Analyse / Allemagne : les comptes des entreprises se dégradent

03/11/2009 - 11:07 - Option Finance

(AOF / Funds) - Selon les données d'Eurostat, le taux de marge des entreprises allemandes (ratio de l'excédent brut d'exploitation à la valeur ajoutée) s'établissait à 41,2 % en 2008, en baisse de seulement 0,7 point par rapport à l'année précédente. Il demeurait, ainsi, à un niveau largement supérieur à celui du début des années 2000 (à 36,3 %). Un des atouts qui ont permis aux entreprises d'affronter la crise sans avoir à réduire massivement l'emploi. L'effondrement de l'activité et de la valeur ajoutée au début de 2009 a cependant vraisemblablement érodé leur taux de marge. La part des rémunérations dans la valeur ajoutée a, en revanche, sans doute progressé en début d'année. Elle avait déjà augmenté de 0,6 point en 2008 (à 57,6 %), après avoir fortement reculé à partir du milieu des années 1990 (67,9 % en 1993 et 63,4 % en 2000). Le ralentissement du rythme de progression des salaires devrait permettre aux entreprises de rattraper une partie de la baisse du taux de marge de 2008 et de restaurer leur compétitivité sur les marchés à l'exportation. Les entreprises ne pourront, cependant, réduire leur masse salariale qu'en ajustant leurs effectifs à la baisse. Les salariés ont, en effet, déjà consenti une forte modération salariale au cours de ces dernières années. L'activité a par ailleurs atteint un point bas cyclique, mais restait en repli de 5,9 % en glissement annuel au deuxième trimestre. Les coûts salariaux unitaires horaires ont ainsi augmenté de 8,3 % en glissement annuel au deuxième trimestre et le taux d'utilisation des capacités de production s'est sensiblement contracté au cours de ces derniers mois. A 71 % au deuxième trimestre 2009, il a reculé d'un point par rapport au premier trimestre et de 17 points par rapport au premier trimestre 2008 (à 88 %), un point haut cyclique. Les effets du dispositif d'aide au chômage partiel devraient donc progressivement s'estomper et l'emploi se contracter. Les entreprises seront d'autant plus incitées à réduire leur masse salariale qu'elles disposent par ailleurs de peu de possibilités pour restaurer leurs marges. La baisse du taux de cotisation sociale uniforme au fonds du système de santé, de 15,5 % à 14,9 % au 1er juillet 2009, devrait apporter une bouffée d'air aux entreprises. Les revenus de la propriété perçus en 2008 avaient, par ailleurs, progressé de 9,1 % en 2008 après s'être contractés de 2,1 % en 2007, tandis que les revenus distribués aux actionnaires avaient augmenté de 4,8 % (+ 1,4 %). Ces sources de revenus vont vraisemblablement se tarir en 2009. Le revenu disponible net des entreprises, en baisse de 6,7 % en 2008 (après + 2,4 % en 2007) devrait donc reculer en 2009. L'effondrement de l'activité dissuade les entreprises d'investir et érode leurs capacités d'investissement. Le taux d'épargne a ainsi légèrement diminué en 2008 (à 18,5 % ). Il reste largement supérieur à celui de 2000 (12,4 % de la VA), mais il a reculé de 0,8 point par rapport à 2007. De même, la baisse de 4,4 points du taux d'autofinancement des entreprises (épargne brute/FBCF) en 2008 (à 97,2 %) suggère un accroissement de l'endettement des entreprises et une vulnérabilité plus forte au durcissement des conditions d'octroi du crédit. Le rythme d'expansion des prêts aux entreprises avait, en effet, accéléré en 2008, atteignant un point haut cyclique au troisième trimestre 2008 (+ 10,3 % en glissement annuel). Les entreprises continuent de recourir aux crédits, mais à un rythme sensiblement moindre qu'à la fin 2008 (+ 6,5 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2009). L'accroissement du nombre de faillites d'entreprises depuis le début d'année (+ 10,4 % en glissement annuel en juillet, après + 12,4 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2009) confirme par ailleurs la dégradation des comptes des entreprises au premier semestre. Tant les comptes des ménages que ceux des entreprises témoignent d'une diminution des capacités de financement des agents non financiers. Le rebond de l'activité au second semestre 2009 devrait permettre aux entreprises de restaurer partiellement leurs marges et d'atténuer l'augmentation du taux de chômage. La croissance devrait toutefois rester faible en 2010 (+ 1,4 % après - 4,7 % en 2009), érodant d'autant les capacités d'investissement des entreprises et de consommation des ménages allemands. Par Catherine Stephan, économiste Extrait de "ECO WEEK", direction des études économiques, BNP Paribas