Eiffage : l'AMF juge que Sacyr a agi de concert avec d'autres actionnaires

26/06/2007 - 19:26 - Boursier.com

Détails des conclusions

Dans ses séances des 19 et 26 juin 2007, l'Autorité des marchés financiers a examiné le projet d'offre publique d'échange visant les actions de la Société Eiffage. Ce projet d'offre publique a été déposé par Calyon, agissant pour le compte de la Société de droit espagnol Sacyr Vallehermoso, S.A. Sacyr détient à ce jour 31.047.259 actions Eiffage représentant 27.587.625 droits de vote, soit 33,32% du capital et 29,61% des droits de vote de la Société. Dans le cadre de l'examen de la conformité du projet d'offre, l'Autorité des marchés financiers a pris connaissance du projet de note d'information de l'initiateur. L'Autorité a pris connaissance des arguments présentés par la Société visée et des actionnaires minoritaires portant, notamment, sur la nature du projet d'offre publique et ses conditions financières. Ceux-ci estiment que le projet d'offre publique ne saurait être déclaré conforme en l'état : - En ce que des indices graves, précis et concordants existeraient qui prouveraient que, dans le cadre d'une tentative de prise de contrôle rampante, Sacyr se serait entendue avec un certain nombre d'autres Sociétés en vue d'acquérir des droits de vote d'Eiffage par un ramassage massif d'actions avant son Assemblée générale, en vue d'imposer, par leurs suffrages en assemblée, la recomposition du conseil d'administration d'Eiffage et de permettre ainsi à Sacyr d'imposer un projet de rapprochement industriel, une telle analyse pouvant être étayée, notamment, par l'analyse des achats d'actions Eiffage par Sacyr et quatre-vingt-neuf actionnaires d'Eiffage, représentant 17,6% du capital de la Société, par des déclarations publiques et des articles de presse, et par le comportement de Sacyr lors de l'Assemblée générale et de la procédure par elle engagée auprès du tribunal de commerce de Nanterre ; - En ce que l'initiateur de l'offre, agissant de concert avec d'autres actionnaires d'Eiffage, aurait ainsi franchi en hausse de concert les seuils du tiers du capital et des droits de vote d'Eiffage et, en conséquence, aurait dû déposer un projet d'offre respectant les dispositions des articles 234-2, 234-6 et 231-8 du règlement général ; - En ce que le projet d'offre contreviendrait aux dispositions des articles L. 433-3 IV du code monétaire et financier et 231-13 du règlement général, car la Société APRR, dont Eiffage détiendrait plus du tiers du capital et des droits de vote, serait un actif essentiel de cette dernière et que, par conséquent, l'initiateur de l'offre visant Eiffage devrait se conformer auxdites dispositions. L'Autorité a également pris connaissance des arguments présentés par Sacyr, en soutien du projet d'offre publique qu'elle a déposé, ainsi que ceux d'actionnaires minoritaires d'Eiffage, selon lesquels notamment : - La décision prise par le bureau de l'Assemblée générale des actionnaires d'Eiffage du 18 avril 2007 de priver de leurs droits de vote quatre-vingt-neuf actionnaires de la Société au motif d'une action de concert existant entre eux et la société Sacyr vis-à-vis d'Eiffage qui n'aurait pas été déclarée conformément à la réglementation française, serait infondée tant sur la forme (le bureau serait incompétent pour prendre une telle décision) que sur le fond (il n'existerait aucune action de concert entre lesdits actionnaires) ; - Le Conseil d'administration de Sacyr a déclaré par écrit à l'Autorité qu'il n'existe, à sa meilleure connaissance, aucun dirigeant commun entre Sacyr et les quatre-vingt-neuf actionnaires précités et que Sacyr n'agit de concert, au sens du droit français, avec aucun actionnaire d'Eiffage, n'a à aucun moment sollicité l'un quelconque des quatre-vingt-neuf actionnaires précités, en vue d'une acquisition d'actions Eiffage ou d'un suffrage lors de l'assemblée générale du 18 avril, et n'a conclu aucun accord permettant à ces actionnaires de financer l'achat des actions Eiffage ou leur