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Un virage à 180° sur les marchés (Pierre Sabatier 1/2)

01/02/2019 - 14:57 - Sicavonline


Un virage à 180° sur les marchés (Pierre Sabatier 1/2)

Agir comme si rien n'avait changé sur les marchés, après l'embardée des places boursières du monde entier en territoire baissier, serait une erreur selon Pierre Sabatier, le président de PrimeView qui, dans un entretien en deux parties, affirme qu'une métamorphose majeure s'opère sous nos yeux et qu'elle implique un changement d'attitude des investisseurs vis à vis des actifs.

Sicavonline : Pierre Sabatier, vous êtes a priori décidé à nous faire un peu peur puisque que vous prétendez que 2018 n'est pas un accident. Vu la tournure qu'a prise l'année écoulée, il semble que nous ayons de quoi nous inquiéter.

Pierre Sabatier : 2018 est une année difficile mais prétendre qu'elle n'était qu'un accident voudrait dire qu'une fois celui-ci passé on revient à la normale et que l'on peut retourner aux mêmes pratiques et aux mêmes attitudes que par le passé. Je crois que [2018] est plutôt l'expression d'un changement de nature plus structurelle, plus fondamentale. (…) Nous sommes véritablement en train de vivre un changement majeur notamment en ce qui concerne les politiques monétaires qui deviennent moins favorables que par le passé et l'on se rend compte que sans ce soutien [des banques centrales] à la plupart des prix des actifs, qui a prévalu ces dernières années, les marchés doivent se remettre à valoriser du risque.

Vous mentionnez une fin du soutien des banques centrales. Cependant, Jerome Powell, le président de la FED, à qui il était reproché d'être un peu trop droit dans ses bottes et de vouloir monter les taux quoi qu'il arrive, a clairement dit qu'il serait attentif à l'évolution des marchés et que les hausses de taux n'étaient pas obligatoires.

Il y a deux sujets en politique monétaire qui sont en l'espèce disjoints et tous les deux sont très importants mais pas de la même manière. Il y a d'un côté le sujet des taux directeurs et de l'autre celui de l'injection directe de liquidités, ce qu'on appelle le Quantitative Easing. Sur le sujet des taux directeurs, vous ne serez pas surpris puisque ça fait des mois et des trimestres que nous clamons chez PrimeView que les agents privés, quel que soit l'endroit du monde, Amérique comprise, ne sont pas capables de supporter des taux beaucoup plus élevés et que la FED devait justement faire attention à ne pas trop monter ses taux directeurs parce que sinon elle précipiterait l'économie américaine en fin de cycle. La réserve fédérale américaine ayant toujours fait preuve d'un grand pragmatisme depuis dix ans, nous anticipions justement le fait qu'elle cesse d'augmenter ses taux directeurs. C'est une très bonne chose parce que ça nous évite le scénario du pire. (…). Voilà pour le premier sujet de politique monétaire. Le second est celui de la réduction du bilan des banques centrales. Il faut comprendre quel impact [l'extension du bilan des banques centrales via le Quantitative Easing] a eu pendant cinq à six ans. [L'injection de liquidités] a notamment « détruit » beaucoup de gérants qui faisaient de la gestion active, à savoir du stock picking au sein des classes d'actifs. Pourquoi ? Pour une raison toute simple. (…) Lorsqu'une banque centrale, européenne ou américaine, rachète des obligations souveraines en grande majorité que fait-elle ? Elle empêche les autres investisseurs de les acheter. Ces derniers qui ont quand même de l'argent à investir, c'est leur métier, vont le faire ailleurs, [via d'autres supports]. Ce qui s'est passé est donc une histoire de vases communicants : n'ayant plus à disposition du papier obligataire souverain (NDLR : de la dette d'Etat), les investisseurs ont acheté des actions, des obligations corporate (de la dette privée, émise par les entreprises), en l'occurrence d'abord de l'investment grade ( NDLR : les obligations investment grade sont les obligations ayant reçu la meilleure note des agences de notation, leurs taux sont les plus bas du marché de la dette privée, car leurs émetteurs présentent moins de risque de défaut) puis ensuite du high yield (NDLR : obligations à haut rendement, émises par des émetteurs qui portent un risque de défaut plus grand que les émetteurs investment grade). En somme, ils ont acheté en fait tout un tas d'actifs plus risqués [que les obligations souveraines] en réaction directe à ces injections de liquidités ; lorsqu'on ôte le tuyau qui amène toutes ces liquidités en provenance des banques centrales [vers les obligations souveraines], il ne faut pas s'étonner de voir que tout un tas de risque qui n'étaient plus valorisés se remettent à l'être.

