Fonds monétaires : vers de nouveaux moteurs de performance

15/11/2010 - 10:16 - Option Finance

(AOF / Funds) - Si les OPCVM monétaires ont recueilli l'essentiel de la collecte en France au plus fort de la crise, ils affichent une décollecte depuis plusieurs mois. Ainsi, selon EuroPerformance, les encours dans la catégorie trésorerie régulière sont passés de 383,8 milliards d'euros fin décembre 2009 à 340,4 milliards d'euros à fin septembre 2010, soit une baisse d'environ 12 %. Cette décrue s'explique en grande partie par le niveau des taux d'intérêt. En effet, ceux-ci ont atteint des niveaux historiquement bas depuis de nombreux mois, conduisant à une baisse significative des rendements des fonds monétaires. Dans la catégorie des fonds de trésorerie régulière d'EuroPerformance, on peut constater que trois fonds seulement ont délivré une performance supérieure à 1 % depuis le début de l'année. On trouvera en tête du classement un fonds de Swiss Life Asset Management (SLAM), Money Market Euro, dont les performances ont été de 1,57 % depuis le début de l'année pour la part I et de 1,44 % pour la part P. Il est suivi par un fonds de Swiss Life Gestion Privée - SLGP Monétaire Sécurité -, dont la performance est de 1,08 %, puis par un fonds de Dexia Asset Management - Dexia Court Terme - affichant une performance de 1,06 %. Elles tombent ensuite à 0,88 % pour un fonds de Barclays Asset Management France - Barclays Institutions IB. Ensuite, les performances sont assez rapprochées, puisque l'on descend en dessous de la barre des 0,50 % après le fonds classé en 45e position. La moyenne de la catégorie sur la période étant de 0,25 %, à comparer à 0,33 % en moyenne sur un an, et surtout à 5,37 % en moyenne sur trois ans. Il faut noter que, dans ce cadre, les catégories monétaires d'EuroPerformance ne prennent pas en compte les nouvelles recommandations du CESR (voir encadré). Par conséquent, la première catégorie monétaire définie par EuroPerformance, à savoir la trésorerie régulière, regroupe les deux catégories du CESR monétaire court terme et monétaire, les fonds classés en monétaire dynamique et en monétaire dynamique plus n'entrent pas pour la plupart d'entre eux dans les nouvelles catégories monétaires qui seront en vigueur cet été. Si les encours ont globalement baissé, certains gestionnaires, qui ont réussi à maintenir un supplément de performance significatif vis-à-vis de l'Eonia et/ou dont les process sont reconnus comme étant très robustes, sont parvenus à drainer une collecte positive cette année. C'est le cas par exemple de SLAM, qui affiche une forte progression de ces encours en gestion monétaire depuis le début de l'année, la collecte nette sur ses deux fonds monétaires étant de 860,9 millions d'euros sur les neuf premiers mois de 2010. Plus récemment, au mois de septembre, selon Europerformance, les meilleures collectes dans cette catégorie ont été réalisées par la Banque Postale et le Groupe Covea. "Nous voyons à nouveau des flux importants sur la trésorerie depuis cet été", précise ainsi Clotilde Daignes, directeur des ventes à La Banque Postale Asset Management (LBPAM). Dexia Asset Management n'a également pas enregistré de désertion, contrairement à d'autres sociétés de gestion. Comment ces gérants sont-ils parvenus à faire un peu mieux que le marché et à recueillir l'assentiment des investisseurs ? En premier lieu, ils ont devancé la réglementation et ont adapté leurs gammes en fonction, mais aussi en fonction des nouvelles exigences des clients qui reposent avant tout sur la transparence. L'objectif affiché par les gérants est dans ce cadre de concevoir des gammes simples et lisibles. "Nous avons conçu une nouvelle gamme avec un fonds monétaire à très court terme, SLF (F) Cash Euro, et un autre fonds, SLF (F) Money Market Euro, qui correspond à la catégorie monétaire", indique Dimitri Andraos, responsable de la gestion de taux et crédit chez Swiss Life Asset Management (France). Idem pour HSBC Global Asset Management. "Nous avons repensé notre gamme en la simplifiant, précise Annie Divet, responsable du marketing chez HSBC Global Asset Management. Nous avons maintenant en ce qui concerne la trésorerie cyclique une gamme monétaire 0-12 mois qui se découpe en deux segments : une stratégie investie sur des titres gouvernementaux AAA et une stratégie investie sur les titres des entreprises qui bénéficient de la meilleure notation A1/P1." Dexia Asset Management (AM) a également repensé son offre. "Nous avons maintenant deux types de fonds : des fonds positionnés sur le monétaire court terme et des fonds monétaires classiques", précise Denis Vallier, responsable de la gestion monétaire chez Dexia AM. CPR Asset Management, filiale d'Amundi, a conçu également deux types de produits, un produit en cash à moins de trois mois et un produit correspondant à la classification monétaire : CPR Money Carry. Contrairement aux autres sociétés de gestion, LBPAM a conçu sa gamme en trois temps. "Nous avons maintenant un fonds de trésorerie au jour le jour, un fonds 3-6 mois et un fonds 6-12 mois", précise Clotilde Daignes. En matière de performance, les meilleurs gérants utilisent parfois les mêmes moteurs. "Nos performances s'expliquent par une gestion créative et par des procédures internes très strictes", précise Dimitri Andraos. Parmi les instruments utilisés pour dynamiser la performance, le gérant a fait appel aux obligations "puttable". "Les obligations 'puttable' peuvent avoir une échéance de deux ou trois ans et sont assorties d'options de vente tous les trois mois, poursuit Dimitri Andraos. En conséquence, elles versent un intérêt trimestriel et offrent la possibilité de les revendre tous les trois mois au pair. Si cette option n'est pas exercée, le titre bénéficie d'un rehaussement de coupon, qui est une prime de fidélité au porteur. Elles offrent ainsi un rendement