Air France KLM : au régime sec jusqu'en mars 2010

27/03/2009 - 11:02 - Boursier.com

Hier en fin d'après-midi, Air France KLM a publié un communiqué sobrement intitulé "Point sur l'activité de l'exercice 2008/2009"...

Hier en fin d'après-midi, Air France KLM a publié un communiqué sobrement intitulé "Point sur l'activité de l'exercice 2008/2009". Sa teneur avait été éventée un peu plus tôt dans la journée par des sources syndicales, qui affirmaient que la compagnie allait incessamment sous peu annoncer que son exercice clos au 31 mars serait finalement déficitaire. Le 20 janvier dernier, le transporteur avait déjà revu en baisse ses prévisions pour la fin d'exercice, estimant que le résultat d'exploitation "devrait rester positif, mais (que) son niveau dépendra de l'évolution de la situation économique des semaines à venir". La visibilité est si mauvaise dans le secteur que l'entreprise ne tiendra finalement pas ses engagements. Le durcissement de la crise se traduit donc directement dans les comptes. "Depuis le début de l'année 2009, la baisse continue de l'activité traduit l'aggravation de la crise économique comme le montrent les derniers chiffres publiés par l'Association Internationale du Transport Aérien", a expliqué le directeur général Pierre-Henri Gourgeon, en soulignant que le mois de mars, traditionnellement plus dynamique que janvier et février, a subi une poursuite de la dégradation. "La baisse de l'activité s'accompagne d'une détérioration significative des recettes unitaires, tant dans le transport de passagers que dans le cargo, du fait notamment du recul des voyages d'affaires et de la chute du commerce international", a indiqué le dirigeant, qui rappelle qu'Air France KLM ne profite pas à plein du reflux des prix pétroliers, du fait de l'existence d'instruments de couverture sur les prix élevés du kérosène, qui ont fait leur preuve jusqu'à l'été 2007 mais qui sont perdants depuis. La compagnie a "dénoué" une partie de ces couvertures, mais celles-ci pèsent encore. Au final, Air France KLM devrait accuser une perte opérationnelle de l'ordre de 200 Millions d'Euros pour l'exercice qui s'achève la semaine prochaine, le 31 mars. La teneur exacte du résultat net dépendra de la valorisation des instruments de couverture à la valeur de marché à la date du 31 mars 2009. Cela signifie, les chiffres des neuf premiers mois de l'année étant connus, que la perte opérationnelle du dernier trimestre de l'année (janvier à mars) avoisinera les 645 Millions d'Euros, rien que ça ! Les perspectives pour l'exercice suivant ne sont guère plus enthousiasmantes. Pierre-Henri Gourgeon a ajouté que celui-ci "va s'ouvrir dans un contexte de crise sans précédent avec une absence de visibilité sur l'évolution de la conjoncture économique et sur la volatilité de paramètres tels que les devises et le prix du carburant". La compagnie anticipe une contraction de 6% de son chiffre d'affaires sur une base comparable, et prévoit de maintenir ses efforts sur les coûts et de s'appuyer sur une trésorerie de "bon niveau" évaluée entre 3,5 et 4 Milliards d'Euros au 31 mars prochain. Pour autant, la direction n'entrevoit pas de profits sur le prochain exercice, ni même l'équilibre, puisqu'elle a concédé hier soir que les efforts opérationnels et la baisse du coût du carburant devraient permettre "de limiter la perte d'exploitation", mais non d'assurer l'équilibre. Les analystes se montrent ce matin déçus, mais finalement peu surpris, de la tournure prise par les événements. Pour Yan Derocles, le spécialiste du secteur au bureau d'études Oddo Securities, cette annonce pourrait être l'une des dernières grosses mauvaises nouvelles attendue pour l'entreprise, d'autant qu'elle a clairement annoncé, pour la première fois, tabler sur une perte sur l'exercice suivant, ce que de nombreux spécialistes redoutaient déjà. Quelques inconnues demeurent cependant, comme l'éventualité de nouvelles mesures de restructuration. "Nous estimons qu'un nouveau plan plus agressif devrait être dévoilé le 20 mai lors de la publication des résultats", selon l'analyste. Les derniers indicateurs du secteur ne présagent en effet rien de bon. Hier, l'IATA a annoncé un plongeon du trafic passagers mondial de 10,1% en février 2009 par rapport à février 2008, alimenté par une baisse des capacités de 5,9% sur la période et par la crise qui s'est durcie. Le coefficient de remplissage moyen des appareils a encore reculé de 3,2 points à 69,9%. Le fret reste dans l'oeil du cyclone avec une nouvelle chute de 22,1% après -22,6% en décembre et -23,2% en janvier. Le directeur général de l'organisation, Giovanni Bisignani, évoque une poursuite de conditions extrêmes dans le secteur, tout en notant que la baisse du fret s'est peut-être stabilisée. Il a fustigé l'attitude des gouvernements qui dépassent des centaines de Milliards pour les banques mais ne lèvent pas le petit doigt pour son secteur, malgré des revendications qu'il juge modestes et peu onéreuses en comparaison. "La priorité des compagnies aériennes de par le monde est de survivre", a ajouté Bisignani, souvent un peu emphatique dans ses interventions. Mais la réalité est là : l'Association anticipe désormais une perte globale de -4,7 Milliards de dollars pour les compagnies aériennes cette année, contre -2,5 Milliards dans sa précédente estimation, dont un déficit de 1 Milliard de dollars pour les seules compagnies Européennes. Le chiffre d'affaires du secteur devrait se contracter de -12% à 467 Milliards de dollars, un record puisque même après le 11 septembre 2001, le déclin n'avait atteint que -7%. "L'état du secteur aérien à ce jour est sinistre. La demande s'est détériorée beaucoup plus vite avec le ralentissement économique que nous l'avions anticipé il y a quelques mois", selon le directeur général, dont l'organisation vise un trafic passagers en baisse de 5,7% en 2009, tandis que le trafic cargo devrait reculer de 13% (contre respectivement -3% et -5% anticipé en décembre). Si le secteur était déficitaire en 2009, cela ajouterait une huitième année de pertes sur les neuf dernières. Depuis 2001, seul l'exercice 2007 s'est soldé par un bénéfice global, loin de gommer une contreperformance chronique, puisque l'industrie a amassé un déficit de 41,6 Milliards de Dollars de 2001 à 2006.



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