BNP Paribas AM tire les leçons de la crise en misant sur le conseil client

29/10/2009 - 10:54 - Option Finance

(AOF / Funds) - Si le pôle de gestion d'actifs de BNP Paribas devrait, après l'intégration de Fortis, faire partie des très grandes maisons européennes, il continue toujours à réaliser l'essentiel de sa collecte en monétaire. Si la crise a affecté de nombreuses sociétés de gestion, cela ne semble pas être le cas de BNP Paribas Asset Management (BNPP AM), la principale filiale de gestion de BNP Paribas. En 2008, BNPP AM a en effet enregistré une collecte nette positive de 3,2 milliards d'euros. Toutefois, BNP Paribas Investment Partners, qui regroupe l'ensemble des filiales de gestion de BNP Paribas, affiche en 2008 une décollecte nette de 4 milliards d'euros. Il est vrai que BNPP IP regroupe une vingtaine de filiales avec des spécialités bien marquées, comme la gestion alternative, qui ont subi de plein fouet la crise. Dès le début 2009, la collecte nette est redevenue positive pour la gestion dans son ensemble. Elle a atteint, sur le premier semestre, 13,2 milliards d'euros pour BNPP IP et 12,3 milliards d'euros pour BNPP AM, sur un total de 244 milliards d'euros d'actifs gérés pour cette dernière. "Nous avons déjà collecté 17 milliards d'euros depuis le début de l'année, se félicite Christian Dargnat, directeur général de BNPP AM et directeur des gestions de BNPP IP. En 2008, notre collecte a été positive et s'est élevée à 22 milliards d'euros. Nous avons traversé la crise de façon robuste, nous n'avons été exposés à aucun accident depuis deux ans, grâce à notre système de contrôle des risques." Mieux que cela, la société de gestion aurait profité de la crise pour gagner des parts de marché par rapport à ses concurrents. "Nous avons su convaincre nombre de nouveaux clients de nous rejoindre", poursuit Christian Dargnat. Le pôle de gestion d'actifs de BNP Paribas est ainsi devenu l'un des leaders au niveau européen. Une présence qui devrait encore s'affirmer grâce à l'acquisition de Fortis, le groupe financier belgo-néerlandais, dont les détails du plan d'intégration devraient être dévoilés le 1er décembre prochain par Baudouin Prot, directeur général de BNP Paribas. "Avec Fortis, nous allons atteindre les 20 milliards d'euros en gestion passive, les 10 milliards d'euros en gestion ISR et devenir l'un des principaux pôles européens en gestion structurée", énumère Christian Dargnat. BNPP IP pourra de ce fait proposer une gamme très étendue de produits de gestion. "Nous couvrons toutes les catégories de produits, des plus passifs aux plus actifs, indique Christian Dargnat. Nous sommes par ailleurs présents dans quarante pays." Cette course au gigantisme constitue un atout de la société de gestion. La taille apparaît en effet depuis la crise comme un élément déterminant afin de rassurer les investisseurs. Elle constitue une assurance, même si celle-ci ne peut jamais être totale, de liquidité. Un grand groupe aura, quelles que soient les conditions de marché, plus de facilité pour assurer la liquidité de ces fonds. Par ailleurs, elle permet de dégager des économies d'échelle et donc d'être plus compétitif en matière de frais prélevés.