supérieur aux instruments monétaires classiques tels que les titres de créance à court terme." Si ces titres sont en général émis par des émetteurs qui rencontrent des difficultés de financement, le gérant reste tout de même sélectif dans une optique de contrôle des risques. "Nous refusons actuellement d'acquérir certains titres, dont ceux émis par les émetteurs irlandais par exemple", poursuit Dimitri Andraos. Pour le fonds un peu plus long, les moteurs de performance peuvent être plus nombreux. "Si aujourd'hui le risque de crédit est bien rémunéré, ce n'est pas pour autant que nous souhaitons nous y exposer dans le cadre de nos fonds monétaires, explique Dimitri Andraos. Nous allons plutôt essayer d'arbitrer la courbe des taux. Nous mettons en place à ce titre une gestion active de la couverture de risque de taux, qui est porteuse de valeur ajoutée." Pour CPR AM, la performance provient d'un allongement des maturités, mais pas seulement. "Notre principal axe consiste à remonter les maturités, précise Julien Daire, responsable de la gestion taux chez CPR AM. Nous utilisons également les titres "puttable". Si Dexia AM a comme beaucoup de ses confères également utilisé des obligations "puttable", le gérant a opté pour créer de la valeur en utilisant des risques de crédit. "Nous avons mis l'accent sur les produits monétaires classiques qui nous laissent davantage de possibilités, indique Denis Vallier. A ce titre, nous pouvons nous positionner un peu plus loin en matière de maturité sur des titres à deux ans plutôt qu'à treize mois et nous pouvons ainsi nous exposer davantage sur ces fonds que sur les fonds cash en matière de risque de taux et de crédit." Une exposition au risque de crédit est également mise en oeuvre par LBPAM, notamment en ce qui concerne les émetteurs bancaires. "Il existe de gros écarts de rémunération actuellement entre les taux offerts par les banques, notamment en ce qui concerne certains émetteurs de la zone euro, précise Iain Bremner, directeur de la gestion crédit chez LBPAM. La hiérarchie entre les rémunérations est également assez forte dans les segments compris entre trois mois et deux ans. Plus globalement, nous mettons en oeuvre tous les moteurs de performance possibles, comme la gestion du risque de crédit." Pour d'autres, la rotation des portefeuilles peut également constituer un atout pour la performance. "Nous nous positionnons sur des maturités très courtes de façon à réinvestir rapidement ce qui nous permet de tirer profit de la volatilité de l'Eonia et de générer un surplus de performance", précise Annie Divet. En définitive, les gérants utilisent tous les moteurs de performance à leur disposition dans un contexte contraint par la réglementation. Certains moteurs de performance actuellement opérationnels ne pourront d'ailleurs plus l'être à partir de l'été prochain. "Les produits 'puttable' ne seront plus autorisés à partir de juillet 2011 si la maturité finale dépasse le cadre officiel, précise Denis Vallier. C'est ce qui ressort des dernières remarques publiées par les autorités de régulation." Par conséquent, "il va devenir de plus en plus difficile de se différencier", poursuit-il. Une tendance bien acceptée par les clients, selon les gérants. "Les clients veulent de la régularité, de la sécurité et de la transparence dans les produits composant les portefeuilles, ce qui doit peser sur la performance, selon Denis Vallier. Les investisseurs institutionnels et les trésoriers d'entreprise ont en effet appelé de leurs voeux cette réforme des fonds monétaires." Cela se traduit par une nette orientation des clients vers les fonds monétaires à court terme. "Les clients sont à la recherche de produits 'cash équivalent' pour la gestion de leur trésorerie, indique Alain Konrad, directeur du développement chez Swiss Life AM (France). Actuellement, la sécurité est plus importante dans ce cadre que la rémunération. Les trois quarts des flux que nous avons collectés s'orientent ainsi vers les fonds à court terme, même s'ils rapportent peu." Pour CPR AM et pour Dexia AM également les fonds les plus importants en matière d'encours sont ceux dont les échéances sont les plus courtes, car ils répondent à des besoins précis des trésoriers d'entreprise et de certains investisseurs institutionnels qui disposent d'une trésorerie très cyclique et qui doit donc être disponible sans risque. Mais il n'en demeure pas moins que certains investisseurs recherchent pour une partie peut-être beaucoup moins significative de leurs encours à court terme des produits affichant des rendements supérieurs. Une tendance dans laquelle nombre de gérants s'engouffrent. HSBC Global Asset Management, par exemple, propose une seconde gamme pour la trésorerie dite stable. "Nous proposons des fonds crédit investis sur les obligations un-trois ans qui permettent de générer davantage de performance pour les clients dont la trésorerie est stable au-delà d'un délais d'un an, indique Annie Divet. Nous proposons également dans la même optique des fonds de gestion alternative à faible volatilité reposant sur des stratégies obligataires de valeur relative." Beaucoup de gestionnaires ont ainsi dans leur gamme des fonds obligataires court terme : c'est le cas par exemple de CPR AM, qui vient de lancer un fonds obligations douze mois. D'autres proposent des fonds d'arbitrage assez proches des fonds de gestion alternative. Ils correspondent à l'ancienne catégorie monétaire dynamique. Une catégorie d'ailleurs supprimée par l'Autorité des marchés financiers (AMF). S'ils peuvent présenter un intérêt certain pour les clients dont l'horizon de placement est un peu plus long, ils peuvent être parfois aussi plus risqués, et cela d'autant plus s'ils font appel à des produits structurés ou à des produits complexes. Dans cette perspective, l'Autorité des marchés financiers a lancé récemment un avertisseme