Philippe d'Arvisenet plaide pour un plus grand fédéralisme en zone euro : chapitre 2

11/01/2011 - 19:13 - Sicavonline

Philippe d'Arvisenet, Directeur des études économiques de BNP Paribas, estime que l'éclatement de la zone euro est un scénario très peu probable. Toutefois, il considère que la surveillance multilatérale doit être renforcée afin de garantir la stabilité de l'union monétaire. Dans ce deuxième volet, Philippe d'Arvisenet expose plusieurs pistes possibles.

L'éclatement de la zone euro : un scénario impossible

« Les marchés s'interrogent sur l'éventualité d'une sortie de l'euro par tel ou tel pays de la périphérie, ou d'un euro à deux vitesses », remarque Philippe d'Arvisenet, Directeur des études économiques de BNP Paribas . « La perspective d'un « exit » aurait pour conséquence d'abord un inévitable phénomène de contagion, ensuite, le sortant serait exclu de l'accès au marché, une issue préoccupante pour les pays connaissant un déficit externe qu'ils ne pourraient couvrir. Leur ajustement serait immédiat et bien plus douloureux que la poursuite d'un plan de consolidation mené sur plusieurs années. Enfin, la valeur en monnaie locale de la dette en euro s'envolerait. Cette perspective est difficilement envisageable quand on sait que la dette souveraine des quatre pays de la périphérie est détenue à 75% par des non-résidents, pour les deux tiers dans la zone euro. Les effets sur les créanciers seraient tels que les Etats devraient intervenir, une issue bien peu attrayante, compte tenu de la situation des finances publiques. »

Pour une meilleure surveillance multilatérale

Philippe d'Arvisenet considère toutefois que « le Pacte de stabilité doit être révisé, sa gouvernance a failli. L'idéal serait, dans l'optique des premières propositions de la Commission, de mettre en œuvre un processus de surveillance multilatérale (les projets de budgets étant soumis à la Commission) s'appuyant sur l'expertise d'une entité indépendante pourvue de pouvoirs d'investigation accrus et de sanctions automatiques (un vote à majorité qualifiée étant nécessaire pour interrompre les sanctions), ce qui a été pour l'heure refusé par certains pays. A cela devra s'ajouter un processus de sanctions déclenché par le non-respect des engagements de réforme en matière de correction des déséquilibres macroéconomiques (compétitivité, endettement privé excessif...). Certains émettent des objections soulignant la perte de souveraineté, en fait au-delà des contraintes souhaitables en matière de solde budgétaire, rien ne s'impose sur le plan de la taille des budgets ou de la structure des recettes et des dépenses. »

L'option de « l'Eurobond »

« Sans doute faudra-t-il faire de nouveaux progrès sur le chemin de la solidarité, c'est-à-dire du fédéralisme budgétaire. Mettre sur pied une amorce de budget fédéral en réponse à des considérations macroéconomiques paraît hors de portée, la légitimité politique n'y est pas. Ce qui est vraisemblable est la poursuite de l'injection de fédéralisme « by stealth ». L'idée d'un « European Bond » défendue par le Premier ministre luxembourgeois et le ministre des Finances italien et qui a suscité l'intérêt de la Commission, comme de la BCE, va dans ce sens. Elle se heurte, pour l'heure, à l'opposition de l'Allemagne et de la France, mais le dialogue n'a pas été fermé. Une agence de la dette européenne pourrait émettre un bond jusqu'à hauteur de 40 points de PIB des pays membres, avec un statut préférentiel pour les créanciers. Un marché de dette de taille comparable à celui des Treasuries américain verrait le jour, par sa liquidité et avec la garantie de 16 Etats, il ne manquerait pas d'attrait. » « L'introduction pourrait être progressive en commençant, par exemple, par des bons à court terme. Bien sûr, les taux d'intérêt auxquels font face les pays les plus vertueux pourraient remonter quelque peu, et certains ne manquent pas de mettre en avant le risque de comportements de passager clandestin, le dispositif pouvant inciter à moins de vertu dans la conduite des politiques budgétaires. Il reste que la partie de la dette non financée par l'European bond subirait l'effet disciplinant des conditions de marché dont l'expérience a bien prouvé qu'elles étaient nettement plus efficaces que les dispositifs politiques. Un tel dispositif présente une différence de taille avec l'EFSF ou l'ERM, car il participerait au financement normal de la zone et non pas appelé à être activé pour le soutien de pays en difficulté.

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