Perspectives assombries pour les actions à court terme (Dexia AM)

24/01/2011 - 16:24 - Option Finance

(AOF / Funds) - "L'événement d'importance le plus récent a été la forte hausse des rendements obligataires à long terme. Aussi longtemps que les rendements à 10 ans demeurent inférieurs au taux de croissance nominale, il n'y a pas réellement de problème et le moyen le plus rapide de trouver une solution est de tenter de maintenir les rendements bien en-deçà de la croissance nominale. Il est réellement important de comprendre et d'interpréter cette hausse", écrit dans sa note mensuelle Frédéric Buzaré, responsable de la gestion actions de Dexia AM. "Les taux d'intérêt augmentent parce que les investisseurs ont moins peur d'une déflation ou parce que les prévisions de croissance du PIB pour 2011 sont revues à la hausse. Le paquet fiscal pourrait offrir un coup de pouce aux estimations du PIB en 2011 pouvant aller jusqu'à 0,5% grâce, presque intégralement, à une augmentation de la consommation." "Toutefois, la hausse des prix de l'énergie et la récente poussée des taux d'intérêt pourraient déjà être en train de neutraliser une certaine partie de l'impact positif sur la croissance de ce nouveau paquet fiscal. De plus, la plupart des révisions à la hausse pour 2011 sont artificielles en ce sens où elles sont dues à des réductions d'impôts pour les contribuables et au prolongement des allocations pour les chômeurs qui, tôt ou tard, vont bien devoir être financées." "Le principal défi de ce monde d'après 2008 est celui de la stabilité ou de la durabilité. La dernière crise a éclaté parce que la croissance était entretenue au détriment de la stabilité. L'objectif de la Réserve fédérale, voire de toute banque centrale, devrait être une croissance durable et non la baisse des taux d'intérêt en tant que tel. Le maintien prolongé de politiques monétaires extrêmement accommodantes en Amérique et en Europe va certes stimuler la croissance de l'économie mondiale, mais au prix d'une instabilité financière de plus en plus importante et de conséquences non voulues à l'avenir." "Dans la mesure où les politiques monétaires divergent de par le monde (accommodante aux États-Unis, restrictive en Chine), les conséquences imprévues vont se faire ressentir sur les marchés. Les États-Unis devraient avoir une politique monétaire laxiste accompagnée d'une politique budgétaire rigoureuse. Dans le même temps, la Chine se doit d'accepter la tendance persistante de son inflation à s'accélérer, tout comme la propension de son économie à surchauffer et le caractère abusivement élevé de son excédent commercial. Et ne pas vouloir accorder un rôle plus important au taux de change via l'appréciation du yuan afin d'y remédier menace l'économie intérieure d'un atterrissage brutal, la dernière des choses dont le monde a besoin en ce moment." "En dépit de certains progrès, la situation dans la zone euro n'est pas pour autant encore réglée. Il s'agit là d'une crise budgétaire qui devrait être résolue par les autorités budgétaires et non par la Banque centrale européenne (BCE), laquelle ne peut apporter qu'une solution temporaire en cas d'échec des marchés. Une solution budgétaire comporte deux aspects : la consolidation budgétaire dans les pays périphériques et un soutien à la liquidité apporté par la mise en commun de moyens budgétaires." "Même si la BCE procède également à un programme d'achat d'actifs, la situation dans la zone euro et aux États-Unis est différente. Tandis que la seconde vague d'assouplissement quantitatif (QE2) outre-Atlantique est supposée offrir un soutien monétaire à un environnement dans lequel le taux d'intérêt nominal est proche de zéro, les achats d'emprunts d'État dans la zone euro aident les pays confrontés à des problèmes de solvabilité. Une longue période de soutien à la liquidité à un coût d'emprunt subventionné est nécessaire, tandis que les économies périphériques se doivent de mettre en oeuvre des réformes structurelles et une consolidation budgétaire de grande ampleur." "La principale source d'appréciation des actions reste l'augmentation des multiples de valorisation grâce à une moindre prime de risque. Et cela dépend en grande partie de la faiblesse prolongée des taux d'intérêt et de la volonté durable des responsables politiques de relancer l'économie. Compte tenu de l'importance grandissante de la politique, une certaine volatilité est ainsi probable. Les perspectives sur le front politique demeurent extrêmement importantes pour 2011. Avec une Réserve fédérale