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Les régulateurs de Bâle 3 ont cédé à la pression des banques

16/09/2010 - 17:45 - Sicavonline - Vincent Bezault


Les régulateurs de Bâle 3 ont cédé à la pression des banques

Les banquiers s'effrayaient d'un durcissement excessif des normes prudentielles devant voir le jour avec Bâle 3. Les régulateurs du Comité de Bâle n'ont pas été sourds à leur complainte. De nouvelles contraintes, ils n'en imposent guère. C'est du moins l'avis d'Eric Delannoy, vice-président du cabinet de conseil Weave, qui juge par ailleurs que les ratios de fonds propres « durs » exigés ne constituent pas une réponse adaptée à la prévention d'un quelconque risque systémique.

Eric Delannoy, à la lecture des règles prudentielles émises à l'issue de Bâle 3, ne peut-on pas considérer que les banques ont gagné la partie face au régulateur ?

Les Fonds propres :

les régulateurs exigent des banques qu'elles disposent d'un certain niveau de fonds propres ou de capitaux propres. Ces fonds propres sont censés couvrir le risque pris par la banque. Schématiquement, la dette d'une banque est constituée des dépôts à vue des épargnants. Ses actifs sont constitués des crédits qu'elle octroie. La solvabilité d'une banque s'évalue à sa capacité à rembourser ses dettes, autrement dit à faire face au retrait des épargnants, ou à sa faculté à digérer les pertes enregistrées sur ses créances . Il existe plusieurs ratios de solvabilité : le plus exigeant est le fameux Tier One, ce que l'on désigne aussi par les « fonds propres durs » ou encore « les fonds propres de meilleure qualité. » Ils se composent du capital social, de la trésorerie, de bénéfices mis en réserve et de tout autre instrument financier pouvant être jugé idoine par le régulateur. Bâle 3 impose aux banques que le Tier One représente désormais 7 % de leurs activités de marché ou de leur crédit.

Indubitablement. Aujourd'hui, on est en droit de s'interroger quant à l'utilité de cette réforme. Le Comité de Bâle exige des banques que leurs fonds propres « durs », ce que l'on appelle le ratio Tier One, représentent 7 % de leurs actifs en 2019. Mais comment prendre les normes prudentielles de Bâle 3 au sérieux quand la plupart des grandes banques européennes atteignent ou dépassent d'ores et déjà ce ratio ?

Autrement dit, Michel Pebereau, le président de BNP Paribas, et la Fédération Bancaire Française qui poussaient des cris d'orfraie, avant que le Comité de Bâle ne livre ses conclusions, se doivent d'être rassurés : les banques françaises n'auront pas à lever 150 milliards d'euros pour se conformer aux nouveaux ratios de solvabilité ?

Non certainement pas. En tout cas au regard de ce qui a été annoncé le 12 septembre.

Peut-on se satisfaire d'un tel allègement des exigences des régulateurs par rapport à ce qui était initialement attendu, dans la mesure où l'un des objectifs de Bâle III est de prévenir les crises ?

Je vous ferai une réponse double. Tout d'abord, les travaux de Bâle 3, tels qu'ils étaient engagés semblaient nous condamner à une sorte de monstruosité : les premières moutures de Bâle 3 faisaient apparaître un tel durcissement des exigences en matière de fonds propres que l'activité des banques en aurait été très sévèrement endommagée. La version finale de Bâle 3 ne tombe pas dans ce piège. De ce point de vue, il est bon que les régulateurs aient mis de l'eau dans leur vin. Mais, par ailleurs, est-ce que Bâle 3 dans sa version définitive peut permettre d'éviter une crise financière comme celle que nous venons de connaitre ? Est-ce que les normes annoncées écartent le risque d'une faillite comme celle de Lehman Brothers ? Non, bien évidemment, parce que les régulateurs ne se posent pas les bonnes questions. Ils cherchent systématiquement à limiter le risque et non à l'encadrer. Or, limiter le risque revient à nier l'essence même du métier de banquier. Le banquier est là pour prendre des risques, pour faire des paris sur l'avenir ainsi que la réussite des individus ou des entreprises.

Oui, mais le banquier oublie parfois de garder le sens de la mesure...

C'est certain mais je préfère que l'on réfléchisse à l'encadrement du risque plutôt qu'à sa limitation. Il me paraît plus utile de nous doter des instruments permettant de diagnostiquer et de mesurer le risque afin de pouvoir éventuellement intervenir. Il faut également insister sur la transparence des produits vendus par les banques et mettre en place des systèmes les obligeant à comprendre ce qu'elles commercialisent.

En quoi est-ce si pernicieux de limiter le risque ?

Si on limite le risque en demandant aux banques de conserver par devers elles le plus d'argent possible pour faire face à des pertes éventuelles, on nuit à leur efficience et à leur fonction qui consiste, schématiquement, à transformer les dépôts à vue des épargnants en prêts à moyen/long terme pour financer les ménages et les entreprises. Sans ce travail de transformation de l'épargne, l'économie ne tourne pas.

Vous reprenez en l'occurrence un argument que les banquiers citent à l'envi, mais comment peut-on justifier d'avoir des établissements prêtant jusqu'à 30 fois leurs fonds propres, quand on sait que cela démultiplie les risques de perte ou de faillite si d'aventure un accident survient ?

On ne le peut pas. Et je ne dis pas non plus qu'il ne faille aucune limitation du risque. Mais selon, moi la priorité doit être accordée à son encadrement et à son identification. Et puis si l'on veut sérieusement traiter la question du risque, il est par ailleurs nécessaire (ce qui n'est pas toujours fait aujourd'hui) de s'interroger sur le rôle des agences de notation, qui ne remplissent plus du tout leur fonction de vigie ou bien s'interroger sur l'utilité des 45 institutions internationales légitimes pour édicter des normes comptables. Mais cela n'est pas du ressort de Bâle 3.

Peut-on dire que Bâle 3 étant loin d'être la révolution annoncée, les banquiers peuvent désormais dormir sur leurs deux oreilles ?

Non, car l'histoire n'est pas terminée. Les questions du ratio de liquidité et de l'effet de levier ne sont pas tranchées. Le Comité de Bâle a indiqué qu'elles le seraient plus tard. Les régulateurs ont aussi annoncé qu'il leur restait à déterminer les niveaux d'exigence à appliquer aux banques présentant des risques systémiques. Le ratio de 7 % de fonds propres « durs » sera sans doute relevé pour les établissements entrant dans cette catégorie. Il y a donc encore beaucoup de place pour la négociation entre banquiers et instances de régulation. Tout n'est donc pas joué pour les banques européennes. Et puis, se pose à elles un autre problème: celui de l'universalité ou non de la réforme. Les Etats-Unis ne se sont jamais soumis à Bâle 2, pourquoi se conformeraient-ils à Bâle 3 ? Et s'ils ne le font pas, cela soulève un sérieux problème car, même si Bâle 3 parait vidé de sa substance, il enferme les banques européennes dans un cadre réglementaire beaucoup plus contraignant qui pénalise leur rentabilité par rapport à celle de leurs homologues américaines. Du coup, se crée une distorsion de concurrence préjudiciable aux européens. Ce qui est un comble, car les banques européennes ont jusqu'à présent montré beaucoup plus de vertu et de mesure que leurs concurrentes d'outre-Atlantique. Propos recueillis par Vincent Bezault

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