(AOF / Funds) - Laisser longtemps les taux directeurs des banques centrales à un niveau quasi nul n'est-il pas dangereux ? Depuis que partout l'activité est repartie, la question doit être posée. En juin dernier, la BRI lui a consacré un chapitre entier de son rapport annuel. Elle y a souligné les dangers du maintien d'une politique monétaire trop accommodante qui risque vite d'encourager à nouveau une prise de risque excessive. Sa conclusion est claire : pour ne pas mettre en danger la stabilité financière, les banquiers centraux doivent remonter les taux plus vite que ne le suggère la seule prise en compte des évolutions macroéconomiques. Savoir dans quelle mesure cet appel à la prudence lancé par la BRI est justifié est d'autant plus important que les perspectives macroéconomiques qui se dessinent aujourd'hui, plaident clairement pour le maintien de taux bas. La reprise de l'activité engagée des deux côtés de l'Atlantique est loin en effet d'être suffisamment vigoureuse pour pouvoir résister, sans le plein soutien de la politique monétaire, au rééquilibrage budgétaire qui va maintenant devoir être mené. Et l'importance de l'effort fiscal à fournir comme le degré de sous-utilisation des ressources sont tels - aux Etats-Unis notamment - que, d'un point de vue macroéconomique, le maintien de taux bas a toutes les chances de continuer de se justifier pendant encore plusieurs années ! Apprécier et gérer du mieux possible les risques qui peuvent en résulter est donc [-16]ðessentiel. Sur ce point, la déposition récente de Ben Bernanke devant la Commission d'enquête sur la crise financière du Congrès américain a apporté un éclairage nouveau. Le président de la Réserve fédérale, loin en effet de faire de la politique de taux d'intérêt menée par son prédécesseur l'une des causes de la crise financière, a démonté une à une les différentes lacunes du dispositif de surveillance financière en place aux Etats-Unis avant 2007. Pour lui ce sont ces lacunes, plus que le bas niveau des taux d'intérêt, qui expliquent aussi bien la progression excessive de l'endettement des ménages que l'accumulation incontrôlée de positions risquées au sein du système financier globalisé. Ses conclusions sont dénuées d'ambiguïté. "La régulation et la supervision financière sont des outils plus adaptés pour gérer les problèmes liés au crédit que la politique monétaire. Améliorer la stabilité financière par le biais de la régulation et de la supervision laisse la politique monétaire libre de s'occuper des problèmes qu'elle est le mieux à même de résoudre, ceux liés à la stabilité de la croissance et de l'inflation." Certes, cette position ne l'engage qu'à titre personnel. Elle n'en laisse pas moins penser que la Réserve fédérale va au cours des années qui viennent être assez peu sensible aux mises en garde de la BRI : elle maintiendra ses taux directeurs proches de leur niveau actuel aussi longtemps qu'elle le jugera nécessaire d'un point de vue macroéconomique. Elle le fera avec d'autant moins d'hésitation qu'une réforme de grande ampleur de la régulation financière américaine est d'ores et déjà engagée. En ira-t-il de même du côté européen ? Jusqu'ici, la BCE a fait preuve d'un grand pragmatisme : elle n'a pas hésité à mener une politique monétaire ultra-accommodante pour aider les économies européennes à repartir. Et elle semble vouloir continuer de le faire pour permettre à la reprise de se poursuivre malgré le resserrement fiscal auquel vont bientôt procéder tous les gouvernements de la zone. Comme aux Etats-Unis toutefois, ce resserrement va se poursuivre pendant plusieurs années. La BCE ne risque-t-elle pas alors de devenir plus sensible aux arguments présentés par la BRI ? Ne va-t-elle pas chercher à remonter ses taux plus vite que ne l'exigerait la seule évolution de la conjoncture ? Dans ce cas, le marché des changes jouerait toutefois le rôle de force de rappel : la simple anticipation d'un resserrement monétaire plus précoce en Europe qu'aux Etats-Unis pousserait l'euro à la hausse face au dollar. Notre Banque centrale serait alors amenée à retarder son mouvement et, finalement, à aligner le rythme de ses hausses sur celui de la Réserve fédérale. Cela ne veut pas dire bien sûr que l'Europe doit négliger les problèmes que peut poser le maintien de taux bas. Mais elle n'a guère le choix : il lui faut accélérer la consolidation de son appareil de régulation et de supervision financière. Elle pourra ainsi maintenir ses taux directeurs là où l'exige la stabilité macroéconomique sans avoir à en redouter les éventuels effets sur la stabilité financière. Par Anton Brender, chef économiste, Dexia AM AUT/CHR
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