La valorisation des actions est raisonnable (P-Y Gauthier-AlphaValue)

30/01/2009 - 15:22 - Option Finance

(AOF) - Pierre-Yves Gauthier, directeur de la stratégie du bureau d'études AlphaValue, a livré à l'Agence Option Finance sa vision des marchés actions pour 2009. Créé en 2008, AlphaValue est un bureau d'analyse financière indépendant qui utilise les méthodes classiques de l'analyse fondamentale, mais sur la base de grilles d'analyses unifiées. Il offre des valorisations en temps réel sur 350 valeurs européennes grâce à une équipe de 22 analystes. Leurs recommandations sont uniquement fonction du potentiel de progression du titre. Quel est votre scénario économique pour les prochains mois ? Le point bas de la crise boursière est peut être déjà passé, mais la crise économique est encore devant nous. De plus, la brutalité de l'ajustement a été telle qu'il ne peut pas durer. Paradoxalement, le salut pourrait venir des consommateurs si les gouvernements parvenaient à tenir la remontée du chômage dans des limites raisonnables. Les ménages vont bénéficier de la baisse du coût de l'énergie qui représente près de 20% de leur budget. Les gouvernements ont en outre su réagir, avec retard certes, mais de façon coordonnée. La reprise pourrait également être alimentée par une recherche de productivité par l'investissement. Les entreprises l'avaient en partie abandonnée au cours de ces dernières années au profit de la croissance externe. Qu'en sera-t-il des marchés actions ? Je pense que le prix de l'incertitude est déjà dans les cours. Pour les sociétés suivies par AlphaValue, nous attendons un repli moyen de 23% du bénéfice par action en 2008, puis de 8% en 2009. Les actions sont valorisées environ 10 fois les bénéfices attendus en 2009, ce qui est raisonnable. En revanche, la surprise pourrait venir du passage à la " paille de fer " des comptes de certaines sociétés à la suite d'un changement de management. Les dirigeants des entreprises n'ont pas été à la hauteur et certains conseils d'administration pourraient demander des comptes. Dans le secteur bancaire, le mouvement a déjà commencé en Europe, mais les sociétés industrielles ne devraient pas être épargnée. Ce qui pourrait surprendre les investisseurs. A la suite de la baisse des cours de Bourse, de nombreux groupes vont devoir déprécier les goodwills accumulés au cours de ces dernières années lors de leurs opérations de croissance externe. Ce qui viendra abaisser les fonds propres. Les provisions sur les engagements de retraite pourraient également être revues en hausse avec également un impact négatif sur les fonds propres. Certaines sociétés pourraient ne plus respecter leurs covenants bancaires. Les banques pourraient alors exiger une recapitalisation. Quels secteurs vous favorisez ? Contrairement au consensus, nous apprécions les banques car nous considérons que l'essentiel des recapitalisations a eu lieu. Il n'y a plus d'accident majeur à craindre en Europe pour les banques cotées. Les banques vont être plus contrôlées mais aussi prendre moins de risques. Le coût du capital va donc baisser, entraînant ainsi une progression de la valeur des actions. Les fabricants de matériels technologiques comme Alcatel-Lucent, Ericsson, Gemalto bénéficieront du redémarrage des investissements de productivité, mais également des plans de relance des gouvernements. Et les secteurs à éviter ? Le luxe dont la valorisation ne présente pas de protection face à des déconvenues. D'évidence, trop de gens ont eu accès au luxe, sous produit de l'illusion de la richesse à crédit. Le secteur automobile nous inquiète en raison de l'endettement trop important de leurs filiales financières. Il est intéressant de citer certains chiffres : la dette nette de General Motors s'élève à près 23 milliards de dollars et celle de BMW à 45 milliards d'euros ! Je ne crois pas que les groupes feront l'économie d'une dilution forte. L'assurance pourrait également réserver de mauvaises surprises. Les comptes n'ont pas encore livré l'étendue des dégâts consécutifs à la correction enregistrée par les marchés au dernier trimestre. Il y aura très probablement des recapitalisations, donc de la dilution. Je crois cependant que les assureurs sont plus solides qu'ils ne l'étaient lors des crises précédentes. Propos recueillis par Christophe Jégu et Pierre-Jean Lepagnot. (AOF)

EN SAVOIR PLUS

LEXIQUE

Goodwill ou survaleur : Ecart positif entre la valeur d'acquisition d'un actif et sa valeur comptable. Lors de la prise de contrôle d'une société par une autre, l'acquéreur paye en général un prix supérieur à la valeur des capitaux propres : cet écart est appelé la survaleur. Il correspond en général à des éléments immatériels, comme la marque, qu'on évalue subjectivement.