Face à ces multiples interrogations, les investisseurs s'avouent pour beaucoup en panne de réponses et de certitudes. Conséquence, les marchés actions titubent et la Bourse de Paris se retrouve depuis septembre dernier emprisonnée dans un canal de consolidation compris entre 3300 et 4100 points - une situation qui est appelée à durer, de l'avis de Stéphane Barbelette, gérant à la Banque Populaire Val de France. Sa préconisation : aller chercher de la croissance hors de la Zone Euro.
Stéphane Barbelette : le violent rebond des indices boursiers enregistré entre mars et septembre 2009 correspond à la phase la plus simple, celle de la correction logique d'énormes excès à la baisse. Souvenez-vous qu'au creux du marché, des sociétés solides n'étaient plus valorisées qu'à 40 % de leurs fonds propres ; l'heure était à la grande braderie avant la fin du monde ; or, il se trouve que le monde ne s'est pas écroulé.
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Pour que le marché aille plus haut, il faut, je le répète, une reprise économique bien établie, des certitudes sur les bilans des banques et que toute l'agitation autour de la dette souveraine se calme réellement ; mais au vu des dernières déclarations d'Axel Weber ou de François Baroin, je n'ai pas l'impression que l'on en prenne le chemin (NDLR Voir COUACS ET DISSONANCES)
Pour que l'on passe en dessous de la borne basse du canal, il faudrait que l'on ait soit un « double dip », un double creux, autrement dit une rechute en récession, soit encore une accentuation des dérapages du monde financier, soit enfin une aggravation de la crise de la dette souveraine ; or, sur ces trois plans, des mesures ont été prises ; les plans de relance ont fonctionné et, si l'on fait abstraction des problématiques européennes qui, pour l'heure, nous obnubilent, la croissance est avérée en Asie, en Amérique latine et même aux Etats-Unis. Les errements de la finance sont aujourd'hui plus contenus - les discours des directions des banques témoignent d'une volonté marquée de maîtriser les risques, ce qui induit concrètement un encadrement beaucoup plus strict du trading pour compte propre ; et puis Etats et institutions se sont mobilisés pour endiguer le risque de contagion de la crise grecque : le plan de sauvetage de la Grèce et le plan de stabilisation de la zone euro sont là pour le prouver. Tout cela m'amène à croire que si nous ne pouvons sortir par le haut du canal, nous n'avons pas de raison d'en sortir par le bas.
La question est pour moi de savoir comment, nous, gérants européens, allons mettre à profit cette situation pour le compte de nos clients. Pour notre part, nous investissons dans des produits qui sont directement indexés aux marchés de croissance, que sont les marchés chinois, indiens, brésiliens et nous évitons dans la mesure du possible tout ce qui pourrait être sensible à la dégradation des conditions économiques en Europe et à l'accroissement prévisible de la fiscalité européenne. L'impérieuse nécessité d'assainir les finances publiques incitera sans doute les Etats à aller taper dans la cagnotte de certains. C'est précisément pourquoi nous n'investissons plus dans les secteurs dont nous estimons qu'ils seront soumis aux caprices de la puissance régalienne. Bien que leurs niveaux de valorisation soient faibles, nous nous tenons donc à l'écart des télecoms et des utilities, comme les fournisseurs de gaz et d'électricité qui sont à la merci du régulateur. Mais plus généralement, tous les secteurs dont l'activité est principalement domestique sont pour nous problématiques. Et cela m'amène à inclure les banques dans ma liste des secteurs à éviter. Caricaturalement, BNP Paribas, Crédit Agricole ou Société Générale ne peuvent pas fermer toutes leurs agences en France et se délocaliser pour échapper à une taxation de leurs profits.
Absolument. C'est en effet la limite de notre raisonnement. Les risques que les banques encourent sont déjà grandement anticipés par les marchés actions. Voilà pourquoi à mon sens, un investisseur doit se poser la question du timing pour vendre ses lignes bancaires. Il doit le faire sur un rebond. Aujourd'hui se défaire de BNP Paribas à 45 euros ou de Société Générale à 33 euros serait vraiment dommage. Mieux vaut attendre que les cours remontent pour sortir.
Nous jouons moins des secteurs que de belles franchises, des groupes avec de fortes barrières à l'entrée. LVMH, le leader mondial du luxe, en est un parfait exemple avec des marques uniques. Le groupe possède également l'avantage d'être présent sur toute la planète. D'évidence, LVMH profitera immanquablement de la croissance des zones où la reprise est la plus robuste, sans même évoquer la réappréciation du dollar qui lui est éminemment favorable. Essilor fournit aussi un magnifique exemple de franchise. En tant que numéro un mondial des verres ophtalmiques, il détient 35 % de parts de marché au niveau mondial. Il s'appuie aussi sur une demande structurellement croissante de lunettes grâce au vieillissement de la population mondiale.
Oui, nous investissons dans des obligations corporate, mais sans nous attacher particulièrement au jugement des agences de notation, que, pour tout dire, nous ne déifions pas. La notation a selon nous peu d'importance. Nous nous préoccupons davantage de la structure financière de l'entreprise émettrice de l'obligation, de sa capacité à dégager des free cash flows et à rembourser sa dette. En l'occurrence, nous nous sommes placés sur certaines émissions obligataires de Fiat et de Rallye.
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