POINT DE VUE/ Thierry Million (Allianz Global Investors France)

19/03/2008 - 18:19 - Option Finance

Par Thierry Million, directeur de la gestion obligataire et de la recherche quantitative, Allianz Global Investors France Toute l'industrie du crédit est à feu et à sang. L'effet de contagion de la crise des subprimes bat son plein. La montée réelle ou supposée du taux de défaut sur les remboursements des mortgages américains déclenche des débouclements de positions sans précédent. Concomitamment, le "leverage" subit une réduction drastique, contribuant à alimenter l'effet boule de neige. Le système financier américain vacille. Heureusement, peut-on dire, les banques centrales sont à l'œuvre. Mais elles sont contraintes d'aller toujours plus loin dans une spirale d'actions non conventionnelles. La Fed échange maintenant des titres d'Etat qu'elle prête aux "primary dealer" contre des mortgages des agences (Fannie Mae et Freddy Mac) ou des RMBS fédéraux et privés notés AAA. Elle envisage de puiser jusqu'à 200 milliards de dollars dans son portefeuille de titres du Trésor de 713 milliards de dollars. Les BCE et Banque Nationale de Suisse se sont associées à leur homologue américaine via une augmentation des montants des accords de swaps leur permettant de procurer de la liquidité en dollars aux établissements européens. Ces actions ont soulagé, au moins temporairement, les marchés. L'asset manager doit-il profiter de l'"aléa moral" procuré par ces prêteurs de dernier recours ? En effet, sachant que les banques centrales feront tout pour que le pire soit évité, il est tentant de mettre à profit le niveau très élargi des spreads (plus de 600 bps sur le crossover), résultat de ventes forcées ou de comportements irrationnels de certains acteurs. Ceci peut être concrétisé par l'acquisition d'emprunts obligataires bradés d'établissements financiers affaiblis et de sociétés de catégorie "high yield". Rester aujourd'hui à l'écart de ces titres reviendrait d'une part à se priver d'une opportunité peut-être historique d'encaisser des rendements futurs très élevés, et, d'autre part, à considérer que les décisions actuelles des banques centrales sont vouées à l'échec. Cependant, une prudence et une sélectivité extrêmes s'imposent, car historiquement une crise sur le crédit ne dure pas moins de huit trimestres, alors que celle que nous sommes en train de vivre, aussi pénible soit-elle, a démarré il y a moins de trois trimestres. n