Dette européenne : des vagues de tension et de crise à prévoir en 2011

23/12/2010 - 17:21 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Un nouveau chapitre de la crise souveraine vient de s'ouvrir et le sentiment général est celui d'un retour du passé, même si la situation n'est pas comparable à la crise grecque du mois de mai. La crise souveraine de la zone euro semble suivre la voie de la débâcle de Lehman Brothers : un lent et inexorable glissement vers une issue catastrophique que les responsables politiques ont semblé impuissants à empêcher", note Dexia AM. "Depuis le début de la crise, les responsables politiques ont augmenté leurs injections de liquidités qui ne font que traiter un symptôme de la crise actuelle, alors qu'ils devraient s'attacher à apaiser les inquiétudes sur le risque systémique, la résolution des problèmes de risque souverain en Europe ayant de nouveau été différée. Si les mesures prises peuvent, à court terme, être un soutien aux prix des actifs, le report ci-dessus évoqué n'équivaut pas à une solution et il ne doit pas être confondu avec une perspective positive à plus long terme." "La racine du mal provient d'un défaut de conception originel de la zone euro, créée avec une monnaie unique mais sans le niveau d'intégration fiscale et politique indispensable à sa stabilité macro-économique. La distinction entre liquidité et solvabilité et entre dette bancaire et dette gouvernementale devient de plus en plus difficile à établir. Les inquiétudes sur le risque de crédit ont tendance à s'auto-alimenter." "L'année 2011 va être difficile : certains pays de la périphérie vont devoir refinancer une grande partie de leur dette existante et les coûts du recours à l'emprunt continuent de progresser. Une solution à la crise doit venir du niveau politique. En outre, les assurances données par les leaders européens sont sans valeur si leurs électeurs décident de les désavouer et de soutenir des politiques alternatives." "La crise irlandaise a provoqué une réévaluation du risque financier et souverain au cours de ces dernières semaines, largement dû à la prise de conscience du fait que la zone euro ouvre la voie à une future restructuration de la dette souveraine de sa périphérie. Même si le remaniement du mécanisme de sauvetage financier peut être interprété positivement, une recrudescence du sentiment d'incertitude est à l'oeuvre. De fait, les investisseurs sont perplexes." "Les marchés financiers ne sont pas convaincus pas que les dispositifs de sauvetage financiers parrainés par l'Union européenne et le FMI seront suffisants pour remédier au risque de solvabilité qui contamine l'Europe périphérique. Un nouveau mécanisme de stabilisation européen (ESM) va remplacer le Fonds européen de stabilisation financière (EFSF) à partir de juillet 2013. Plus l'ESM sera flexible et réaliste, moins la zone euro sera vulnérable." "Il existe un consensus sur le fait que les ressources de l'ESM devront être supérieures aux 440 milliards d'euros de l'EFSF. S'il est dit qu'une restructuration de la dette n'interviendra qu'en des circonstances exceptionnelles, le dogme (de) pas de restructuration de la dette souveraine est désormais enterré, mais uniquement dans le but de maintenir la crédibilité du principe plus fondamental (de) pas de défaut souverain. C'est un important pas en avant et une bonne nouvelle." "L'Europe continue à faire une fixation sur l'idée des pays les plus robustes consentant des lignes de crédit toujours plus importantes aux pays plus faibles, bien qu'à un coût croissant. Comme il ne s'agit que d'une solution provisoire, les investisseurs ne sont plus impressionnés. L'utilisation de l'EFSF a échoué à calmer les esprits, tout simplement parce que les maillons les plus faibles de l'Europe sont confrontés davantage à une crise de solvabilité que de liquidité. Ce que le marché souhaite est, soit une réduction de la dette, soit une augmentation de capital sans endettement." "Si l'austérité budgétaire est nécessaire pour restaurer la confiance et garder le gonflement de la dette sous contrôle, elle ne devrait pas être considérée comme le seul outil disponible. Un affaiblissement des devises ou une amélioration de la compétitivité est indispensable pour redynamiser la croissance nominale. Sans une dévaluation sensible de l'euro pour stimuler la croissance et reflater les revenus nominaux, les programmes d'austérité ne pourront que freiner la croissance, peser à la baisse sur les prix et détériorer l'arithmétique de la dette dans l'Europe périphérique." "Alors que les marchés financiers se sont uniquement focalisés sur l'assouplissement complémentaire opéré par la Réserve fédérale, ils ont quelque peu sous-estimé le risque découlant des ajustements de la politique monétaire chinoise. La PBOC est engagée dans une politique de resserrement. Le mois dernier, nous avons signalé le problème de l'inflation en Asie et le mauvais coté des mesures d'assouplissement quantitatif (QE2). La Chine a augmenté le ratio des réserves obligatoires imposées à toutes les banques, dans un effort pour contenir les conséquences sur son économie de l'afflux de hot money." "Il n'est pas excessif de parler de lutte permanente sans merci entre les responsables politiques et l'économie en général. Jusqu'à présent, la crise de la dette périphérique n'a infligé que des dommages limités à l'économie mondiale. Si nous mettions de côté les difficultés des États périphériques, on trouverait un noyau dur étonnamment résistant connaissant une reprise plus forte que prévue paraissant même, disons le, pérenne." "Alors que la phase initiale de la reprise allemande était principalement liée à une forte croissance des exportations, spécialement vers le monde émergent, le caractère durable de la reprise est dû à la hausse de la demande intérieure finale du fait que l'évolution vers un renforcement du secteur des services sous-tend une croissance plus équilibrée. Les impressionnantes statistiques du sentiment des affaires en Allemagne publiées récemment soulignent la reprise de la consommation, en cours dans ce pays." "L'amélioration du marché du travail est un facteur de soutien de la consommation, une tendance qui devrait se poursuivre du fait que les consommateurs reprennent confiance avec une intensité jamais constatée au cours de ces trois dernières années. Aux États-Unis, la crainte de la déflation a nettement reculé. Le bouleversement subi par la zone euro approche de son paroxysme, situation souvent susceptible de provoquer un changement indispensable de politique. Ces périodes sont toujours dangereuses mais sont aussi le point auquel une crise tend vers son intensité maximale et où le désespoir peut se transformer en opportunité." "La tension régulière et permanente entre la vision bottom-up et le risque souverain semble devenue la norme. Des réformes plus structurelles seront nécessaires pour résoudre le problème souverain. Jusqu'à ce que la stabilité financière de la zone euro soit pleinement assurée, des vagues périodiques de tension et de crises constitueront des sources de difficultés majeures pour l'affirmation de la tendance positive des indices actions." "Nous pourrions avoir à subir une autre étape de réévaluation du risque souverain avant de pouvoir évoluer vers une plus grande confiance. En 2011, le marché va hésiter entre le scepticisme sur l'efficacité du QE2, la réponse politique de l'Europe et l'euphorie liée à la croissance alimentée par le boom des marchés émergents." AUT/ALO