Si je résume, les banques centrales sont venues au secours des Etats et du système financier en rachetant des obligations souveraines durant une dizaine d'années –il faut se rappeler que les Etats lors de la grande crise financière de 2008 avait eux-mêmes secouru les établissements bancaires pour maintenir le système économique et financier en place, mais cela avait résulté en des déficits colossaux qu'il fallait absolument financer. D'où l'envolée des dettes publiques et donc les banques centrales se sont mises à acheter de la dette souveraine, ce faisant, elles ont préempté le marché, elles ont évincé les investisseurs traditionnels de ce marché obligataire étatique. Ces derniers se sont donc reportés par défaut sur tous les autres actifs, ce qui a abouti à l'inflation des actifs financiers…

…quels qu'ils soient ! Nous sortons finalement d'une dizaine d'années d'inflation des prix des actifs financiers de toute nature. Le mécanisme est intéressant. Qu'a-t-on constaté ? Les investisseurs ont d'abord acheté ce qui ressemblait à des obligations souveraines, donc des obligations d'entreprises bien notées (c'est-à-dire de l'investment grade) qui ont vu leurs taux baisser et converger vers les obligations souveraines ; puis, ils ont acheté les actions et pas n'importe quelles actions, mais les actions qui ressemblaient à des obligations, celles qui distribuent des dividendes. Normalement lorsque les marchés actions montent, cela découle plutôt du fait que les investisseurs jouent la croissance. Eh bien là, non. Les investisseurs ont joué bien davantage ce qui ressemblait à des obligations, et puis une fois que ce fut fait, ils sont allés encore plus loin, ils ont acheté des actifs émergents. Ils ont été chercher du risque de plus en plus loin pour compenser ce manque dans l'offre de papier à disposition, un manque qui n'est que la conséquence directe des politiques monétaires des banques centrales.

Vous insistez, Pierre Sabatier, sur le fait qu'il faille bien distinguer la politique monétaire par les taux et la politique monétaire par le bilan, autrement dit par les injections de liquidités qui ont pris la forme en l'espèce d'achat d'obligations souveraines ; nous sommes en l'occurrence dans une phase de normalisation du bilan.

Cela induit des conséquences assez importantes dans le fonctionnement même des actifs financiers.

Mais est ce que ce mouvement de normalisation du bilan des banques centrales est réellement durable parce que qu'aux Etats-Unis, par exemple, vous dites bien Jerome Powell fait attention à ne pas relever trop vite et trop fort les taux afin d'éviter un déraillement d'une économie qui est déjà en fin de cycle. Dans le même temps on a un peu partout des politiques budgétaires plus expansionnistes. Aux Etats-Unis, il explose même. Il va bien falloir à nouveau financer ce déficit.

On n'est clairement pas, aujourd'hui en tout cas, et ce n'est pas ce que jouent les investisseurs, à la veille de politiques monétaires qui viseraient à remettre du Quantitative Easing dans le marché tout de suite ; si c'était le cas, on revient à la situation d'avant ; et là pour le coup on pourrait considérer 2018 comme un accident puisque l'on retrouverait en fait [les banques centrales] en soutien des actifs.

Ce n'est pas un scénario auquel vous souscrivez ?

