Analyse / Arabie Saoudite : solidité face à la crise

28/05/2009 - 11:32 - Option Finance

(AOF / Funds) - Au stade actuel de la crise économique mondiale, l'Arabie Saoudite reste relativement épargnée. L'ouverture assez faible de son économie, y compris son secteur financier, ainsi que la capacité à mettre en oeuvre une politique de relance massive amortissent les effets de la crise sur l'économie. Dans la région du Golfe, le secteur bancaire saoudien est actuellement le moins affecté par la crise. D'une manière générale, les banques saoudiennes ont suivi une politique de crédit assez conservatrice, limitant l'exposition aux actifs à risque et aboutissant à une situation de liquidité bancaire assez confortable. L'essentiel du passif du secteur bancaire est composé de dépôts domestiques. La croissance assez modérée du crédit n'a pas poussé les banques à se financer à l'extérieur, elles n'ont donc été que modérément atteintes par l'assèchement du crédit au niveau mondial. Cependant, la croissance économique reste étroitement liée à la production d'hydrocarbures qui représente plus d'un tiers du PIB. La baisse de production d'hydrocarbures et les perspectives médiocres des secteurs non pétroliers devraient entraîner le royaume saoudien dans la récession en 2009. Pour faire face à la forte baisse des prix du pétrole débutée mi-2008 (le baril de Brent est passé de 140 à 40 dollars US entre juillet et décembre 2008), l'OPEP a décidé sa plus forte baisse de quota de production depuis sa création (- 13 % environ). En tant que premier producteur de pétrole de l'OPEP, la contribution de l'Arabie Saoudite est importante. Sa production de pétrole devrait se contracter d'environ 10 % en 2009, ce qui devrait entraîner une baisse parallèle de la production gazière (gaz extrait en association avec le pétrole et essentiellement utilisé dans l'industrie). Etant donné les perspectives du marché pétrolier pour 2009 (attendu à 50 dollars US/baril en moyenne sur l'année), le niveau de prix du pétrole ne devrait pas permettre un relèvement des quotas de production à court terme. Les cours actuels sont, en effet, encore loin de l'objectif du gouvernement saoudien (75 dollars US/baril). Au total, le PIB pétrolier (gaz compris) devrait se contracter d'environ 10 % en termes réels sur l'année 2009 et de pratiquement 40 % en termes nominaux. La réduction importante des recettes pétrolières attendues pour 2009, couplée à la nature expansionniste du budget, va réduire fortement l'excédent budgétaire. Les recettes pétrolières concourent pour 85 % des ressources budgétaires totales. La baisse des prix du pétrole (hypothèse de 50 dollars US/baril en moyenne pour le Brent) ainsi que la réduction de production (d'environ 10 %) devraient diviser les recettes budgétaires par deux en 2009 par rapport à l'année précédente. Du côté des dépenses, on peut estimer que le plan de relance massif aboutira à une hausse des engagements de l'ordre de 10 % par rapport à 2008. Au final, le solde budgétaire devrait rester légèrement positif (1,4 % du PIB attendu contre 33 % en 2008). Même dans un scénario déprimé à 35 dollars US/baril en 2009, la situation reste facilement maîtrisable puisque le déficit, qui se creuserait dans un tel cas jusqu'à 8 % du PIB, pourrait être largement évité à l'aide des avoirs publics extérieurs. Ces derniers sont estimés à plus de 450 milliards de dollars US (environ 100 % du PIB) et seront mis à contribution pour faire face à un déficit éventuel. Malgré la chute attendue des recettes pétrolières en 2009, une politique budgétaire clairement expansionniste devrait être un soutien significatif pour l'activité. Le budget 2009 sera le plus important jamais programmé. Les dépenses sont prévues en hausse de 15 % par rapport à 2008 et devraient atteindre plus de 39 % du PIB. Mais, contrairement à ce que l'on a observé dans les périodes précédentes de baisse importante des recettes pétrolières, les dépenses publiques en capital ne serviront pas de variable d'ajustement mais devraient croître de 35 % environ. Par ailleurs, l'augmentation de l'offre de financement public devrait permettre de compenser partiellement l'assèchement du financement bancaire. Le Fonds public d'investissement et le Fonds saoudien de développement industriel, qui fournissent du financement concessionnel de long terme, sont incités à accroître leur engagement dans le financement de projet, notamment grâce à l'extension des maturités maximales et à une hausse des plafonds de participation. La poursuite du programme de villes nouvelles fera figure de test quant à l'implication des finances publiques dans des projets prévus pour être financés par le secteur privé. Grâce à ce plan de relance, les dépenses publiques devraient être la composante la plus dynamique de la croissance en 2009 et permettre de partiellement compenser la baisse d'activité dans le secteur pétrolier. Par Pascal Devaux, Direction des études économiques de BNP Paribas (Extrait de "Conjoncture", mai 2009)