Pernod Ricard : paie au prix fort son entrée dans la vodka

31/03/2008 - 16:00 - Boursier.com

Pernod Ricard a signé avec le Royaume de Suède un contrat d'acquisition de la société Vins & Sprit, propriétaire notamment de la marque de vodka...

Pernod Ricard a signé avec le Royaume de Suède un contrat d'acquisition de la société Vins & Sprit, propriétaire notamment de la marque de vodka Absolut. Une belle opération pour le géant français des vins et spiritueux, qui avait fort à faire car la concurrence était sur les rangs. Mais une opération payée au prix fort : 5,626 Milliards d'Euros, rien que ça... Ils étaient quatre à lorgner le groupe public suédois Vins & Sprit, principale entreprise nordique de spiritueux et propriétaire de la marque de Vodka Absolut, le quatrième alcool fort le plus vendu au monde. Fortunes Brands, une groupe américain propriétaire des marques Tequila Sauza, Cognac Courvoisier ou des whiskies Maker's Mark, Jim Beam et Canadian Club, Bacardi, l'entreprise basée aux Bermudes contrôlant le fameux rhum, le consortium suédois EQT / Investor et Pernod Ricard. Si Fortune Brands avait les faveurs des pronostics, c'est l'offre du groupe français fondé à Marseille qui a retenu l'attention du gouvernement suédois. "Cette acquisition représente pour Pernod Ricard une opportunité exceptionnelle et permet de donner naissance au co-leader mondial de l'industrie des vins et spiritueux" s'est félicitée l'entreprise dirigée par Patrick Ricard, le fils de Paul, le fondateur. Absolut est la première marque mondiale de vodka "premium" (haut de gamme) avec environ 11 Millions de caisses de 9 litres en 2007, et la quatrième marque la plus vendue au monde derrière la vodka Smirnoff, Bacardi et le whisky Johnny Walker. Il s'agissait également de l'une des dernières grandes marques globales qui avaient échappé à la consolidation de l'industrie ces dernières années. En outre, Pernod Ricard comble un vide dans son portefeuille de marques, comme l'a souligné son directeur général Pierre Pringuet ce matin, quand il a affirmé "nous voulions combler un vide stratégique, nous n'avions pas de vodka. Il n'y a donc absolument pas de doublons entre le portefeuille de Pernod Ricard et celui de V&S". Evidemment, brûler la politesse à la moitié du secteur sur une marque aussi stratégique a un coût, et pas des moindres. Pernod Ricard paiera 5,28 Milliards d'Euros et reprendra à son compte 346 Millions d'Euros de dettes pour le groupe suédois, qui outre Absolut comprend un portefeuille de marques locales et une position de leader des vins et spiritueux dans les pays nordiques. Pour financer cette acquisition, qui intervient moins de 10 ans après les rachats de Seagram et d'Allied Domecq, deux poids lourds du secteur, Pernod Ricard a fait appel à 6 banques qui lui prêteront les ressources nécessaires. La dette du groupe va par conséquent connaître une nouvelle forte hausse, comparable à celle atteinte lors des deux précédentes opérations de croissance, mais est appelée à reculer rapidement grâce à la forte génération de liquidités du nouvel ensemble et à l'amélioration de ses résultats. Pour Patrick Ricard, "L'acquisition de V&S par Pernod Ricard est une formidable opportunité et représente la troisième opération transformante après les rachats de Seagram et d'Allied Domecq. Absolut est une marque extraordinaire. Son intégration dans notre portefeuille de marques premium, alliée à la puissance de notre réseau de distribution mondial, annonce des perspectives de développement exceptionnelles. Nous devenons ainsi co-leader mondial de l'industrie des vins et spiritueux" (aux côtés du britannique Diageo, ndlr). Une opération payée au prix fort donc, selon les analystes, puisque les dernières rumeurs faisaient état d'une offre de l'ordre de 4,5 Milliards d'Euros déjà jugée élevée. Fortune Brands, présenté jusque-là comme le favori pour la reprise de V&S, est évidemment déçu et ne manque pas de faire remarquer qu'il a préféré préserver les intérêts de ses actionnaires, ce qui en d'autres termes laisse entendre que Pernod Ricard n'a que faire des siens en surpayant son acquisition. La vérité est sans doute à chercher à mi-chemin entre l'amertume des uns et l'enthousiasme des autres : oui, Pernod Ricard a payé cher pour récupérer Absolut, mais l'intérêt stratégique de la marque devrait gommer au fur et à mesure ce sacrifice. C'est en substance l'argumentaire développé par le management du groupe français qui a mis en avant l'opportunité extraordinaire qui constitue le rachat de V&S, tout en précisant qu'il s'agit là d'une "bonne opération" pour ses actionnaires. La direction de l'entreprise suédoise s'est d'ailleurs mise au diapason dans un communiqué positif mais rationnel : "Pernod Ricard est une entreprise réputée du secteur, avec des marques internationales ainsi qu'une présence locale très forte. Ils ont une vision industrielle de long terme et ont démontré leur ambition de continuer à développer les opérations de V&S. Le conseil d'administration entrevoit une logique industrielle considérable dans cette opération". Il est vrai qu'au-delà du prix payé, qui satisfait le gouvernement suédois, le groupe français a pris des engagements vis-à-vis de Stockholm, en particulier le fait que la production et le siège social de V&S resteront en Suède. Le Ministre des Finances Mats Odell a d'ailleurs concédé que le groupe français "a démontré la plus grande confiance en l'avenir et a présenté les meilleurs idées de coopération", tout en reconnaissant que Pernod Ricard avait accru le montant de son offre entre le projet initial et la proposition finale, pour emporter la décision. A Paris en milieu d'après-midi, le titre Pernod Ricard cède 4,3% à 65,17 Euros.



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