Japon : accroître l'exposition au marché dans prochains mois (Axa IM)

16/06/2011 - 15:50 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Trois mois après le terrible tremblement de terre du 11 mars qui a ravagé le nord-est de l'Archipel, le Japon commence à panser ses plaies. Une reprise en V dans les prochains mois ne fait guère de doutes, mais les conséquences de la catastrophe, qu'elles soient industrielles ou politiques, font craindre des délais dans le courant de l'été", notent Hervé Lievore et Franz Wenzel d'Axa IM. "Les comptes nationaux du 1T ont jeté une lumière crue sur l'impact économique du séisme. Le PIB a reculé sur le trimestre de 0,9% alors même qu'un redressement rapide se dessinait en janvier et février. Fort logiquement, les stocks ont été fortement réduits et la consommation des ménages a connu un arrêt brutal." "Les indicateurs conjoncturels confirment tous que le point bas a été atteint en avril et que la reprise s'est amorcée dès mai. L'amélioration est très sensible dans l'industrie, avec un indice PMI qui est repassé au-dessus des 50 points pour le mois de mai et les prévisions du ministère de l'industrie laissent espérer le prolongement de la reprise au moins jusqu'en juin, avec des taux de croissance mensuels élevés (8% en mai et 7,7% en juin). Toujours du côté de l'offre, les services ont eux rebondi dès avril, corrigeant de 40% le recul observé entre février et mars." "A court terme, le rebond de l'activité repose évidemment sur la reprise de la production dans les secteurs ayant le plus souffert du séisme. La reconstitution des stocks va également jouer un rôle crucial car ces derniers, déjà fortement réduits au sortir de la crise financière, ont probablement été ramenés à des niveaux inférieurs aux objectifs des entreprises suite au tremblement de terre." "Du côté de la demande, la baisse d'activité des entreprises s'est traduite par une perte de 600.000 emplois entre février et avril. Un tel plongeon en l'espace de deux mois ne s'était plus vu depuis le premier choc pétrolier en 1974. La situation de l'emploi a, dans un premier temps, focalisé toutes les craintes des ménages nippons mais la menace la plus sérieuse sur le moral des Japonais semble davantage concentrée sur la progression des revenus à moyen-long terme." "Le tremblement de terre a en effet lourdement pesé sur les résultats des sociétés et, dans ce contexte, il est difficile d'anticiper une progression des bonus versés aux salariés dans les prochains mois. Ceci étant, la contraction de la masse salariale, liée à un choc ponctuel, ne saurait être que transitoire. La reprise de l'activité s'accompagnera d'une hausse de l'emploi et, donc, d'un soutien plus fort à la consommation. On peut également anticiper une ré-accélération de la consommation privée en prévision d'une possible, sinon probable, hausse de la TVA en 2013 et de l'impôt sur le revenu en 2012." "Il y a de grandes chances de voir se répéter un scénario semblable à celui de fin 1996-début 1997. A l'époque, la décision du gouvernement Hashimoto de relever la TVA de 3% à 5%, avait provoqué une forte accélération de la consommation privée juste avant la hausse, suivie par une profonde déprime dans les deux trimestres suivants. Il nous semble donc que la consommation privée restera encore hésitante au 2T mais qu'elle retrouvera un rôle moteur ultérieurement, notamment en fin d'année/début d'année prochaine. Les immatriculations de véhicules en avril et en mai ont été en ligne avec ce scénario, révélant un certain attentisme en dépit du redressement de l'activité." "La période estivale, qui correspond au pic de demande d'électricité, soulève de plus en plus d'inquiétude. Les conséquences du tremblement de terre se font sentir non seulement dans les régions dévastées, mais également dans le reste du pays. Nombre d'entreprises ont en effet déplacé leur production vers l'ouest du pays, ce qui conduit à une demande durablement supérieure à la normale." "Dans le même temps, les centrales nucléaires arrêtées pour maintenance ne sont pas remises en service. A