Pas tout de suite. On y viendra probablement aux Etats-Unis, [les Américains] n'auront aucun problème à être très pragmatiques et si jamais les marchés venaient à baisser véritablement trop, ils pourraient même aller jusqu'à remettre en place des politiques de Quantitative Easing. Toutefois, pour l'heure, on a vraiment une conjonction de facteurs défavorables aux actifs financiers risqués : on perd le gros tuyau d'injections de liquidités en provenance des banques centrales ; en face de quoi, on a finalement quelque chose d'assez positif, une multiplication des politiques budgétaires expansionnistes en soutien des économies, à savoir qu'on se remet à faire du déficit public. Les Japonais font cela depuis vingt ans, (…) 7 à 10 % de déficit public par an. Les Etats-Unis le font avec Trump et maintenant que voyez-vous ? Les pays européens s'y mettent aussi : l'Italie dans un premier temps, la France, conséquence directe du mouvement des Gilets jaunes, change de pied même si c'est dans une petite mesure, elle passe de la rigueur budgétaire à clairement des politiques budgétaires en soutien ; l'Espagne suit la même trajectoire à travers l'augmentation de 22 % de son SMIC et, même les pays émergents ne sont pas en reste avec notamment la Chine Il faut avoir en tête que cette multiplication des politiques budgétaires expansionnistes a deux conséquences. La première est plutôt favorable à l'économie réelle. Etant donné que l'on est face à un ralentissement mondial généralisé, notamment alimenté par les politiques monétaires qui deviennent moins favorables que par le passé, si on avait des politiques budgétaires qui restaient rigoristes, on serait sur un scénario du pire. Le ralentissement se transformerait tout de suite en récession avec des conséquences très lourdes sur les actifs financiers risqués. On n'est pas dans cette situation puisque (…)  les politiques budgétaires viennent en soutien, ce qui implique que l'on va rester pour l'instant sur un ralentissement raisonnable. Ce qui en soi est une bonne chose. Par contre, c'est mauvais pour les actifs financiers.

Pourtant si ces politiques budgétaires sont un soutien à la croissance, on se dit que cela devrait bénéficier aux actions.

Elles sont un soutien qui évite un ralentissement se transformant en récession, il ne s'agit pas d'un soutien qui permet de voir des taux de croissance remonter ne serait-ce qu'au niveau qui était le leur en 2017. On évite le pire. En revanche, en ce qui concerne les actifs financiers, cela signifie qu'on est face à deux choses très désagréables qui correspondent au rapport entre l'offre et la demande. On a une offre de papier qui va augmenter du fait de l'augmentation du besoin de financement public –il faut bien financer les déficits publics puisque l'on passe d'une politique de restriction à une politique d'expansion de ces mêmes déficits publics, et cela au moment où les banques centrales décident de réduire leur bilan. Autrement dit vous perdez ceux qui finançaient le déficit public au moment où il ré-augmente. Naturellement, cela va avoir des conséquences très fortes sur l'ensemble du reste des actifs financiers. Ce qu'on peut envisager, c'est que cette augmentation du besoin de financement public soit financée par un rapatriement de l'épargne qui jusque-là était stockée et était [investie dans] des actifs considérés comme plus risqués. C'est cette bascule qui s'est produite en 2018 et qui devrait perdurer en 2019.

Un autre élément semble apporter de l'eau à votre moulin. Tout le monde a en tête qu'un cycle n'est pas éternel et qu'à un moment donné la croissance va sérieusement se détériorer. L'heure est aujourd'hui au simple ralentissement mais une détérioration beaucoup plus vive de l'économie se produira et dans ce cas-là, encore une fois, le refuge le plus logique c'est l'obligataire…

…des pays riches. En gros vous n'avez plus de banques centrales pour acheter le papier public au moment où il augmente en nombre et en volume et au moment où finalement les agents privés que nous sommes, les ménages, ont tendance à plutôt privilégier, au regard du manque de perspectives, la préservation du capital plutôt que la performance. Vous avez sous les yeux tous les facteurs pour anticiper deux phénomènes qui peuvent paraître contradictoires 1) les Etats n'auront pas de problèmes pour financer et 2) les taux d'intérêt ne monteront pas ; c'est ce que chez PrimeView nous disons depuis déjà quelques trimestres et que nous continuons de penser.

Retrouvez la suite de cette interview ici

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