Les excès de liquidité, plus que les anticipations, boosteront l'inflation

19/11/2010 - 10:13 - Option Finance

(AOF / Funds) - "La question est de savoir quel impact le nouveau programme d'achats d'obligations souveraines par la Fed aura sur la courbe des taux américaine. Pour y répondre, il faut explorer deux pistes : y a-t-il, dans ces achats, volonté de manipuler les rendements le long de la courbe ? Dans quel sens ce QE2 peut-il modifier les anticipations ?", note Natixis. Le gestionnaire estime que les excès de liquidité, davantage que la tentative de jouer sur les anticipations du marché via les points morts, auront un effet "réflationniste". "Le 3 novembre, la Fed de New York publiait la répartition prévue des achats de T-notes selon les maturités et le type de coupons. Quelques jours plus tard, elle détaillait la première tranche du QE2, qui a démarré le 12 novembre : entre cette date et mi-décembre, elle va acheter environ 75 milliards de dollars de papiers dans le cadre strict du programme, et 30 milliards de dollars supplémentaires au titre des réinvestissements des dettes et des MBS arrivant à maturité." "La ventilation de cette première partie par tranches de maturités est cohérente avec celle du programme global annoncé le 3 novembre. On observe par ailleurs que les TIPS représenteront 2,9% des achats de la première tranche, ce qui là encore est cohérent avec le montant prévu pour le programme total." "Pour voir s'il y a volonté de manipulation des rendements obligataires, il faut comparer ce QE2 à la répartition actuelle de l'encours de dette moyen/long terme US. La comparaison de ces graphiques montre que le pourcentage des obligations achetées dont la maturité est proche de 10 ans dépasse l'encours de ces obligations dans la dette. A contrario, il n'y a pas volonté de manipuler les rendements très longs, puisque les achats compris dans le bucket 2028-2040 représentent 3,7% des achats totaux, alors que l'encours de ce bucket est de 7,8%." "S'agissant des linkers, la Fed ne cherche pas non plus à pousser artificiellement les B/E vers le haut, puisque les TIPS ne représentent que 3% des achats et plus de 8% de la dette moyen/long terme. Bien sûr, si la Fed veut aplatir la courbe des B/E, elle peut concentrer ses achats de TIPS sur la partie courte de la courbe. Mais au total, ce qui précède suggère que la Fed ne chercherait éventuellement qu'à contrôler le benchmark à 10 ans (sans grand succès pour l'instant, puisque depuis l'annonce officielle du QE2, le rendement du T-note 10 ans a augmenté de 30pb)." "La deuxième question concerne la capacité du QE2 à modifier les anticipations. Sa vocation, en principe, est de stimuler les anticipations inflationnistes tout en maintenant les taux longs aussi bas que possible. Plus précisément, la Fed souhaite stimuler les anticipations inflationnistes à court terme, sans toucher aux anticipations inflationnistes de long terme. Autrement dit, elle voudrait aplatir la courbe des points morts d'inflation, faire croire au marché qu'elle maîtrise complètement cet instrument et ses conséquences supposées sur l'inflation et les anticipations inflationnistes." "Or il est peu probable que les marchés se laissent convaincre : à court terme, le risque de voir l'inflation s'envoler est extraordinairement faible, compte tenu de la baisse, en glissement annuel, des coûts unitaires du travail, du désendettement, des capacités de production en excès et du niveau du taux de chômage. L'inflation sous-jacente est d'ailleurs tombée à un nouveau plus bas historique en octobre, à 0,6%." "En revanche, à long terme, les excès de liquidité pourraient s'avérer inflationnistes, et leur effet pourrait s'ajouter à une possible hausse du prix des matières premières et/ou de l'inflation importée, via une baisse du dollar et une hausse des prix dans les pays émergents. Depuis l'annonce officielle du QE2, la pente de la courbe des points morts d'inflation, mesurée par le spread entre le B/E 10 ans et le B/E 2 ans, a augmenté de 20pb. Or une hausse des B/E longs devrait pousser les taux longs vers le haut (sauf baisse symétrique, improbable, des taux réels)." AUT/ALO