Spectre de la déflation suivie d'une inflation forte (Natixis)

24/01/2011 - 09:47 - Option Finance

(AOF / Funds) - "On observe un peu partout, simultanément, une hausse des points morts d'inflation à long terme et un aplatissement des courbes de points morts d'inflation. Autrement dit, les B/E courts augmentent plus vite que les B/E longs. Ce phénomène s'observe également sur les courbes de swap inflation. Comment doit-on interpréter ces évolutions ? La première explication pourrait être la suivante : la structure de la courbe des points morts d'inflation, en s'aplatissant, se normalise, ce qui signifie que les marchés anticipent une inflation à peu près stable quel que soit l'horizon considéré." "Cela suppose, selon Natixis, que la crédibilité anti-inflationniste des banques centrales (en particulier de la BCE) n'a pas été affectée par la mise en place de politiques monétaires non conventionnelles." "Cette idée serait assez bien validée par le fait qu'il y a, a priori, une corrélation positive entre pente de la courbe des points morts d'inflation et aventurisme monétaire. Ainsi, aux Etats-Unis où la Fed est souvent accusée de jouer aux apprentis-sorciers, la pente de la courbe des points morts d'inflation demeure plus forte (en dépit, d'ailleurs, de la volonté de la Fed de manipuler les anticipations avec sa politique de quantitative easing). Si une banque centrale est crédible, les anticipations inflationnistes sont stables, c'est-à-dire égales quelle que soit la maturité considérée." "Avant la crise, les banques centrales étaient réputées crédibles et les pentes des courbes de points morts d'inflation (reflétaient l'idée que) l'inflation future ne va effectivement pas augmenter. Or sur un horizon de long terme, cela est loin d'être certain. Si on a une conjonction des événements suivants : fermeture des outputs gaps dans les grands pays de l'OCDE ; maintien d'une croissance solide et intense en matières premières (énergétiques notamment) dans les pays émergents ; liquidités encore abondantes (car il est plus difficile de les retirer que de les injecter), et donc formation de bulles, notamment dans les marchés de matières premières ; alors l'inflation de demain pourrait être sensiblement plus élevée que celle d'aujourd'hui." "La seconde explication est nettement moins favorable : il y a, en ce moment, une hausse rapide du prix du brut, à laquelle s'ajoute celle du prix de nombreuses autres matières premières. Ainsi, le prix du charbon cokéfiable a retrouvé ses niveaux de 2008 en raison des inondations dans le Queensland, en Australie, et devrait rester élevé au minimum pendant plusieurs mois (stocks faibles en Chine, mines inondées en Australie). Un choc inflationniste de ce type profite toujours prioritairement aux obligations indexées courtes, en raison de la sensibilité plus forte de leur carry au portage." "Dans le cas du pétrole, la hausse est totalement imputable à la spéculation, ce que montrent les positions ouvertes comparées aux capacités de production excédentaires (toutes les deux à des niveaux record). Il est difficile de prévoir le comportement futur du prix du brut, puisque sa hausse s'explique en grande partie par la spéculation. Il est néanmoins raisonnable de penser qu'il devrait tôt ou tard rebaisser. En effet, la hausse du prix du pétrole est destructrice de demande (elle agit comme une taxe sur la consommation), est donc susceptible de peser sur l'activité, partant de s'avérer autorégulatrice." "Si ce scénario se réalise, c'est à nouveau le spectre de la déflation qui se profilera à court terme, sans atténuer le risque d'inflation à long terme lié aux facteurs évoqués plus haut. Et si l'on croît à ce scénario, on peut difficilement penser que les pentes des courbes de points morts d'inflation resteront durablement nulles ou presque. Nous avons tendance à penser qu'à court terme, ces pentes continueront de baisser (illusion d'une croissance forte, prix des matières premières élevés), mais qu'elles se redresseront au premier signe important de retournement conjoncturel." AUT/ALO