmes de pentification sont tout aussi considérables en zone euro. Aujourd'hui, la pente de seulement 55 bps pourrait bien s'accentuer de près de 200 bps. Le momentum d'affaiblissement de la conjoncture va inévitablement contraindre les banques centrales à de nouveaux assouplissements monétaires en 2008, jusqu'à 2 % pour les taux directeurs de la FED et à pas moins 3,50 % pour ceux de la BCE. En conséquence, il n'est donc pas encore trop tard pour positionner favorablement les portefeuilles obligataires dans la perspective d'un mouvement prolongé de pentification, notamment en zone euro, en privilégiant l'achat de titres de maturité comprise entre 5 et 10 ans. Par Thierry Million, directeur de la gestion obligataire et de la recherche quantitative, Allianz Global Investors France.