Wendel : passation de pouvoir dans la douleur

26/03/2009 - 11:19 - Boursier.com

Exit Jean-Bernard Lafonta chez Wendel...

Exit Jean-Bernard Lafonta chez Wendel. Le président du directoire a indiqué qu'il ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat en mai prochain, au terme d'une mandature qui s'est achevée en eau de boudin. "J'ai pris la décision difficile de ne pas poursuivre mes fonctions dans le Groupe Wendel au delà de mon mandat actuel en mai 2009, pour une nouvelle période de 4 ans. Conduire le groupe dans un environnement économique dégradé suppose de pouvoir s'appuyer sur un actionnariat familial uni. J'espère que celui-ci saura retrouver une parfaite cohésion, nécessaire à la mise en oeuvre des choix stratégiques", a-t-il indiqué ce matin. De son côté, le conseil de surveillance n'a pu que prendre acte de la décision de celui qui était entré dans le groupe comme directeur général en 2001, grâce à l'appui d'Ernest-Antoine Sellière, qui lui avait progressivement laissé les commandes opérationnelles. Contrairement à son "parrain" toutefois, il ne fait pas partie des 900 héritiers de la famille Wendel, qui contrôlent la firme d'investissement via le holding Société Lorraine de Participations Sidérurgiques (SLPS), ce qui a contribué à fragiliser sa position après près de deux années de crise financière. Les relations entre les héritiers Wendel et la direction de l'entreprise n'ont en effet cessé de se dégrader ces derniers mois. En point d'orgue, une plainte avait été déposée par Sophie Boegner, l'une des héritières et cousine d'Ernest-Antoine Seillière, pour "abus de biens sociaux", contestant un montage financier réalisé en 2007 pour simplifier les structures du groupe, qui a également abouti à de généreuses rémunérations pour l'équipe dirigeante. Déposée "contre X", la plainte a finalement été classée sans suite, mais elle a mis au jour les dissensions grandissantes au sein de l'actionnariat familial. Le parcours de Jean-Bernard Lafonta, brillant sur plusieurs investissements réalisés par Wendel (Legrand, Bureau Veritas, Stallergènes, pour ne citer que ceux-là), a en outre été largement assombri par la décision d'investir lourdement dans Saint-Gobain à la fin 2007, alors que la crise commençait à faire tanguer sérieusement les marchés. L'investissement dans le leader mondial des matériaux de construction a constitué le catalyseur de la grogne familiale, pour deux raisons. D'abord, à cause de son mauvais "timing", puisque Wendel a mobilisé 5,9 Milliards d'Euros environ, pour monter à 20,6% du capital de Saint-Gobain. Actuellement, cette participation est descendue sous les 18% et n'est plus cotée qu'en dessous des 2 Milliards d'Euros environ, après un an et demi de déconfiture boursière et une dilution née de d'une participation seulement partielle à la dernière opération d'augmentation de capital du groupe. Autant dire que c'est une très mauvaise affaire jusqu'ici, même si Wendel, en tant qu'investisseur de long terme, bénéficiera tout ou tard d'un redressement des marchés. Mais ce qui a provoqué l'ire de certains actionnaires, c'est que cet investissement est sorti du cadre habituel des opérations réalisées par Wendel, car il a été financé sur un endettement conséquent qui a déséquilibré le bilan du groupe, qui s'en trouve significativement alourdi au mauvais moment. L'action Wendel a de surcroît plongé en bourse, ce qui a appauvri d'autant les héritiers. Le passif de Jean-Bernard Lafonta devenait alors bien lourd à porter... "Ce changement de Direction intervient clairement à l'initiative de la famille, qui, du coup, réaffirme son contrôle sur le holding", commente ce matin Quentin Philippe, du bureau d'études Oddo Securities. "Cela pourrait également entraîner un changement de mode de gestion du groupe vers une stratégie plus patrimoniale qui se matérialiserait par un désinvestissement progressif du groupe afin de réduire l'endettement", ajoute-t-il. Son confrère Jean-Christophe Lefèvre-Moulenq, de CM CIC Securities, n'est pas vraiment surpris du départ du dirigeant, artisan de l'investissement dans Saint-Gobain, "réalisé à contre-courant et avec un mode de financement particulièrement agressif et dangereux". D'autres spécialistes estiment que la question se pose désormais de l'avenir d'Ernest-Antoine Sellière aux commandes de l'entreprise, puisque c'est lui qui avait adoubé Lafonta et qu'il a été également mis en cause dans l'affaire des rémunérations reçues lors de la modification des structures de détention de la SLPS. En attendant la réponse à cette question, Wendel a fait appel à Frédéric Lemoine, déjà membre de son conseil de surveillance et jusque-là président du conseil de surveillance d'Areva, pour succéder à Jean-Bernard Lafonta. Il sera intronisé le 15 avril prochain et devra rapidement s'atteler à redéfinir la stratégie du groupe, dont les résultats publiés ce matin sont le reflet de la crise financière et de l'investissement raté dans Saint-Gobain : le bénéfice net a ainsi fondu de 879 à 158 Millions d'Euros entre 2007 et 2008, même si en dehors des dépréciations d'actifs il est plutôt robuste, tandis que le dividende est coupé en deux, à 1 Euro par action, contre 2 Euros un an plus tôt.



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