CARREFOUR : chronique d'un départ annoncé

18/11/2008 - 15:50 - Option Finance

(AOF) - Alors que son départ est évoqué par la presse depuis l'été, José Luis Duran vient finalement d'être remercié en tant que directeur général de Carrefour. Le patron de 43 ans arrivé à la tête du deuxième distributeur mondial en 2005 n'aura donc pas survécu au profit warning de juin. Le groupe avait alors revu à la baisse son objectif de résultat opérationnel en raison de la conjoncture économique pesant sur la consommation. Les relations tendues entre José Luis Duran et les principaux actionnaires de Carrefour, Bernard Arnault et le fonds américain Colony Capital, n'ont sans doute rien arrangé. Cette éviction constitue d'autant moins une surprise qu'elle n'est pas la première : Michel Bon et Daniel Bernard avaient également perdu la direction du distributeur après avoir lancé des avertissements sur résultats, comme le rappelle un analyste cité par Reuters. C'est donc le Suédois Lars Olofsson, actuel directeur général chargé du développement stratégique et marketing de Nestlé qui aura la lourde tâche de prendre les rênes dès janvier. Dans un communiqué, Carrefour a déclaré qu'il s'agissait du dirigeant dont il avait "besoin pour entamer une nouvelle étape de son développement", en se félicitant de son "expérience exceptionnelle des métiers de grande consommation". Les analystes semblent également satisfaits de cette arrivée. "Homme de l'industrie, Lars Olofsson devrait rassurer les équipes de Carrefour qui pouvaient craindre de voir arriver un financier bon teint à la tête du groupe", a notamment estimé CM-CIC. Le bureau d'études juge cependant que la marge de manoeuvre du nouveau patron est limitée. Il attend seulement "une accélération des chantiers" déjà mis en place autour de la force de la marque, des outils de marketing et de fidélisation et du contrôle des coûts. M-L.H. (AOF)

EN SAVOIR PLUS

ACTIVITE DE LA SOCIETE

En quarante ans, Carrefour est devenu un leader de la distribution dans le monde. Deuxième distributeur mondial et premier distributeur européen, il développe quatre formats principaux de magasins alimentaires : les hypermarchés, les supermarchés, le maxidiscompte et les magasins de proximité. Le groupe compte plus de 15 000 magasins exploités en propre ou en franchise. Son activité se développe sur trois grands marchés : l'Europe, l'Amérique latine et l'Asie. Présent dans 30 pays, il réalise plus de 54% de son chiffre d'affaires hors de France. Blue Capital est aujourd'hui le premier actionnaire de Carrefour avec 13,55% du capital.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR

Les points forts de la valeur

- Carrefour bénéficie d'un savoir-faire reconnu dans les différents formats de magasins. Il s'impose aussi comme un acteur local dans les différents pays où il est présent. - Une politique de strict contrôle des coûts a été mise en place parallèlement à une stratégie offensive de gains de parts de marché sur la base d'un positionnement tarifaire compétitif. - Le titre fait régulièrement l'objet de poussées spéculatives liées au caractère éclaté de son capital. Wal Mart ou Tesco sont les prédateurs éventuels le plus souvent cités. - La stratégie multiformat et l'exposition géographique du groupe lui confèrent un revenu provenant de toutes les échelles et de toutes les gammes de distribution, ce qui en fait une valeur défensive. -La loi Chatel, qui prévoit une libéralisation de la législation française régissant les relations entre distributeurs et industriels, est favorable aux acteurs leaders.

Les points faibles de la valeur

- La bataille sur les prix que se livrent les grands groupes de distribution pèse sur les marges et rend ardue la reconquête des parts de marché perdues par Carrefour ces dernières années. - Le marché s'inquiète de l'essoufflement du concept des hypermarchés en France. - La vigueur de la croissance des activités du groupe à l'international, qui a permis de compenser les baisses de régime en France, n'est pas assurée. -Les analystes attendent l'amélioration des performances du groupe dans le non-alimentaire en France, qui représente environ 25% des ventes.

COMMENT SUIVRE LA VALEUR

- L'activité de Carrefour est directement liée au niveau de consommation des ménages. - De manière générale, à l'image de ses pairs, toutes les crises alimentaires auxquelles le public est de plus en plus sensible sont susceptibles de peser sur les ventes (vache folle, grippe aviaire, maïs transgénique). -Le passage de Champion sous l'enseigne Carrefour Market devrait engendrer une augmentation des ventes de 5 à 7% par magasin transformé, selon le groupe. - Carrefour souhaite introduire ses actifs immobiliers en Bourse à partir de 2009.

LE SECTEUR DE LA VALEUR

Distribution alimentaire

Selon une étude menée par TNS Worldpanel, Leclerc a conforté sa position de leader français de la grande distribution durant le premier semestre. Sa part de marché a légèrement progressé (+0,1%) pour s'établir à 16,1%. Le groupement a bénéficié des actions de son dirigeant, Michel-Edouard Leclerc, qui s'est associé au débat public sur le pouvoir d'achat. Les lancements de deux sites internet ("www.quiestlemoinscher.com" et "www.mon-pouvoir-dachat.com") ont été combinés avec des actions de promotions. Les investissements publicitaires de son concurrent, Carrefour, n'ont pas empêché la part de marché de ce dernier de s'éroder de 0,2 point sur un an à 13,3% à fin juin 2008. Ce sont surtout les enseignes de hard-discount qui tirent leur épingle du jeu : sur un an, à mi-juin, leur part de marché a gagné 0,4 point pour atteindre 13,9%, au détriment de la grande distribution traditionnelle. Néanmoins, facteur préoccupant, les grandes surfaces alimentaires ont subi un recul de 1,4% de leurs ventes en volume, au premier semestre, du fait de l'inflation. Certains distributeurs (Carrefour, Système U et Monoprix) ont donc choisi de baisser leurs prix pour contrer cette tendance. Carrefour vient ainsi de réduire jusqu'à 20% les prix de 300 produits (alimentaires et autres) à travers une opération intitulée " prix pouvoir d'achat ".