Immobilier : les gérants d'OPCVM privilégient l'immobilier locatif

13/07/2010 - 12:08 - Option Finance

(AOF / Funds) - Si les valorisations boursières des sociétés liées à l'immobilier ont souffert dans la crise, un bon stock picking dans ce domaine permet actuellement d'obtenir parmi les meilleurs rendements du marché comparativement aux autres classes d'actifs. Sur dix ans, à fin 2009, l'immobilier présente le meilleur taux de rentabilité interne (performance, plus-value et rendements cumulés) comparativement aux autres classes d'actifs en France, selon l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF). A titre d'exemple, le taux de rentabilité interne (TRI) de l'immobilier d'entreprise sur dix ans, à fin 2009, s'élève à 12 %, contre - 0,5 % pour les actions françaises, 4,1 % pour les Sicav obligataires et 2,8 % pour les Sicav monétaires. Pour autant, est-ce opportun d'investir aujourd'hui dans l'immobilier, compte tenu de l'absence de visibilité sur la reprise économique qui persiste ? A première vue, les perspectives ne sont pas porteuses. Pourtant, pour les gérants d'OPCVM, les valeurs liées directement ou indirectement à l'immobilier offrent encore des opportunités d'investissement. En effet, l'immobilier coté délivre des rendements toujours attractifs comparativement aux autres classes d'actifs : "Les foncières offrent à fin juin des rendements boursiers sécurisés et supérieurs à 6 %", indique Paul Reuge, gérant du fonds Compagnie Immobilière Acofi. Au sein du secteur, une majorité préfère éviter les promoteurs immobiliers, souvent jugés trop spéculatifs, pour privilégier les valeurs foncières (des sociétés ayant comme objet soit l'acquisition ou la construction d'immeubles en vue de leur location, soit la détention de participations dans des sociétés à objet social identique), comme Unibail-Rodamco, Klépierre ou Gecina (GFC). On comprend pourquoi, lorsqu'on observe leur rendement. Sur dix ans, à fin 2009, les foncières présentent le meilleur taux de rentabilité interne (performance, plus-value et rendements cumulés) avec 13,8 %, de même sur quinze et vingt ans, selon l'IEIF. De plus, les gérants jugent les foncières particulièrement attractives en ce moment, en raison de la forte décote de leurs cours de Bourse par rapport à la valeur de leurs actifs nets réévalués (ANR), ce qui laisse, à l'avenir, une marge de progression. "Les cours de Bourse des foncières ne reflètent actuellement que 80 % de la valeur de leur ANR, c'est-à-dire qu'ils sont actuellement décotés de 20 %", indique Frédéric Tassin, gérant du fonds Aviva Valeurs Immobilières. Une partie de cette décote est liée aux anticipations des investisseurs qui attendent une baisse des loyers en 2010, "car les taux de vacance devraient continuer d'augmenter légèrement aux alentours de 7 à 7,5 %, contre 6,8 % à fin 2009, précise Axel Laroza, gérant du fonds Objectif Actifs Réels, chez Lazard Frères Gestion. Les revenus des foncières devraient également être affectés par des indexations qui leur seront moins favorables cette année en raison de la baisse de l'inflation et du coût de la construction par rapport aux années précédentes. Les revenus des foncières ne seront donc pas en forte croissance en 2010". Pour autant, les foncières continuent d'être attractives. "Nous n'anticipons pas, pour 2010, de baisse significative des valeurs d'actifs des foncières, en raison d'un écart important entre taux obligataires et rendements immobiliers. Une hausse pourrait même se dessiner dès 2011, liée à une possible amélioration du niveau de vacance et à une hausse des loyers", poursuit Axel Laroza. D'autres gérants sont cependant moins positifs et pensent que la décote des foncières ne disparaîtra pas avant plusieurs années. "Nous attendons un retour à la parité entre le cours de Bourse des foncières et leur ANR dans les trois à quatre prochaines années", précise Frédéric Tassin. Néanmoins, si les valeurs sont décotées, elles offrent tout de même actuellement "des rendements annuels supérieurs à 5 %", indique Axel Laroza. En attendant que les valorisations remontent, le contexte économique toujours difficile impose aux gérants d'OPCVM immobiliers d'être actifs dans leur stock picking tout en restant prudents. Nous portons une attention particulière à la maturité de la dette des foncières que nous sélectionnons et au coût de leur financement", précise Paul Reuge. "Nous sélectionnons de belles foncières avec une structure de bilan de premier rang et qui possèdent aujourd'hui une structure financière qui leur permet de faire des acquisitions", précise pour sa part Frédéric Tassin. En ce qui concerne la typologie des actifs, la majorité des gérants privilégient l'immobilier de bureau. "Les immeubles de bureaux les plus sécurisés des marchés francilien et lyonnais ainsi que les boutiques et centres commerciaux les mieux situés en France font figure de valeur-refuge, comme l'a démontré l'intense compétition pour le centre commercial Cap 