Sortie de route prochaine pour la France ?

15/11/2011 - 18:36 - Sicavonline (mis à jour le : 03/03/2015 - 18:10)

Le spread, l'écart de taux d'intérêt entre la France et l'Allemagne a atteint mardi 15 novembre un nouveau record à 183 points de base. Incontestablement, la France se rapproche de l'œil du cyclone. La dégradation des finances publiques françaises, la détérioration de la conjoncture ne plaident pas pour le maintien de la note AAA de la dette française. Emeric Challier, responsable Global Macro chez AFIM OFP, aborde avec Sicavonline les questions qui fâchent sans langue de bois.


François Fillon avait en 2007 déclaré être le Premier ministre d'un Etat en faillite. Une citation qui de l'avis d'Emeric Challier, le responsable de la gestion Global Macro d'AFIM-OFP, « a aujourd'hui toute son actualité, toute sa résonnance. Le débat [pour les investisseurs] est : la France doit-elle être traitée comme l'Italie ou plutôt comme l'Allemagne ?»

La confiance des investisseurs envers l'Etat est-elle ébranlée ?

Les investisseurs, détenteurs de dette, qu'ils soient des institutionnels ou de simples épargnants, ont beaucoup souffert ces derniers mois avec la crise européenne et cette question revêt pour eux une acuité singulière. L'inquiétude est d'autant plus de mise que l'histoire de ces quarante dernières années ne plaide pas en faveur des Etats, dont la France. Celle-ci, après 30 ans de hausse continue de son endettement (le ratio dette/PIB de la France avoisine à présent les 85 % quand il n'était que d'une vingtaine de pourcent en 1981), voit sa crédibilité entamée.

Le déficit de la France reste trop élevé pour se rapprocher de l'Allemagne

Le problème pour Emeric Challier est que l'environnement conjoncturel très adverse ne milite pas pour une amélioration des finances publiques. Le gérant d'AFIM-OFP rappelle qu'est attendu pour la France un déficit budgétaire toujours proche des 5 % tandis que celui de l'Allemagne se situera plutôt aux alentours de 1,5 %. L'exemple sans doute à suivre est l'Allemagne qui « est revenue à sa discipline budgétaire » et respecte de nouveau les critères de Maastricht et la règle des 3 % maximum de déficit. La France a encore du chemin pour y parvenir, d'autant qu'elle diverge de plus en plus de sa voisine d'Outre-Rhin depuis quelques années. Emeric Challier souligne un autre problème pour la France : « 60 % de la dette française est détenue par des investisseurs étrangers. C'est l'inverse pour l'Italie : 60 % de la dette italienne est détenue par les [investisseurs] locaux. Résultat : une plus grande exposition au risque international pour la France. »

La compétitivité de la France reste insuffisante

Autre difficulté pour la France : son manque de compétitivité économique qui se traduit par un déficit commercial se creusant continument. « En septembre, on se situe à plus de 15 Mds d'excédent commercial en Allemagne, et à plus de 5 Mds de déficit en France, et cette tendance à l'amélioration permanente des excédents allemands et à la dégradation du déficit commercial français est marquée depuis 15 à 20 ans, » rappelle le patron de la recherche Global Macro d'AFIM-OFP, pour qui les fondamentaux économiques et le budget sont au cœur des inquiétudes afférentes à la France. Dans ces conditions, « la perte du rating AAA de la France est probable », mais relativise Emeric Challier, le marché l'a déjà anticipée. « La France par le niveau des taux d'intérêt auxquels elle doit désormais emprunter n'est déjà plus considérée par le marché que comme un AA+. » Partant, une dégradation de la note française à ce niveau ne causerait pas forcément de dommage supplémentaire.

La France doit pour s'en sortir redresser ses comptes publics

Mais le marché attend surtout un redressement des comptes de la France. Le problème est que le potentiel de croissance de la France s'amoindrit de plus en plus. Chez AFIM-OFP, on voit une croissance proche de zéro mais on se dit inquiet de des quelques prévisions de décroissance commençant à apparaître. Du coup, la société de gestion sous-pondère la France dans son portefeuille obligataire et s'abstient actuellement d'acheter de la dette française dans l'attente de perspectives plus rassurantes.

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