Marché primaire actions - Des volumes en forte baisse au 1er semestre

29/06/2010 - 10:21 - Option Finance

(AOF) - "Nous attendions davantage d'introductions en Bourse et d'opérations liées au refinancement de fusions-acquisitions ce premier semestre", reconnaît Jean-Michel Berling, responsable du marché primaire actions chez Crédit Agricole CIB. Le marché affiche en effet des volumes en net repli par rapport à l'année dernière. En Europe, les volumes enregistrés sur les marchés equity et equity-linked atteignent 45 milliards d'euros à la mi-juin, contre 128 milliards d'euros sur la même période en 2009 et 233 milliards d'euros sur l'ensemble de l'année, selon des estimations de la Société Générale. En particulier, les sociétés françaises représentent à ce jour seulement 5 % des volumes européens, contre 18 % au premier semestre 2009. Plusieurs tendances notables se dessinent depuis le début de l'année. "Alors que les institutions financières ont généré plus de la moitié de l'activité l'an dernier, la plupart cherchant à rembourser très rapidement les aides gouvernementales, elles représentent seulement le quart de l'activité depuis le début de l'année", constate Laurent Morel, responsable du marché primaire actions à la Société Générale. Non seulement la répartition de l'activité entre les institutions financières et les corporates a nettement évolué, mais la nature des opérations a également beaucoup changé. L'année 2009 avait en effet été marquée par une activité soutenue sur le segment des augmentations de capital et des convertibles, des segments beaucoup moins dynamiques cette année. "En 2009, les augmentations de capital étaient avant tout liées à la crise et au besoin de certaines entreprises de renforcer leur bilan. C'était notamment le cas en France des augmentations de capital de Saint-Gobain, Lafarge ou Pernod Ricard, explique Laurent Morel. Nous voyons beaucoup moins d'opérations de ce type cette année. Compte tenu des opérations d'assainissement de bilan déjà réalisées, des levées de fonds considérables sur le marché obligataire l'an dernier, de la reprise de la syndication bancaire et de l'amélioration de l'environnement économique - malgré les tensions observées ces deux derniers mois -, les entreprises ont aujourd'hui des réserves de cash et sont plus solides." Les banquiers espéraient donc une reprise des fusions-acquisitions pour tirer l'activité. "Mais le marché des fusions-acquisitions n'a pas été très actif en Europe, souligne Thierry Olive, responsable du Corporate Finance Europe chez BNP Paribas. Les augmentations de capital, liées à des exigences de restructuration de bilan, n'ont pas trouvé le relais escompté avec la reprise des fusions-acquisitions. Cependant, les entreprises étudient de plus en plus des opportunités de croissance externe, et nous sommes relativement optimistes pour le second semestre." Des opérations pourraient notamment être réalisées plus particulièrement dans le secteur métallurgique et minier, ainsi que dans celui de l'assurance. En ce qui concerne les convertibles, après une vingtaine d'opérations au premier trimestre, notamment une émission de convertibles par Gecina pour 320 millions d'euros fin mars, du côté des corporates français l'activité a ensuite été pénalisée par la crise de la dette souveraine. La hausse de la volatilité sur le marché actions, combinée à l'écartement des spreads de crédit, a rendu les conditions d'émission difficiles, d'autant que les intervenants habituels sur ce marché appartiennent le plus souvent à la catégorie non-investment grade. L'indice Crossover est ainsi remonté à plus de 600 pb au plus fort de la crise, contre 400 pb en avril, et fluctue actuellement autour de 500 pb. Les banquiers s'attendent à une reprise de l'activité, si les marchés continuent à se stabiliser. Le suisse Mobimo, dans le secteur immobilier, a réalisé une opération de petite taille et très domestique le 16 juin dernier. Si cette émission ne rouvre pas à proprement parler le marché, elle a retenu l'attention après deux mois de gel de l'activité. Face à la baisse des volumes sur les segments des augmentations de capital et des convertibles, les opérations d'introduction en Bourse sont de leur côté reparties. Au premier semestre, elles représentent le quart du volume total enregistré, alors qu'aucune opération n'avait eu lieu sur la même période en 2009. "Le marché des IPO s'est rouvert mais reste un marché de fenêtres", prévient néanmoins Thierry Olive. Les introductions en Bourse du polonais PZU, de Rusal, Amadeus, Kabel Deutschland et Brenntag comptent parmi les opérations les plus marquantes de ce semestre. Côté français, seule une IPO de taille significative a été réalisée, celle de Medica en février pour un montant de 314 millions d'euros, et dont le pricing a été revu à la baisse. Cela n'a d'ailleurs pas été une exception. Sur la vingtaine d'IPO supérieures à 100 millions d'euros depuis le début de l'année en Europe, aucune n'est ressortie dans le haut de la fourchette initiale. Six seulement ont été "pricées" en milieu de fourchette et toutes les autres dans la partie basse de la fourchette, voire en-deçà. "Les investisseurs sont sélectifs, explique Xavier Larnaudie, coresponsable de la syndication actions de CA-CIB. Ils privilégient les candidats qui offrent de la liquidité, présentent un business model résistant et qui ainsi devraient leur permettre d'enregistrer rapidement des performances." En attendant, de nombreuses entreprises ont choisi de reporter leur introduction. C'est le cas de Fideuram la semaine dernière en Italie, de Renovalia en Espagne, ou encore de Merlin Entertainments et Travelport au Royaume-Uni. "Plus d'une vingtaine d'IPO ont été reportées au second semestre, alors que l'on en compte déjà par ailleurs une vingtaine de programmées", souligne Laurent Morel. En France, quelques projets d'IPO sont évoqués, notamment les introductions du groupe Lucien Barrière, de la division transport de Veolia Environnement ou encore de la branche services d'Accor. [8]Angèle Pellicier