(AOF / Funds) - "Partout dans le monde, les pays riches en matières premières révisent leur cadre législatif, fiscal et réglementaire pour tenter de capter une part supérieure des richesses liées à ces ressources : différentes méthodes sont employées, de la perception de royalties à la prise de participation par l'Etat. Dans de nombreux pays, l'existence de ressources naturelles peut avoir un impact négatif sur l'activité industrielle si les exportations de matières premières tirent le taux de change à un niveau tel que la production industrielle n'est plus compétitive", note Natixis. "La Chine a tenté de résoudre ce problème via sa politique de taux de change et des incitations fiscales sous forme de remboursements et de réductions de TVA." "L'Indonésie, un des premiers exportateurs mondiaux de charbon et de minerais, cherche à suivre la même voie. En janvier 2009, le pays a adopté la loi 4/2009 sur l'industrie minière du charbon et des métaux, qui prévoit notamment l'obligation pour les compagnies minières de traiter les métaux et le charbon dans le pays avant de les exporter. L'Indonésie espère ainsi développer les secteurs de l'énergie et des métaux, tirés par les investissements étrangers. Une période de transition de cinq ans a été prévue pour permettre aux compagnies de restructurer leurs opérations, période après laquelle les exportations de matières premières brutes seront interdites à partir de 2014." "Pour aider les compagnies minières à se mettre en conformité avec la loi d'ici 2014, différents textes ont été adoptés pour encourager l'abandon des exportations de matières premières brutes. Une exemption fiscale de 5 à 10 ans après le démarrage des opérations est offerte pour les investissements de plus d'un milliard de roupies indonésiennes (soit 117 millions de dollars) dans des projets dans les secteurs de l'énergie et des métaux." "Les exportateurs de charbon sont encouragés à vendre le charbon à des cours égaux ou supérieurs à l'indice Harga Batubara Acuan (qui correspond à un panier de quatre indices des prix du charbon indépendants), depuis que les taxes et royalties sur les exportations sont calculées par référence à cet indice. L'indice HBA a fortement augmenté à la fin de l'an dernier, avant de refluer légèrement à 117,21 dollars la tonne en août 2011. Les effets de cette évolution progressive se feront vivement ressentir sur le marché mondial du charbon thermique, dans la mesure où l'Indonésie occupe actuellement la place de premier exportateur mondial." "La Chine et l'Inde sont devenues des importateurs nets de plus en plus importants et achètent actuellement à l'Indonésie de forts volumes de charbon thermique sous-bitumineux de qualité inférieure. Les producteurs d'électricité de ces deux pays feront donc face à une hausse croissante des cours du charbon en 2012-13, avant l'arrêt potentiel des exportations de ce charbon thermique de qualité inférieure à partir de 2014." "La logique des chiffres, suggérant une hausse des cours du charbon, n'a pas échappé à l'industrie mondiale du charbon où des opérations de fusion-acquisitions se multiplient depuis le début de l'année. Depuis la fin de l'an dernier, ces opérations ont atteint plus de 24 milliards de dollars, y compris les 5,2 milliards de dollars récemment offerts par Peabody Energy et ArcelorMittal pour Macarthur Coal et les 3,4 milliards de dollars offerts par Arch Coal pour Intercontinental Coal Group." "Cette situation serait déjà assez négative pour les consommateurs de charbon si le marché mondial du charbon était globalement à l'équilibre, mais les prévisions suggèrent que le déficit s'aggravera au cours des prochaines années en Inde et en Chine. En conséquence, la perspective de pénuries d'électricité ou d'une forte hausse des prix de l'électricité dans ces pays se précise, et plus généralement dans le monde, compte tenu de la hausse des cours du charbon, tandis que les coûts des sources d'énergies alternatives restent très supérieurs à ceux du charbon." "La Chine, en particulier, a limité dans une certaine mesure la hausse des prix de l'électricité cette année, au détriment potentiel de la production de charbon et d'électricité, et il sera très intéressant cette année de constater quel mix de hausse des prix et de limitation de la production sera considéré comme acceptable sur les marchés du charbon et de l'électricité en 2012." "La hausse des prix de l'énergie se répercutera dans un large éventail de secteurs, tout en ayant un impact négatif plus général sur l'activité économique. Parmi les métaux de base, l'aluminium devrait être le plus affecté, compte tenu de l'importance des coûts énergétiques dans la production de ce métal. L'impact de la législation indonésienne ne se fera pas seulement sentir dans l'industrie du charbon. En septembre, les autorités indonésiennes ont annoncé qu'elles envisageaient une taxe sur les exportations de minerais pour encourager le traitement domestique des métaux." "L'Indonésie étant un importateur majeur de matières premières sur de nombreux marchés des métaux de base, cette décision pourrait fortement perturber les marchés de l'aluminium, du nickel et de l'étain. Dans l'industrie de l'aluminium, la décision des producteurs d'alumine de désormais mettre en place un prix de référence trimestriel sur la base des cours spot des trois derniers mois a incité les producteurs chinois d'aluminium à importer de la bauxite plutôt que de l'alumine." "L'essentiel de leur approvisionnement en bauxite provenant d'Indonésie, les producteurs chinois d'aluminium pourraient toutefois éprouver des difficultés à trouver d'autres sources suffisantes de bauxite ou revenir aux importations d'alumine. Si l'essentiel des importations de bauxite en provenance d'Indonésie pourra finalement être remplacé par des importations d'alumine, lorsque les compagnies minières indonésiennes auront investi dans des affineries, il est probable qu'à court terme, cette évolution se traduira par une forte baisse des importations de bauxite. Les producteurs chinois d'aluminium pourraient donc faire face, à partir de 2014, à une forte hausse du coût de l'alumine." "Au cours des dernières années, les producteurs chinois ont fortement investi dans de nouvelles capacités de production de fonte de nickel pour remplacer le nickel affiné. L'essentiel de ces capacités a été approvisionné par des mines indonésiennes. Si une grande partie des nouvelles capacités de fonte de nickel produit une fonte de haute qualité à partir de minerai de qualité supérieure, les capacités plus anciennes sont conçues pour utiliser des minerais de qualité inférieure pour produire de la fonte de nickel, laquelle est une alternative directe au nickel affiné plus coûteux." "Si l'Indonésie n'est pas le seul fournisseur possible de latérite de nickel de qualité inférieure destinée à la production chinoise de fonte de nickel bon marché, elle en est actuellement le principal fournisseur. L'arrêt des exportations indonésiennes de minerai de nickel de qualité inférieure utilisé par les producteurs chinois d'acier inoxydable lorsque les prix du nickel sont élevés pourrait donc gripper en partie la soupape de sécurité qui a contribué plafonner les cours du nickel au cours des dernières années." "L'Indonésie est l'un des premiers producteurs mondiaux d'étain. Les autorités locales, inquiètes des dommages potentiels que l'industrie de l'étain pourrait causer à l'environnement ou au tourisme ont récemment pris des mesures visant essentiellement à mieux contrôler les producteurs d'étain et à éviter des dégâts excessifs provoquées par les opérations d'extraction et de dragage illégales. Ainsi, des règles régissent déjà l'activité générale du secteur, notamment une interdiction des exportations de minerai d'une teneur inférieure à 99,85%. Les nouvelles mesures auront donc assez peu d'impact sur la production et les exportations indonésiennes d'étain, qui devraient continuer à diminuer progressivement, en raison de la détérioration de la qualité du minerai et de l'application de règles environnementales strictes." AUT/ALO