Natixis estime que S&P a dégradé la note de la France avant les élections

07/12/2011 - 11:40 - Option Finance

(AOF / Funds) - "La menace de S&P de downgrader 15 des 17 pays de la zone euro a mis fin à l'euphorie ambiante. Exemple, pris au hasard, l'OAT-Bund qui avait surperformé l'Allemagne de 90pbs en trois semaines s'est de nouveau inversé et écarté de 12pbs à 103pbs aujourd'hui. Après la clôture européenne (la session battait son plein à New-York en revanche), l'agence américaine a décidé de mettre 15 pays en Credit Watch neg. Cela signifie que ces pays ont une chance sur deux de voir leur note abaissée dans les 90 prochains jours", note Natixis. "Cela devrait même être plus rapide que cela, S&P ayant dit qu'elle rendrait sa décision très rapidement après le sommet de vendredi... Six pays sont menacés de voir leur note abaissée d'un cran à savoir, l'Allemagne, l'Autriche, la Finlande, la Hollande, la Belgique (récemment downgradée à AA le 25/11) et le Luxembourg. Neuf autres pays (Estonie, France, Irlande, Italie, Malte, Portugal, Slovaque, Slovénie et Espagne) pourraient perdre deux notes, ce qui pour la France la mettrait à AA." "Pourtant les arguments mis en avant par S&P laissent un peu perplexe. L'agence dit qu'elle regardera les piliers politique, externe, fiscal et monétaire. Si on considère la France, la prévision de croissance est jugée trop optimiste à 1% (avis que nous partageons avec +0,5% attendu) pour atteindre les 4,5% visés mais le Trésor a fait savoir qu'il avait mis en réserve 6 milliards de crédit justement pour pouvoir l'atteindre avec une croissance de 0,5%. On partage beaucoup plus volontiers ses réserves sur les 2% escomptés entre 2013 et 2016." "Sur les banques, S&P cite une dette externe de 104% du PIB en 2011 mais la plupart des grandes banques ont fortement réduit leur engagements externes et réduit leurs balances. De plus, à part Dexia, l'EBA a annoncé que les besoins de recapitalisations des banques françaises de 8,8 milliards initialement prévus allaient être sensiblement revus en baisse (à l'inverse on parle d'une révision en forte hausse pour les établissements allemands à 12 milliards...)." "S&P cite également le resserrement de la liquidité offerte à la France, mais l'AFT cette année ne s'est jamais financé historiquement à si bas coût (2,80% en moyenne sur les émissions obligataires) et le ratio de couverture montre, qu'en moyenne il y a eu, aux adjudications, 2,4 fois plus d'acheteurs que de papier proposé par le Trésor." "Concernant le monétaire, S&P va regarder si la BCE agira efficacement dans la résolution de la crise. Si on s'attend à un mouvement plus agressif de baisse du repo qu'attendu par le marché, à de nouveaux VLTRO voire une augmentation du programme de Covered Bonds, l'achat massif de titres d'Etat pour défendre des taux soutenable reste à l'état de voeu pieu pour le moment." "La motivation des agences ne semble pas uniquement fondamentale. Encore une fois, s'il s'agissait de regarder le déficit et la dette, la croissance, l'existence d'une nouvelle majorité dédiée aux réformes, l'inflation ou la balance extérieure, l'Espagne serait largement mieux notée que la Grande-Bretagne. Il s'agit ici de prendre en compte les difficultés d'organisation de la zone euro et comme corollaire la défiance de certains investisseurs. S&P a de ce fait, mis sous surveillance négative également l'EFSF qui risque lui aussi de perdre son AAA." "Le Credit Watch global permet d'appliquer à tous une nouvelle méthodologie et d'ajuster les spreads en une fois sans être accusé de stigmatiser un pays en particulier. Si tous les pays étaient downgradés, l'effet serait un peu atténué avec juste une translation vers le haut des niveaux de taux. De même concernant l'EFSF, il ne serait pas dramatique non plus qu'il ne soit pas AAA. Après tout un Eurobond serait plus proche de AA." "Finalement, de deux choses l'une, soit S&P cherche à mettre la pression sur le sommet de l'UE pour qu'enfin soient prises des décisions sur la gouvernance de la zone euro (majorité, nouvelle organisation de la zone euro affranchie de l'UE, abandons de souveraineté, etc), soit l'agence profite de l'occasion d'ajuster les ratings de pays qu'elle avait de toute façon l'intention de downgrader. Dans les deux cas avec la déception probable post-meeting, il est très probable, en ce qui concerne la France, que l'agence cherche à profiter de l'occasion pour ajuster ses ratings sans risquer d'être taxée d'ingérence une fois que la campagne présidentielle aura vraiment démarré." "Autrement dit, ou elle allait abaisser rapidement le rating ou elle aurait sans doute du attendre la rentrée 2012 après le nouveau parlement et le collectif budgétaire. On peut craindre qu'elle ait choisi la première option à l'occasion de cette revue généralisée. On ne peut s'empêcher toutefois de revenir au vrai-faux downgrading de la France déjà par S&P le 10 novembre qui s'était alors défendu en déclarant : "la note de la République française est inchangée à AAA, assortie d'une perspective stable, et cet incident n'est pas lié à une quelconque activité de surveillance de la note". AUT/ALO