mi-juin, 37 réacteurs sur 54 (soit 14% des capacités totales de production d'électricité) étaient dans cette situation, avec potentiellement quatre réacteurs supplémentaires à l'arrêt d'ici début juillet. Les risques de pénuries sont donc bien réels, et pas seulement dans la région de Tokyo." "Nous avions estimé début avril l'élasticité du PIB à la production d'électricité à environ 0,2, et avions conclu à une réduction de 0,2 à 0,4 point de pourcentage de la croissance au 3T, sur la base d'une production insuffisante uniquement pour Tepco. En tenant compte des arrêts de centrales nucléaires sur l'ensemble du territoire, l'impact pourrait aller jusqu'à 0,6 point de pourcentage dans le pire des cas." "Outre le risque de pénurie d'électricité, l'ampleur et les modalités du programme gouvernemental de reconstruction des zones dévastées vont également influencer la reprise. Un premier budget complémentaire a été adopté en mai, représentant 0,9% du PIB. Le financement de ce plan se fera entièrement par réallocation ou réduction de dépenses déjà programmées, afin de ne pas courir le risque d'une nouvelle dégradation de la note souveraine du pays. Les principales agences de notation ont clairement mis en garde le gouvernement contre le recours à l'endettement pour financer les dépenses de reconstruction. Il ne devrait donc pas y avoir de demande additionnelle et la relance de l'économie ne reposera que sur l'effet multiplicateur des dépenses." "Un second plan de relance, dont l'ampleur pourrait aller de 2% à 3% du PIB, est en préparation et pourrait être adopté dans le courant du mois d'août. Il semble acquis désormais que le financement de ce deuxième plan se fera par l'émission d'obligations dédiées à la reconstruction, donc distinctes des traditionnelles obligations pour la construction et pour le financement du déficit. La particularité de ces nouvelles obligations reposera sur leur remboursement, qui devrait être assuré par des recettes fiscales dédiées. Un rapport sera remis au gouvernement sur ce sujet fin juin. La hausse de la TVA est un scénario de plus en plus crédible dans ce contexte." "Ce second plan de relance sera déterminant pour assurer un retour rapide du PIB japonais sur son sentier de croissance, mais l'instabilité à la tête de l'exécutif pourrait ralentir le processus. La question principale est celle d'élections législatives anticipées dans l'hypothèse d'une démission de Naoto Kan avant le vote du plan, alors que le DPJ est plus divisé que jamais. Un scénario encore très hypothétique mais qui pèse sur le moral des investisseurs." "Les investisseurs internationaux ont surpris en achetant des actions japonaises, du moins jusqu'à une date récente, alors que les investisseurs locaux s'étaient retirés, craignant une chute des résultats. Nous pensons que cette configuration devrait durer. Les résultats des sociétés devraient rester déprimés tant que toutes les conséquences du séisme n'auront pas été absorbées, que le yen ne se sera pas significativement déprécié et que la demande asiatique ne se sera pas renforcée. Pour autant, les prix intègrent déjà une bonne partie des mauvaises surprises." "En termes de valorisation, le marché japonais offre toujours de la valeur à long terme. Les actions nippones se traitent en effet actuellement à 5,7x le ratio cours/cash flow, contre 8,9x pour le MSCI dans son ensemble. Cependant, le pays du soleil levant se traite à peu près à hauteur du marché global, si l'on tient compte des perspectives de résultat (le ratio PEG est à 1 écart-type en dessous de la moyenne dans les deux cas). Cela révèle les doutes des investisseurs sur les bénéfices attendus." "Mais nous savons que, dans le cas japonais, ces bénéfices dépendent essentiellement des volumes. Une reprise de la production se traduirait par un rebond des bénéfices et donnerait donc un support solide aux valorisations actuelles. En conséquence, nous recommandons d'accroître l'exposition au marché d'actions japonais dans les mois à venir, du moins pour les investisseurs non contraints s par un benchmark." AUT/ALO