3 000 à Nice, emporté par un consortium franco-néerlandais pour environ 450 millions d'euros", explique-t-on chez Colliers UFG PM. Les rendements de l'immobilier de bureau sont en effet attractifs : "Il distribue actuellement un dividende de 6 % par an, soit 50 % de plus que pour le marché boursier dans son ensemble", ajoute Frédéric Tassin. Ces rendements pourraient même augmenter : les valorisations des foncières spécialisées dans l'immobilier de bureau devraient en effet profiter d'un rééquilibrage de l'offre et de la demande, liée au fait que de nombreuses foncières ont préféré reporter des projets de construction plutôt que de courir le risque de ne pas trouver de locataire ou de financement. Contrairement à la crise immobilière des années 1990, qui était liée à un trop-plein de constructions ayant entraîné une pression à la baisse sur les loyers, nous n'observons pas aujourd'hui d'énorme déséquilibre entre l'offre et la demande d'immobilier de bureau, et les loyers semblent plutôt se stabiliser", affirme Frédéric Tassin. Mais là encore, les gérants sont sélectifs, car l'immobilier de bureau est jugé comme un marché à deux vitesses. "Les bureaux 'prime' (actifs de première qualité et bien loués) bénéficient de l'engouement des investisseurs et voient ainsi leur valorisation repartir à la hausse. A l'inverse, les valorisations des bureaux 'non prime' risquent de poursuivre leur baisse avec la hausse de la vacance sur ce type d'actifs", anticipe Paul Reuge. D'autres gérants sont cependant moins positifs sur le secteur à moyen terme. "L'année 2010 sera une année de transition pour l'immobilier, car peu de sociétés enregistreront une croissance substantielle de leurs revenus locatifs et de leurs cash flows, affirme Christine Tricaud, gérante du fonds Foncier Investissement chez Natixis Asset Management. Les phases de baisse du marché seront néanmoins des opportunités pour investir, sachant que, dans mes choix d'investissement, je m'attache moins à la typologie des actifs qu'à la stratégie des foncières en termes de dynamique d'acquisition et de développement." A côté de l'immobilier de bureau, des gérants regardent aussi les centres commerciaux, notamment parce que ces actifs sont plus défensifs, en raison notamment de la visibilité sur les loyers grâce au baux commerciaux. Cependant, "la prime de risque des centres commerciaux est désormais inférieure à celle des bureaux", précise Acofi. L'immobilier résidentiel fait pour sa part l'objet d'un intérêt moins marqué, même si certains gérants entrevoient une évolution positive. C'est notamment le cas d'ING IM, qui privilégie notamment la région Ile-de-France et plutôt les appartements. UFG LFP est lui aussi positif : "Si les appartements anciens ont connu une légère baisse mensuelle, celle-ci s'inscrit dans un contexte de stabilisation des prix sur l'ensemble du territoire, voire de hausse à Paris. Cette résistance, à rebours de l'environnement économique, est soutenue par le maintien des taux d'emprunt à des niveaux inférieurs à 4 % et par la persistance de zones de pénurie de logements, en particulier en Ile-de-France. Dans le secteur du logement neuf, les mises en chantier semblent, pour le deuxième mois consécutif, s'inscrire sur une phase ascendante, les logements commencés sur le trimestre écoulé s'inscrivant en hausse de 2,7 %, et les logements autorisés en hausse de 6 %." Outre la typologie des actifs, les opportunités varient en fonction des zones géographiques. La majorité des gérants spécialisés privilégient surtout les actifs localisés en France, mais aussi en Europe : "A l'échelle européenne, c'est en France que le marché locatif devrait se redresser le plus rapidement, selon Invesco. Le marché allemand restera stable et offrira des opportunités grandissantes pour des acquisitions de biens de qualité." Quant aux marchés nordiques, ils ont bénéficié d'une amélioration relative des prix immobiliers et une performance solide est prévue, selon les perspectives d'Henderson Global Investors. L'Italie, les Pays-Bas, voire l'Europe de l'Est sont également évoqués au titre des zones porteuses. A l'inverse, l'Espagne et le Portugal sont majoritairement évités. Enfin, des gérants attachent une importance particulière à la prise en compte des normes haute qualité environnementale (HQE)" par les sociétés qu'ils sélectionnent. En la matière, "plusieurs foncières cotées sont en avance pour répondre à la demande des locataires et aux exigences réglementaires, affirme Christine Tricaud. La prochaine étape sera le référentiel HQE Exploitation, qui regarde notamment les dépenses énergétiques dans la phase occupée des immeubles, avec une nouvelle relation locataire-propriétaire et l'émergence du 'bail vert'". Certaines sociétés immobilières cotées ont d'ailleurs déjà mis en place une cartographie énergétique et une stratégie d'exploitation. Autant d'éléments qui pèseront de plus en plus sur le stock picking des gérants immobiliers. Floriane Tedoldi