POINT DE VUE/ Patrick Artus, dir. recherche et études Natixis

31/03/2008 - 17:37 - Option Finance

Il est impressionnant de voir à quel point la divergence entre les fondamentaux économiques et la valorisation des marchés financiers peut s'aggraver. Ceci est vrai pour les marchés souverains de la zone euro : aucune projection des finances publiques italiennes ne peut expliquer un écart de taux avec l'Allemagne de plus de 70 points de base. Ceci est vrai pour le marché des covered bonds : même si le taux de défaut des ménages espagnols va au pire qui peut être anticipé (1,5 à 2 % par an), le marché des Cedulas-Pfandbrief supérieur à 30-40 points de base. Ceci est surtout vrai pour le marché des titres d'entreprise ; la profitabilité des entreprises non financières continue à s'améliorer aux Etats-Unis (après seulement 2 trimestres de recul), en Europe, au Japon, la qualité de crédit ne se dégrade pas, ceci parce que, avec la globalisation, les salaires réels augmentent nettement moins vite que la productivité. Pourtant le marché actions recule, les spreads de crédit high-yield sont supérieurs à 630 points de base. Que doivent alors faire les investisseurs ? Savoir que, lorsque le flux de mauvaises nouvelles sera tari (nouvelles sur les banques, les monolines, les fonds, l'économie américaine), il y aura retour vers les fondamentaux. Ceci veut dire une diminution des primes de risque et, en conséquence, le dégonflement des bulles liées à l'investissement de la liquidité dans des actifs refuges (emprunts d'Etat, matières premières). Y a-t-il un risque vicieux avec dégradation des fondamentaux due à la dégradation des marchés financiers ? C'est très peu probable ; la profitabilité des entreprises est forte et elles n'ont pas, dans la grande majorité des pays, besoin de s'endetter pour réaliser leurs investissements ; la liquidité mondiale est très abondante, avec l'accumulation de réserves de change dans les pays émergents et exportateurs de matières premières et avec les politiques monétaires expansionnistes (Etats-Unis, Canada, Japon.) ; la croissance des pays émergents reste forte parce qu'elle dépend surtout des demandes intérieures de ces pays et non, comme on l'avance parfois, sur les exportations vers les grands pays de l'OCDE.