POINT DE VUE/ Patrick Artus (dir. rechercche et études -Natixis)

07/05/2008 - 17:37 - Option Finance

Vers un bouleversement de l'allocation sectorielle des portefeuilles Jusqu'à la crise récente, le moteur de la croissance aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, dans la zone euro en dehors de l'Allemagne, était la demande des ménages. Le crédit aux ménages progressait rapidement (autour de 15 % par an), ce qui accroissait l'investissement immobilier, soutenait la consommation grâce à la baisse du taux d'épargne des ménages. La hausse des prix de l'immobilier résidentiel (ces prix sont multipliés par un facteur allant de 2,25 à 2,75 selon les pays entre 1999 et 2007) contribuait à accroître l'endettement et la consommation. Dans cet environnement, la structure sectorielle des portefeuilles était claire : il fallait surpondérer tout ce qui était lié à la demande des ménages : distribution, automobile, services aux particuliers, construction, immobilier, biens intermédiaires liés à l'immobilier. La crise modifie totalement la structure des économies et la nature des moteurs de la croissance. La crise du subprime révèle que les banques sont allées trop loin dans la distribution de crédit aux particuliers ; il y a partout retournement à la baisse de l'activité de construction résidentielle (les permis de construire, depuis leur pic, ont baissé de 60 % aux Etats-Unis et en Espagne, de 20 % dans la zone euro prise dans son ensemble et au Royaume-Uni) et du crédit aux ménages (sur un an, il n'a augmenté que de 6 % aux Etats-Unis et en Europe, les autorisations de crédits hypothécaires sont en baisse de 30 % en un an au Royaume-Uni). Les ventes au détail (en volume) sont déjà en croissance négative sur un an aux Etats-Unis et dans la zone euro ; elles résistent au Royaume-Uni au prix d'une forte compression des marges de la distribution. La demande des ménages ne peut donc plus jouer le rôle de moteur de la croissance ; là où c'est possible, ce rôle est maintenant joué par les exportations, en particulier vers les pays émergents et exportateurs de pétrole : elles ont augmenté de plus de 20 % en un an aux Etats-Unis et dans la zone euro. Les importations des pays émergents restent en croissance forte (+ 32 % sur un an en Chine, + 65 % en Russie) même si la croissance de ces pays ralentit un peu, en raison de l'appréciation des devises des émergents. Cette évolution radicale de ce qui soutient la croissance économique doit conduire à une évolution similaire de l'allocation sectorielle des portefeuilles ; il faut maintenant surpondérer les secteurs qui profitent de la croissance des pays émergents : biens d'équipement, secteurs liés à la construction d'infrastructures (eau, électricité, transports) dans les pays émergents, luxe. n
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