Indubitablement. Aujourd'hui, on est en droit de s'interroger quant à l'utilité de cette réforme. Le Comité de Bâle exige des banques que leurs fonds propres « durs », ce que l'on appelle le ratio Tier One, représentent 7 % de leurs actifs en 2019. Mais comment prendre les normes prudentielles de Bâle 3 au sérieux quand la plupart des grandes banques européennes atteignent ou dépassent d'ores et déjà ce ratio ?
Non certainement pas. En tout cas au regard de ce qui a été annoncé le 12 septembre.
Je vous ferai une réponse double. Tout d'abord, les travaux de Bâle 3, tels qu'ils étaient engagés semblaient nous condamner à une sorte de monstruosité : les premières moutures de Bâle 3 faisaient apparaître un tel durcissement des exigences en matière de fonds propres que l'activité des banques en aurait été très sévèrement endommagée. La version finale de Bâle 3 ne tombe pas dans ce piège. De ce point de vue, il est bon que les régulateurs aient mis de l'eau dans leur vin. Mais, par ailleurs, est-ce que Bâle 3 dans sa version définitive peut permettre d'éviter une crise financière comme celle que nous venons de connaitre ? Est-ce que les normes annoncées écartent le risque d'une faillite comme celle de Lehman Brothers ? Non, bien évidemment, parce que les régulateurs ne se posent pas les bonnes questions. Ils cherchent systématiquement à limiter le risque et non à l'encadrer. Or, limiter le risque revient à nier l'essence même du métier de banquier. Le banquier est là pour prendre des risques, pour faire des paris sur l'avenir ainsi que la réussite des individus ou des entreprises.
C'est certain mais je préfère que l'on réfléchisse à l'encadrement du risque plutôt qu'à sa limitation. Il me paraît plus utile de nous doter des instruments permettant de diagnostiquer et de mesurer le risque afin de pouvoir éventuellement intervenir. Il faut également insister sur la transparence des produits vendus par les banques et mettre en place des systèmes les obligeant à comprendre ce qu'elles commercialisent.
Si on limite le risque en demandant aux banques de conserver par devers elles le plus d'argent possible pour faire face à des pertes éventuelles, on nuit à leur efficience et à leur fonction qui consiste, schématiquement, à transformer les dépôts à vue des épargnants en prêts à moyen/long terme pour financer les ménages et les entreprises. Sans ce travail de transformation de l'épargne, l'économie ne tourne pas.
On ne le peut pas. Et je ne dis pas non plus qu'il ne faille aucune limitation du risque. Mais selon, moi la priorité doit être accordée à son encadrement et à son identification. Et puis si l'on veut sérieusement traiter la question du risque, il est par ailleurs nécessaire (ce qui n'est pas toujours fait aujourd'hui) de s'interroger sur le rôle des agences de notation, qui ne remplissent plus du tout leur fonction de vigie ou bien s'interroger sur l'utilité des 45 institutions internationales légitimes pour édicter des normes comptables. Mais cela n'est pas du ressort de Bâle 3.
Non, car l'histoire n'est pas terminée. Les questions du ratio de liquidité et de l'effet de levier ne sont pas tranchées. Le Comité de Bâle a indiqué qu'elles le seraient plus tard. Les régulateurs ont aussi annoncé qu'il leur restait à déterminer les niveaux d'exigence à appliquer aux banques présentant des risques systémiques. Le ratio de 7 % de fonds propres « durs » sera sans doute relevé pour les établissements entrant dans cette catégorie. Il y a donc encore beaucoup de place pour la négociation entre banquiers et instances de régulation. Tout n'est donc pas joué pour les banques européennes. Et puis, se pose à elles un autre problème: celui de l'universalité ou non de la réforme. Les Etats-Unis ne se sont jamais soumis à Bâle 2, pourquoi se conformeraient-ils à Bâle 3 ? Et s'ils ne le font pas, cela soulève un sérieux problème car, même si Bâle 3 parait vidé de sa substance, il enferme les banques européennes dans un cadre réglementaire beaucoup plus contraignant qui pénalise leur rentabilité par rapport à celle de leurs homologues américaines. Du coup, se crée une distorsion de concurrence préjudiciable aux européens. Ce qui est un comble, car les banques européennes ont jusqu'à présent montré beaucoup plus de vertu et de mesure que leurs concurrentes d'outre-Atlantique. Propos recueillis par Vincent Bezault
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