L'or, un filon d'avenir : Benjamin Louvet (2/2)

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Vincent Bezault : de nombreux investisseurs se posent la question : sous quelle forme détenir de l'or ? Plusieurs de nos invités de l'œil du pro se sont prononcés en faveur de l'or physique, avec notamment un argument : si tout s'écroule, vous aurez dans la poche en moyen de paiement universellement reconnu et il sera plus difficile que l'Etat vienne vous prendre cet or. Vous, Benjamin, vous vous inscrivez en faux avec cette analyse.

Benjamin Louvet : Oui, Vincent. Je mets un bémol à cette croyance, et ce, pour plusieurs raisons. Dire que l'on est mieux protégé quand on détient de l'or physique, c'est méconnaître l'Histoire. Beaucoup l'ont oublié, mais la sortie de la crise de 1929 s'est faite grâce à l'or. Fraichement arrivé à la Maison Blanche début 1934, Franklin Roosevelt prend très rapidement un executive order, le 61- 2, qui enjoignait à tout Américain détenant de l'or de le ramener à sa banque, où il lui sera racheté au cours officiel. A l'époque, le cours de l'or était fixe et valait 20,67 $ l'once. Le détenteur d'or récalcitrant risquait cinq à dix ans de prison et/ou dix mille dollars d'amende, c'est-à-dire à l'époque une somme absolument colossale. C'est bien la preuve qu'il est tout à fait possible pour un Etat de confisquer l'or physique. Autrement dit, détenir de l'or physique ne vous protège ni d'une taxation ni d'une confiscation. Le passé le prouve.

Pour quels motifs les américains ont pris cette décision et en quoi elle leur a permis de sortir de la crise de 1929. A l'époque, il y avait un lien entre la création monétaire et l'or. Donc, si vous vouliez créer de la monnaie, il fallait détenir en permanence dans vos coffres 4 % en or de la monnaie en circulation. Pour créer plus de monnaie, il vous fallait plus d'or. Par cette opération de « confiscation », la banque centrale a augmenté ses réserves d'or et a pu émettre de la monnaie.

Le deuxième intérêt de cette mesure, était de s'assurer qu'à aucun moment un américain ne puisse venir à sa banque et dire : « je vous rends mes dollars et à la place je voudrais de l'or ». C'était devenu totalement impossible puisqu'il était interdit de détenir de l'or.
Grâce au retour de l'or dans les coffres de l'Etat, ils ont pu réaliser ce que j'estime être le plus grand quantitative easing de l'histoire. Une fois tout cet or récupéré, les autorités américaines ont décidé qu'une once d'or ne valait plus 20,67 $ mais 35 dollars. Cette appréciation de l'or leur a permis de créer énormément de monnaie, de créer de l'inflation et au final d'obtenir une relance par la monnaie, qui a permis à la croissance de faire un bond de 47% en quelques années. Pendant les deux années qui ont suivi, de mémoire, la bourse américaine a repris 80 % et le taux de chômage s'est effondré.

Quelle leçon peut-on tirer du passé ?

Avoir de l'or physique ne protège en rien d'une confiscation et j'ajouterai qu'en Europe, il faut avoir conscience que, depuis quelques années, la plupart des pays européens limitent les achats anonymes d'or. L'Allemagne l'a fait tout récemment, alors ce n'est pas totalement impossible, mais dès lors que les achats dépassent un certain montant, qui est l'ordre de mille et quelques euros de mémoire, vous ne pouvez plus faire d'achats anonymes. Pendant l'été 2011, pendant que les gens étaient en vacances, l'Etat français a adopté une loi qui dit que tout achat d'or au-delà d'un certain montant doit se faire en indiquant son nom, son prénom, son adresse, ses coordonnées bancaires, soit l'ensemble des informations qui permettent de savoir que vous avez de l'or et qui donc rend tout à fait possible la taxation et la confiscation, si l'Etat le décide. Donc, cette notion d'avoirs protégés quand on est investi en or physique ne tient plus vraiment.

VB : Benjamin, on a compris que pour vous détenir de l'or physique ne prémunit aucunement contre une confiscation éventuelle par l'Etat. Revenons à l'or papier, si d'aventure, les autorités décident que le trading de l'or papier est interdite, est ce que cela ne pose pas non plus un gros problème ?

Benjamin Louvet : Non, parce que quand vous investissez dans l'or papier, vous n'êtes pas directement propriétaire, donc on ne peut pas vous le confisquer. Beaucoup de produits sont des certificats qui ne font que vous exposer à la hausse ou à la baisse de l'or, mais qui ne vous donne pas accès à la détention d'or ce qui ne permet pas de confiscation. Dans ce contexte, ce qu'il peut vous arriver de pire, c'est une suspension des cotations. A ce moment-là, il n'y a pas de raison de favoriser l'acheteur plutôt que le vendeur, le plus simple est d'arrêter le prix à la clôture et de dire l'acheteur repart avec son argent, le vendeur repart avec son argent, on se quitte bons amis. Vous récupérerez la valeur financière de votre de votre or à la date de la suspension des cotations. La difficulté est de placer correctement cet argent récupéré afin de ne pas être trop sensible aux décisions politiques et monétaires qui peuvent être prises par la suite et qui pourraient entraîner une dépréciation des actifs que vous aurez récupérés.

Retrouvez ici la première partie de cet entretien sur l'évolution du cours de l'once d'or

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