INTERVIEW Loïc Caperan (DG POWEO) - "Poweo : acteur majeur de l'énergie"

24/09/2009 - 15:25 - Option Finance

(AOF) - Nommé directeur général de Poweo début juin, Loïc Caperan mise sur la réforme du marché de l'électricité en France pour améliorer les comptes du groupe et ses perspectives. Soutenu par son actionnaire de contrôle, le groupe énergétique autrichien Verbund, l'ancien consultant et ex-directeur général délégué d'EDF entend assurer à Poweo une place d'acteur incontournable de l'énergie en France.

Les pertes de Poweo se sont réduites au premier semestre malgré un environnement très dégradé. Pourtant vos prévisions pour le second semestre sont très prudentes. Pour quelles raisons ?

Notre performance s'explique notamment par la hausse de la production d'électricité et la réduction de certaine dépense d'exploitation. Le marché français de l'électricité de gros reste en réalité très déprimé. Notre perte opérationnelle estimée pour le second semestre devrait être supérieure à celle du premier semestre en raison de la dégradation du risque clients, de la hausse du taux de résiliation et surtout, du niveau des prix de marché à terme, toujours inférieur à ce jour à nos hypothèses budgétaires. Nous présentons une sensibilité de notre résultat opérationnel au prix à terme de l'électricité de l'ordre de 2,5 millions d'euros pour une variation de un euro.

Poweo attend donc beaucoup de la réforme du marché de l'électricité annoncée par la France sous la contrainte de Bruxelles ?

L'élargissement de l'ouverture du marché de l'énergie en France est naturellement salutaire. Aujourd'hui, les prix de l'électricité peuvent être jusqu'à deux fois plus élevés qu'en Belgique. Heureusement, les choses devraient bouger rapidement puisque les nouvelles règles devront être effectives au 1er juillet 2010. Je vous rappelle qu'à cette date tous les entrants (Poweo, Direct Energy mais aussi GDF Suez), pourront s'approvisionner auprès d'EDF " aux conditions économiques " du parc de centrales existants. En clair, nous devrions acheter à EDF de l'électricité nucléaire moins chère. Pour nous, il ne fait pas de doute que l'application de cette réforme dynamise très significativement la concurrence.

Le prix de vente sera donc déterminant. EDF estime le juste prix à 45 euros par mégawatt/heure. Et vous, à combien estimez-vous ce prix de vente ?

Nous pensons que payer en moyenne aux alentours des 30 euros par mégawatt/heure faciliterait la concurrence et nous permettrait de financer plus aisément nos investissements dans la production d'énergie. [-73]· cet égard, notre première centrale à gaz sera mise en service la semaine prochaine à Pont-sur-Sambre (412 MW) et une prochaine identique devrait être opérationnelle à Toul au premier semestre 2012.

Vos comptes du premier semestre ont été lourdement pénalisés par des charges liées à des créances irrécouvrables, comment comptez-vous redresser cette situation ?

Nous faisons face à une situation assez classique. Lorsqu'un nouvel acteur pénètre sur un marché, il a tendance à attirer une proportion de clients indélicats. La crise économique n'a rien arrangé. Nous sommes en train de nettoyer notre base clients pour limiter ce risque d'impayés. Ce qui explique d'ailleurs l'importance actuelle de notre taux de résiliation.

Vous entendez conserver votre modèle d'opérateur intégré. Pour autant, vous allez vous recentrer sur les activités les plus attractives. Pouvez-vous précisez ?

L'équipe dirigeante est au travail depuis trois mois. Nous élaborons actuellement un plan d'action qui sera présenté le 5 novembre au conseil d'administration. Poweo doit effectivement se recentrer sur ses développements et activités les plus attractifs. Le groupe peut également optimiser son organisation. Enfin, nous comptons exploiter l'expertise et les ressources de Verbund, à l'exemple de l'énergie hydraulique. Si les prix de l'électricité sont actuellement faibles, nous avons la conviction qu'ils s'élèveront à moyen et long terme en raison de l'insuffisance des capacités de production. Aujourd'hui, le prix de " pointe " supplémentaire est à 50 euros par MWh. [-73]· long terme, le prix de base pourrait s'établir aux alentours des 60 à 65 euros par MW. Dans cette perspective, nous comptons faire de Poweo un acteur majeur de la production d'électricité et de gaz en France. Propos recueillis par Pierre-Jean Lepagnot.

AOF - EN SAVOIR PLUS

LE SECTEUR DE LA VALEUR

Services aux collectivités

Les records historiques de consommation d'électricité enregistrés en janvier suite à la vague de froid ont soutenu l'activité d'EDF. Le groupe a affiché une croissance de 15% de son chiffre d'affaires trimestriel, à 21,1 milliards d'euros. La hausse atteint 12,5% à taux de change et structure comparables. C'est bien supérieur aux attentes des analystes qui tablaient, en moyenne, sur une progression de 10%. En dépit de la crise GDF Suez a bénéficié d'une croissance de ses revenus et de son bénéfice d'exploitation à deux chiffres au premier trimestre 2009. Son chiffre d'affaires a ainsi bondi de 10% à périmètre constant, à 25,6 milliards d'euros, tandis que son résultat brut d'exploitation s'est accru de 12,6%, à 5,3 milliards d'euros. Encore une fois, ces excellentes performances proviennent de conditions climatiques favorables. Début 2009, l'Europe a connu la plus forte vague de froid depuis dix ans. Quant aux groupes d'environnement, l'activité de collecte des déchets auprès des clients industriels de Suez Environnement a été touchée par le ralentissement économique. Le chiffre d'affaires du groupe a donc reculé de 2,7% au premier trimestre. Par contre, en dépit d'une activité propreté en repli (-7,7%), les revenus de Veolia ont progressé de 4% à taux de change courants. La croissance des activités défensives - eau, énergie et transport - a plus que compensé le déclin des activités cycliques de propreté.

Services aux entreprises

Selon le ministère de l'écologie, l'activité du transport routier français de marchandises a reculé de 5,9% (à 206,2 millions de tonnes-kilomètre) en 2008. C'est la plus forte baisse du secteur depuis 1993, après deux années de hausse (+3,7% en 2007 et +3% en 2006). Le transport national a reculé de 5% (181,9 millions de tkm), alors qu'à l'international, la baisse est encore plus marquée (de 12,2% 24,3 millions de tkm). La situation ne s'arrange pas sur les premiers mois de 2009 et les acteurs sont affectés par une baisse des échanges entre agents économiques. Le premier trimestre a vu 581 dépôts de bilan, soit une progression spectaculaire de 64,6% par rapport à la même période de 2008. Cette tendance aurait même été amplifiée sur les mois d'avril et mai car l'Unostra, une des organisations patronales du secteur, pronostiquait qu'un certain nombre de PME ne pourraient payer leurs charges sociales trimestrielles. Le ralentissement de l'activité est venu s'ajouter à d'autres difficultés, en particulier la flambée du prix des carburants sur le premier semestre 2008. Les professionnels craignent que le cabotage qui, depuis le 1er mai, autorise les transporteurs des pays ayant adhéré à l'Union européenne en 2004 à effectuer temporairement du transport de marchandises sur notre territoire, fragilise encore le secteur.