Analyse / Attention au risque budgétaire

19/04/2010 - 11:04 - Option Finance

(AOF / Funds) - La remontée des marchés d'actions depuis le début de 2010 valorise un scénario économique optimiste : reprise progressive de la croissance, amélioration forte des résultats des sociétés, maintien des taux d'intérêt à long terme faibles ; seul ce scénario peut justifier que les PER, aux Etats-Unis et en Europe, soient aujourd'hui supérieurs à leur valeur moyenne de la période 2002-2008. Mais, dans le cas particulièrement de la zone euro, ce scénario ne valorise aucun des risques qui pourraient dégrader l'environnement économique : remontée des prix des matières premières (acier, cuivre...), activité plus faible que ce qui est prévu et surtout, de notre point de vue, risque budgétaire. La totalité des pays de la zone euro se sont engagés à réduire leur déficit public à 3 % du Produit Intérieur Brut en 2012 ou au pire en 2013. En 2010, le déficit public moyen de la zone euro sera de 7,5 % du PIB environ (6,5 % en Allemagne, 8,5 % en France, peut-être 12 % en Grèce, 6 % en Italie, entre 9 et 10 % en Espagne...). On voit ici apparaître deux risques systémiques. Le premier risque est que, les pays de la zone effectivement entreprennent cette réduction à marche forcée de leurs déficits publics. Il en résulterait alors presque certainement une rechute en récession de l'économie de la zone euro. Sans réduction rapide des déficits publics, on attend dans la zone euro 1 % de croissance au mieux en 2010, 1,5 % en moyenne en 2011-2012 ; si le déficit public est réduit de 2 points et demi de PIB par an, la croissance redevient négative. Certains espèrent qu'il y aurait des effets dits de "neutralité ricardienne" : la reprise de la consommation, avec l'amélioration des finances publiques, compenserait la baisse des déficits publics. C'est très douteux, car il faudrait une grande rationalité des ménages, ceux-ci anticipant qu'ils devront payer moins d'impôts dans le futur. Le second risque est que les pays ne réduisent pas leurs déficits publics pour préserver la croissance. Les marchés financiers pourraient réagir très négativement à cette évolution. La réaction des marchés conduirait à une hausse des taux d'intérêt à long terme dans de nouveaux pays, autres que la Grèce : Espagne, Portugal... Les marchés d'actions ne valorisent ni le risque de rechute de l'activité, ni le risque de remontée des taux d'intérêt à long terme. Par Patrick Artus, directeur de la recherche et des études de Natixis