surveillée de plus en plus étroitement et un gouvernement divisé à Washington, l'incertitude politique est grande. Cela implique également un plus grand risque d'erreurs de prévisions. Si on leur avait demandé l'an passé, peu de personnes auraient prévu le QE2." "La crise dans la zone euro est gérable si elle est circonscrite au Portugal, à l'Irlande et à la Grèce. Mais, l'appétit pour le risque serait mis à mal si la crise devait également gagner l'Espagne. Les perspectives à moyen terme sont toujours plutôt positives pour les actions, mais certains nuages assombrissent le paysage à court terme. Tout comme en 2010, les marchés d'actions vont faire preuve d'instabilité en 2011, impliquant ainsi que les cours pourraient enregistrer d'importantes progressions suivies de corrections intermittentes et sévères." "La reprise économique mondiale a atteint un stade où les heurts entre diverses forces économiques s'intensifient. Paradoxalement, une croissance vigoureuse ne représente pas le meilleur environnement pour les marchés d'actions dans la mesure où elle pourrait conduire à une hausse de l'inflation et des taux d'intérêt qui ferait avorter la reprise et réduirait à néant l'appréciation des marchés." "Dans l'esprit des investisseurs, la récession en double creux ne constitue plus le principal risque. Au niveau mondial, la reprise économique continue de se renforcer, mais des divergences régionales subsistent. Tout n'est pas si noir dans la zone euro. L'un des indices relatifs à l'activité manufacturière dans la zone euro a progressé de 55,3 à 57,1 en novembre. Alors que l'Allemagne continue de prospérer, quelques signes semblent indiquer que certains des pays plus fragiles de la région commencent à participer à la croissance de l'activité manufacturière. Des pays fragilisés tels que l'Irlande et l'Espagne ont connu une amélioration en décembre et s'établissent au-dessus du seuil de 50. L'indice PMI manufacturier en Italie est passé de 52,9 à 54,7." "Le consensus est plutôt bien orienté en ce sens où 2011 va être la continuation de ce qui s'est passé en 2010. Il pourrait être trop simpliste de présupposer une pure réédition. La spécificité probable de 2011 va prendre la forme de la poursuite de la plupart des tendances de 2010 : les marchés vont demeurer volatils et agités, mais de nouvelles tendances vont également faire leur apparition. Comme en 2009, à la fin de l'année 2010 un certain pessimisme à l'égard d'une reprise prolongée des pays développés reste élevé. La différence de croissance entre les pays développés et émergents va persister, mais elle ne sera pas nécessairement suffisamment grande en 2011 pour se traduire par des performances aussi extraordinaires qu'en 2010." "Dans ce monde post-bulle, nous avons malheureusement à vivre avec l'instabilité et des investisseurs passant d'un extrême à l'autre. Après un environnement de névrose déflationniste au troisième trimestre 2010, les marchés intègrent désormais la possibilité d'une accélération de l'inflation et d'un regain de vigueur de la reprise économique. L'épreuve de force entre croissance et stabilité va constituer le principal trait distinctif des prochaines années. L'oscillation entre l'un et l'autre de ces deux aspects va déterminer l'orientation des marchés et les divergences entre les régions, styles et secteurs." "La question de la dette souveraine en Europe demeure une vive source de préoccupation dans la mesure où elle n'est pas encore convenablement résolue, mais elle ne devrait néanmoins plus être à l'origine de considérables surprises. La confiance est excessive dans la capacité des pays émergents à gérer le dilemme entre croissance et inflation. Une fois encore, le QE2 exacerbe le problème de l'inflation dans les pays émergents et les banques centrales asiatiques se montrent plutôt lentes à réagir." "En résumé, la situation pourrait évoluer soit en faveur d'un nouveau contexte idéal (sweet spot) pour les marchés d'actions, soit d'une certaine réédition des années 2007-2008 si la flambée des prix des matières premières devait prendre une ampleur accrue. Le premier semestre de cette année pourrait se révéler agité avant un meilleur second semestre. Il reste encore à voir si, dans les semaines qui viennent, les marchés ne vont pas découvrir le revers de la médaille d'une économie américaine en meilleure santé que prévu. Des surprises sont certainement à prévoir. Prendront-elles la forme de nouvelles positives sur le front de la reprise de la zone euro ou d'une erreur de politique en Chine ?" AUT/ALO