Taux : réélargissement des spreads à attendre en zone euro

23/11/2010 - 10:14 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Dans un premier temps, l'annonce du bailout de l'Irlande a eu un impact favorable sur les marchés", juge René Defossez, de Natixis, rappelant que, lundi matin, "il avait provoqué une contraction des spreads intra-UEM et une hausse de l'euro-dollar (qui avait en fait démarré en Asie)". "Puis le décor changea progressivement. La journée se termina avec un nouvel élargissement des spreads contre Bund : le spread IGB-Bund 10 ans s'affichait à 544pb en soirée, le spread PGB-Bund à 405, et le spread GGB-Bund repassait au-dessus de 900pb (915pb précisément)." "Ce résultat décevant peut s'expliquer de différentes manières. La plus évidente, c'est que cet accord était inévitable, (et) ne fut donc pas une surprise : l'Irlande ne pouvait plus guère prétendre régler son problème bancaire seul, et l'Europe ne pouvait pas se permettre le luxe d'une nouvelle crise budgétaire majeure." "Les banques allemandes en particulier détiennent beaucoup de dette irlandaise, mais aussi grecque, portugaise et espagnole. La deuxième raison vient des commentaires de Moody's, qui déclara qu'une baisse de la notation de l'Irlande de plusieurs niveaux était le scénario le plus probable parce que cette aide allait accroître le poids de la dette du pays. La troisième raison est la proximité des élections (janvier), à un moment où le gouvernement est au plus bas dans les sondages. La tutelle de l'Union Européenne et/ou du FMI est très mal perçue par la population." "La quatrième raison est que ce plan de sauvetage sera associé à de nouvelles mesures d'austérité budgétaire, alors que le pays connaît une de ses plus sévères récessions de son histoire (...) le PIB réel est à son niveau de 2005, tandis que le taux de chômage flirte avec les 14%. La cinquième raison est que, loin d'avoir calmé les esprits, le bailout de l'Irlande a provoqué une envolée des CDS du Portugal (de 421 à 470pb pour les CDS 5 ans)." "Le marché ne se dit pas : on a éteint un incendie local qui menaçait de se propager à d'autres pays, mais (se demande) who's next. Et le Portugal est bien sûr en position assez inconfortable, en raison de ses piètres performances en matière de réduction du déficit budgétaire." "En fait, le problème est relativement clair : la zone euro navigue à vue, et répond au coup par coup aux problèmes qui apparaissent. Compte tenu de la situation, d'autres problèmes vont forcément survenir dans le futur. Et l'on arrive à la sixième raison qui est que si le programme mis en place en mai dernier et qui s'articule autour de l'EFSF est suffisant pour venir en aide aux plus petits pays de la zone, il sera sûrement insuffisant en cas de problème majeur dans un pays plus grand." "Le problème, dit autrement, est celui de la gouvernance de la zone euro. Les propositions récentes d'Angela Merkel au sujet de la participation du bondholder à un éventuel bailout ont au moins eu le mérite de relancer le débat sur cette gouvernance défaillante. Rappelons que pour le président de l'UE, l'euro est en train de traverser une crise de survie ! D'autres, avec plus de nuances, ont exprimé le même sentiment. Aujourd'hui, la seule solution envisagée à la crise est la réduction drastique des déficits publics (plusieurs points de croissance en moins par an), l'espoir d'une stabilisation prochaine et à des niveaux supportables des ratios dette/PIB, l'espoir d'un retour de la croissance (mais comment fait-on quand on coupe à la serpe les dépenses publiques). Inutile de dire que le risque d'être déçu est grand." AUT/ALO