Une vingtaine de sociétés de gestion dans le groupe

Déjà, BNPP IP intègre une vingtaine de sociétés de gestion. "BNPP AM constitue le navire amiral de BNPP IP, indique Christian Dargnat. La société de gestion a été créée en 1964, c'est la plus ancienne. Les autres entités ont été acquises au fur et à mesure, en fonction d'expertises qu'elles pouvaient apporter au groupe, avec une condition : elles doivent être rentables." A chaque fois que BNP Paribas cherche à développer une nouvelle expertise ou à mettre en place une nouvelle implantation à l'étranger, un arbitrage est effectué entre l'acquisition d'une société ayant fait ses preuves ou la croissance organique. "Ces acquisitions peuvent se faire par rachat partiel ou total du capital de la société de gestion cible", précise Christian Dargnat. Elles étaient jusqu'à récemment effectuées directement par BNP PAM. Depuis deux ans, une nouvelle structure juridique est en place, BNPP IP, qui chapeaute toutes les sociétés de gestion. Chaque entité en dehors de BNPP AM affiche donc une spécialité bien marquée. On trouvera par exemple une filiale dédiée aux changes, Overlay Asset Management, une plateforme de gestion alternative, Fauchier Partners ou encore une société de gestion spécialisée dans l'environnement, Impax, qui constitue l'une des dernières acquisitions en date de BNPP IP. A la différence des autres filiales de gestion, BNPP AM possède donc de nombreuses spécialités, dont certaines se sont développées depuis la crise. "La collecte continue de progresser dans le monétaire, les encours ont atteint les 90 milliards d'euros sous gestion", relate Christian Dargnat. En dehors du monétaire, le groupe a collecté dans l'obligataire, une des rares classes d'actifs à avoir véritablement séduit les clients depuis le début de l'année. "Nous avons gagné de nombreux mandats, se félicite Christian Dargnat. D'après une étude de Mercer, nos fonds obligataires sont systématiquement classés dans le premier quartile." Pour les autres catégories d'investissement, BNPP AM se met en ordre de marche afin de pouvoir proposer des produits à ses clients une fois l'aversion au risque levée. "Tout l'enjeu de l'année 2010 sera de parvenir à rassurer les clients, afin de transformer l'épargne collectée sur des produits à court terme en épargne longue", indique Christian Dargnat. En la matière, le gérant croit au développement de l'investissement socialement responsable (ISR), qui devrait susciter un intérêt croissant chez l'ensemble des clients. A ce titre, BNPP AM envisage progressivement de passer au tout ISR. "L'ISR est la grande tendance de demain, affirme Christian Dargnat. A l'avenir, ce ne sera plus une catégorie à part entière, car elle sera intégrée à toutes les gestions. On ne peut en effet plus se contenter de sélectionner des entreprises à partir des seuls critères financiers, on doit intégrer la gestion des risques, notamment celle des risques de réputation." A terme, le gestionnaire envisage de fusionner ses équipes de gestion et d'analystes extra-financiers afin d'optimiser la gestion de ce type d'investissement. Toujours dans une optique de contrôle des risques, le gestionnaire croit au développement des produits structurés et de la gestion indicielle. "Nous disposons d'une équipe importante, appelée 'sigma', spécialisée dans les produits structurés, les fonds de performance absolue, la gestion indicielle et les fonds garantis ouverts, précise Christian Dargnat. Nous sommes l'un des principaux acteurs en fonds structurés en Europe, ce positionnement nous permet d'offrir les meilleures conditions financières à nos clients et d'attirer les meilleures idées." Là encore, BNPP AM considère que sa taille lui permet d'apporter une plus grande valeur ajoutée à ses clients. "La structuration nécessite de l'innovation et le brassage d'idées nouvelles. Quand des acteurs ont une idée de produits, ils se tournent plus volontiers vers des grandes maisons, affirme Christian Dargnat. A l'identique, lorsque nous passons un appel d'offres, le fait de disposer d'un réseau important nous met en position de force." Idem en ce qui concerne la gestion indicielle. "Pour attirer les investisseurs, les ETF doivent afficher une parfaite liquidité, or celle-ci n'est possible que lorsque l'on gère des encours importants", poursuit Christian Dargnat.

Du sur mesure pour tous les clients

En dépit de sa capacité à bien gérer la crise, le gestionnaire a tiré un enseignement majeur de la période chahutée que viennent de traverser les marchés financiers, à savoir l'importance du devoir de conseil. "On ne peut plus se contenter de vendre de la gestion, il faut davantage expliquer ce que nous faisons et développer un service de conseil adapté", indique Christian Dargnat. A ce titre, un département d'ingénierie financière a été créé il y a trois ans comprenant 25 personnes, avec pour objectif d'offrir des solutions d'investissement sur mesure. "Il faut clairement identifier les besoins du client, ses contraintes, et offrir un conseil en investissement qui peut se traduire ou non par la vente de produits", poursuit Christian Dargnat. Si cette démarche concerne de prime abord les investisseurs institutionnels et la gestion privée, les particuliers ne sont pas oubliés. "On ne peut, avec la clientèle des particuliers, organiser au niveau de la gestion un conseil par des rencontres bilatérales, explique Christian Dargnat. En revanche, nous travaillons à l'élaboration de documents explicatifs sur nos produits afin de bien faire comprendre les objectifs de gestion en mettant en avant les risques propres à chaque produit." Reste à convaincre les investisseurs qu'il est temps de reprendre du risque. Sandra Sebag