Les solutions pour la Grèce (Natixis)

22/07/2011 - 10:34 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Les attentes du marché portant sur le sommet européen étaient grandes, notamment après l'annonce d'un accord de principe entre la France et l'Allemagne. En cours de route, la création d'une taxe bancaire a été abandonnée tandis que le roll-over à la française perdait peu à peu ses supporters compte tenu du positionnement des agences de notation vis-à-vis de cette option (mise en selective default par S&P et Moody's)", note Cyril Regnat de Natixis. "Le rôle central de l'European Financial Stability Facility (EFSF) a rapidement été confirmé. Selon le projet dévoilé aujourd'hui, la Facilité pourrait racheter les titres souverains sur le marché secondaire, sur la base d'une analyse de la BCE et d'un vote à l'unanimité par les pays européens." "Bonne nouvelle pour le Portugal et l'Irlande, la maturité des prêts accordés par l'EFSF serait rallongée de 7,5 ans à 15 ans et le taux d'intérêt appliqué serait abaissé à près de 3,5% (taux de prêt de la Facilité de la balance des paiements euros). Cette annonce concernant le taux d'intérêt paraît optimiste compte tenu des rendements actuels des obligations EFSF, notamment celui de l'obligation 10 ans qui avoisine déjà les 3,50%. Il a d'ailleurs été précisé que le taux des prêts ne pourrait pas être inférieur au coût de funding de l'EFSF." "Il est vraisemblable que le taux appliqué corresponde à celui de l'EFSF adossé à une marge relativement faible. La facilité pourra aussi venir en aide aux institutions financières via la mise en place de prêts aux gouvernements européens. Ces annonces étaient attendues par les marchés, notamment la confirmation des rachats sur le secondaire." "La Facilité pourrait donc soutenir le financement obligataire des pays en difficulté à la fois sur le marché primaire mais aussi sur le marché secondaire. Ceci permettrait aux marchés obligataires de retrouver une liquidité perdue, de tirer vers le bas les rendements obligataires donc d'abaisser le coût de financement des Trésors et de provoquer une réappréciation des obligations périphériques, de contrer plus efficacement les crises de liquidités." "Toutefois, cette mutualisation du risque souverain européen (au final, une obligation libellée zone euro remplace une obligation domestique) n'est pas sans contraintes. En effet, à la différence des rachats de titres effectués par la BCE dans le cadre du Security Market Program, l'EFSF devra émettre en amont des obligations sur le marché primaire avant de pouvoir venir en aide à un pays européen." "La réactivité de la Facilité est donc inférieure à celle de la BCE, mieux armée pour répondre aux tensions sur le marché. Pour compenser ceci, il faudrait que la facilité se préfinance pour répondre aux tensions sur le secondaire, ce qui semble avoir été pris en compte puisque l'EFSF pourra agir de façon préventive et donc sans doute de se pré-fonder." "La seconde réserve concerne l'impact d'une hausse sensible du programme d'émissions de l'EFSF sur les finances publiques européennes. En effet, Eurostat considère ainsi que la dette émise par l'EFSF, à l'occasion de chaque opération de soutien à un membre de la zone euro doit être réallouée dans les comptes publics des Etats apportant leur garantie, au prorata de leur part en tant que garant dans chaque opération d'émission de dette. Elle sera ainsi comptabilisée dans la dette publique des Etats ayant apporté leur garantie." "La dette publique brute allemande augmenterait ainsi à hauteur de 27% des émissions réalisées par l'EFSF. Cette mutualisation du risque devrait jouer en faveur d'une convergence des taux d'intérêts compte tenu du transfert de risque des pays en difficultés aux pays supportant les garanties les plus importantes, à savoir les pays AAA." "La dernière réserve concerne la nécessité que les rachats de l'EFSF soient votés à l'unanimité. Compte tenu des désaccords récurrents entre les pays européens ces derniers mois, les risques de blocage sont toujours présents. Dans une telle situation, la BCE serait de nouveau le seul prêteur en dernier ressort. Une modification de la capacité de prêt de la facilité n'a pas été évoquée pour le moment alors qu'il y a quelques semaines une augmentation des garanties de 440 milliards à 780 milliards d'euros était avancée." "Or, pour pouvoir limiter efficacement les risques de contagion vers l'Espagne et surtout l'Italie, des pays dont les besoins de financement annuels sont largement supérieurs à ceux des pays sous assistance (respectivement 95 milliards et 225 milliards en 2011), une augmentation de la taille de l'EFSF paraît nécessaire. Cela constituera d'ailleurs un véritable test pour la Facilité puisque la capacité de cette dernière à lever du cash sur le marché primaire reste limitée." "La Grèce bénéficiera donc de la rallonge tant attendue. Le FMI, dans le rapport publié en début juillet, estimait les besoins de financement supplémentaires à 103 milliards d'euros. Grâce à ce nouveau plan, le retour de la Grèce sur le marché primaire obligataire serait repoussé en 2014. Le Trésor grec viendrait alors pour une taille de 11,4 milliards. En 2015, toujours selon le FMI, les émissions obligataires grecques avoisineraient les 18,7 milliards. Les 103 milliards seront apportés par les facilités européennes, l'EFSF et l'EFSM, le FMI et les investisseurs privés." "La participation du secteur privé reste la grande inconnue. Une option semble aujourd'hui moins risquée : celle d'un rachat par la Grèce de sa propre dette. Ces rachats pourraient être financés par les facilités européennes et le FMI. La participation des investisseurs passerait par l'achat des titres émis par l'EFSF. Compte tenu du prix moyen actuel des titres grecs (54% du pair), cela permettrait à la Grèce de diminuer une partie de son stock de dette de 46%, à hauteur du financement apporté par la Troïka." "Cette solution serait la plus favorable pour les banques puisqu'elle provoquerait une réappréciation des titres en book et ne passerait pas par une mise en défaut de la dette grecque, qui serait alors toujours acceptée par la BCE. Toutefois, cette dernière a deux défauts majeurs : elle a un effet limité sur le niveau d'endettement de la Grèce par rapport à un haircut et favorise le comportement de free riding (les détenteurs de GGB préféreront attendre une forte réappréciation de leur titre avant de vendre)." "Les deux autres options proposées par les autorités européennes sont le roll-over à la française et le swap allemand. On sait d'ores et déjà que ces dernières seraient accompagnées de mises en default ou selective default de la dette grecque par les agences de notation. A la différence de la première option, elles n'ont pas d'effet sur le niveau d'endettement de la Grèce qui atteindra 172% du PIB en 2012 selon le FMI." "Pour limiter les tensions sur le refinancement des banques, ces deux options seraient associées à un système permettant aux titres grecs de garder leur éligibilité aux appels d'offre de la BCE. Les pays européens pourraient ainsi s'engager à garantir tous les titres apportés en collatéral. Reste à savoir si cette solution serait acceptée par la BCE." "Outre les annonces concernant l'EFSF et la Grèce, les pays européens n'étant pas sous assistance s'engagent à ramener leur déficit sous le seuil des 3% d'ici 2013. La tache sera un peu plus compliquée pour deux pays, la France et l'Espagne. Ces derniers devraient terminer l'année 2011 avec des déficits respectifs des 5,7% et 6,7%." AUT/ALO