Carrefour : les investisseurs attendent un électrochoc

18/11/2008 - 12:31 - Boursier.com

Le quotidien des affaires britanniques 'Financial Times' avait éventé la nouvelle hier soir à minuit, mais le secret était resté plutôt bien gardé :...

Le quotidien des affaires britanniques 'Financial Times' avait éventé la nouvelle hier soir à minuit, mais le secret était resté plutôt bien gardé : José Luis Duran, le patron de Carrefour, fera ses valises le 31 décembre prochain pour céder la place à Lars Olofsson, 32 ans de carrière chez Nestlé. Une passation de pouvoir préparée depuis plusieurs semaines et qui devrait se faire progressivement, puisque les deux hommes se côtoieront pendant un mois et demi pour préparer l'avenir du distributeur. Le conseil d'administration de Carrefour a confirmé dès ce matin l'information, en l'accompagnant d'un commentaire sans saveur par lequel il "remercie José Luis Duran pour ses 18 années passées chez Carrefour et pour sa contribution depuis 2005, en tant que président du directoire puis directeur général, au développement de la société", tout en concédant que le dirigeant "a établi les fondations nécessaires pour permettre au groupe de franchir une nouvelle étape de son développement". Il faut dire que depuis plusieurs mois, les relations entre le directeur général et certains membres du conseil d'administration avaient tourné au vinaigre. La montée en puissance de Blue Capital, l'entreprise commune à Bernard Arnault (LVMH) et au fonds Colony, dans le tour de table du distributeur avait mis Duran sous pression. Au cours de l'été dernier, Carrefour avait changé son mode de gouvernance, jusque-là fondé sur un directoire et un conseil de surveillance, pour lui substituer un système avec conseil d'administration, conseil dont José Luis Duran ne faisait même pas partie. Beaucoup de spécialiste estimaient depuis lors que les jours du dirigeant étaient comptés. Blue Capital, à la tête de 13,6% du capital, reprochait notamment à Duran de ne pas accélérer suffisamment la mutation du distributeur. L'actionnaire activiste militait en outre depuis son arrivée dans le capital pour une scission ou une cession de tout ou partie du colossal patrimoine immobilier de Carrefour, de façon à mobiliser des fonds pour le développement et la rémunération des actionnaires. José Luis Duran, peu favorable à cette stratégie, avait finalement plié sous la pression en annonçant la création de "Carrefour Property", une entité chargée de regrouper les actifs immobiliers du groupe ayant vocation à entrer en bourse. Mais la crise financière qui sévit depuis 2007 a constamment repoussé la mise en place du projet. Ces divergences stratégiques ont naturellement provoqué des tensions entre le directeur général et Amaury de Seze, le président du conseil adoubé par Colony et Bernard Arnault. Blue Capital a d'ailleurs indiqué ce matin, par la voix de son porte-parole, que Carrefour avait besoin "d'un regard nouveau et de sang neuf". Exit donc le "quadra" Duran, qui incarnait à lui seul la success-story à la Carrefour, dont il a gravi tous les échelons entre son arrivée en 1991 comme contrôleur de gestion chez Pryca, la filiale espagnole, et avril 2005, date de son avènement comme président directeur général. Son remplaçant, Lars Olofsson, est ce qu'on a coutume d'appeler un "vétéran" du secteur alimentaire avec ses 32 ans passés chez Nestlé. Ce suédois a notamment piloté Findus et Nestlé France, mais aussi la Zone Europe pour le géant suisse, avant de prendre en charge, depuis 2005, les unités stratégiques le marketing et les ventes du groupe de Vevey. Il chapeautait notamment des branches comme les cafés Nespresso, à la pointe de la performance de la politique de développement de Nestlé. Désormais, les actionnaires de Carrefour attendent du changement, après le parcours calamiteux du titre en bourse, il est vrai accentué par la crise qui sévit actuellement. "Homme de l'industrie, Lars Olofsson devrait rassurer les équipes de Carrefour qui pouvaient craindre de voir arriver un financier bon teint à la tête du groupe", estime ce matin l'analyste Christian Devismes, de CM-CIC Securities, qui pense cependant que le nouvel arrivant aura une marge de manoeuvre limitée. "Nous n'attendons pas de bouleversements dans le périmètre du groupe, mais une accélération des chantiers de convergence initiée par José Luis Duran pour capitaliser encore davantage sur la force de la marque Carrefour", écrit le spécialiste dans une note à ses clients. Nicolas Champ, d'Oddo Securities, juge pour sa part que le départ de José Luis Duran pourrait être un élément positif pour résoudre la crise de confiance entre le distributeur et la communauté financière, tandis que Lars Olofsson dispose d'atouts dans sa nouvelle mission, comme "son excellente connaissance du secteur de la grande distribution" ou "une expérience reconnue à la fois internationale et plus spécifiquement sur le marché français". Une compétence qui ne sera pas de trop alors que la récession a envahi les marchés matures sur lesquels évolue le groupe, qui risque également d'être confronté à un ralentissement de la consommation sur les marchés émergents, en Asie et en Amérique Latine, véritables moteurs de sa croissance ces dernières années.



(c) Boursier.com - Les informations rédigées par la rédaction de Boursier.com sont réalisés à partir des meilleures sources, même si la société Boursier.com ne peut en garantir l'exhaustivité ni la fiabilité. Ces contenus n'ont aucune valeur contractuelle et ne constituent en aucun cas une offre de vente ou une sollicitation d'achat de valeurs mobilières ou d'instruments financiers. La responsabilité de la société Boursier.com et/ou de ses dirigeants et salariés ne saurait être engagée en cas d'erreur, d'omission ou d'investissement inopportun.