Analyse / Prudence, la crise n'est pas finie

22/05/2009 - 10:31 - Option Finance

(AOF / Funds) - L'aversion aux risques poussée à son paroxysme en début d'année est en train de refluer pratiquement aussi rapidement qu'elle s'était manifestée. Les premiers signes d'une stabilisation de la vitesse de dégradation de la conjoncture ont été le signal que les investisseurs attendaient pour se repositionner à l'achat sur l'ensemble des classes d'actifs risquées, subitement considérées bon marché. La question de la pérennité de ce mouvement hante l'esprit de la quasi-totalité des gérants de portefeuilles. Personne n'ose pronostiquer la fin de la crise, sachant pertinemment que les déséquilibres structurels à l'origine de celle-ci ne peuvent se résorber aussi rapidement. En effet, le ratio de la dette totale américaine rapportée à son PIB, qui s'élève à plus de 370 %, n'est pas encore entré en phase de résorption. Néanmoins, les opérateurs ont pris pour argent comptant les déclarations du G20 et accordent une confiance aveugle aux politiques non conventionnelles des banques centrales. Le risque systémique est considéré comme écarté au niveau des banques américaines, qui ont passé avec succès l'épreuve des stress tests. De façon similaire, le risque de faillites d'entreprises semble circonscrit à quelques-unes d'entre elles parfaitement identifiées. [-73]· l'image de Chrysler, la concrétisation du dépôt de bilan est supposée suffisamment organisée pour que les impacts collatéraux soient minimisés. Ce sentiment que le pire de la crise pourrait être derrière nous et que ses effets seraient contenus, alimente l'appétit des investisseurs. Ceux-ci doivent, pour ne pas perdre de terrain par rapport à leurs indices de référence (rebond de 30 % du CAC depuis le 9 mai), basculer leur stratégie d'investissement en mode offensif. Se crée, alors, un phénomène auto-réalisateur d'amélioration de la situation qui se transmet aux consommateurs qui retrouvent leur optimisme. Les banquiers centraux l'ont parfaitement compris et tant Ben Bernanke que Jean-Claude Trichet soufflent un vent chaud en déclarant publiquement qu'ils perçoivent le point d'inflexion vers une amélioration de la croissance. C'est justement dans ces phases où l'on croit le malade guéri qu'il faut faire preuve de la plus grande prudence en gestion de portefeuilles en sous-pondérant les actions au bénéfice des obligations. L'exemple des crises passées montre que la sortie est systématiquement anticipée trop tôt par les marchés et cette fois-ci probablement plus que jamais. De par leurs actions, les autorités des pays développés se sont évertuées à minimiser les effets de la tourmente mais elles ne peuvent en aucun cas s'arrêter là. Les indispensables et douloureuses réformes de réduction de dette et de déficits doivent absolument être mises en place, sous peine de ne plus pouvoir, au prochain choc, éviter l'effondrement du système financier mondial.. Par Thierry Million, directeur de la gestion obligataire et de la recherche quantitative, Allianz Global Investors France