garantissant un prix de cession et n'a demandé à personne de financer ces achats ou garantir un prix de cession ; - L'initiateur ne serait pas tenu au dépôt d'une offre publique visant les actions APPR dans la mesure où, d'une part, Eiffage ne détiendrait pas plus du tiers du capital ou des droits de vote d'APPR au sens de l'article L. 433-3 IV du code monétaire et financier, cette détention étant indirecte, par l'intermédiaire des Sociétés Financière Eiffarie et Eiffarie, la première contrôlée conjointement par Eiffage et Macquarie, et où, d'autre part, APRR ne représenterait pas un actif essentiel d'Eiffage, ni en termes qualitatifs, ni en termes quantitatifs, la contribution d'APRR aux comptes consolidés d'Eiffage, prise sur une base proportionnelle de 50% à raison du contrôle conjoint, et après agrégation des soldes comptables de Financière Eiffarie et Eiffarie, intercalées entre Eiffage et APRR, s'établissant en deçà de 50%. Par ailleurs, le tribunal de commerce de Nanterre a été saisi des assignations des Sociétés Sacyr et Grupo Rayet visant la Société Eiffage, en référé et sur le fond, aux fins de voir prononcer la nullité de la décision de privation de droits de vote prise par le bureau de l'Assemblée et de faire annuler les délibérations de l'Assemblée générale du 18 avril. En application de l'article L. 621-20 du code monétaire et financier, le tribunal a demandé à l'Autorité de déposer des conclusions relatives à ces affaires. L'Autorité a procédé à l'examen du projet d'offre publique d'échange en application des articles 231-20 à 231-23 du règlement général, et en se référant aux principes posés à l'article 231-3 du règlement général, en particulier la transparence, l'intégrité du marché, la loyauté dans les transactions et la compétition. L'Autorité considère : - Qu'il ne lui appartient pas de statuer sur les conditions dans lesquelles l'Assemblée générale des actionnaires d'Eiffage s'est tenue le 18 avril 2007, et, par conséquent, sur la décision prise par le bureau de cette Assemblée, étant relevé que le tribunal de commerce de Nanterre a été saisi, notamment, sur ce point et qu'il a demandé à l'Autorité de faire tenir au tribunal ses conclusions ; - Que, s'agissant de l'existence d'un éventuel concert concernant la Société Sacyr et d'autres actionnaires d'Eiffage, et bien que le tribunal de commerce de Nanterre et le tribunal de grande instance de Paris aient été saisis de cette question, il appartient à l'Autorité, saisie d'une opération de marché sous la forme d'un projet d'offre publique déposé, de déterminer, dans le cadre de l'examen de la conformité d'un tel projet, si une telle action de concert, au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce, a pu se nouer ; - Que, par conséquent, l'examen du projet d'offre doit être mené au regard des règles rappelées qui visent, non à empêcher une prise de contrôle, mais à l'organiser au mieux des intérêts du marché et, notamment, de la protection des actionnaires minoritaires. Au vu de différents constats et du déroulement de l'Assemblée générale du 18 avril 2007, l'Autorité considère que les comportements de Sacyr et d'autres actionnaires d'Eiffage "traduisent une démarche organisée et convergente visant à appuyer Sacyr lors de ladite Assemblée afin de lui permettre d'obtenir une recomposition du Conseil d'administration d'Eiffage à son profit - ce qu'elle n'était pas capable de promouvoir seule, sauf à prendre le contrôle préalablement par le biais d'une offre publique - la plaçant ainsi en position de mettre en oeuvre dans un second temps le rapprochement industriel réclamé depuis 2006 mais toujours refusé jusque-là par le Conseil d'administration en place d'Eiffage". L'Autorité a relevé par ailleurs, parmi les informations qu'elle a recueillies, que Sacyr avait planifié, dès janvier 2007 au moins, le dépôt d'un projet d'offre publique d'échange sur Eiffage le lendemain de l'Assemblée générale, selon un calendrier très précis, et que cette offre, prévue de longue date, pouvait permettre opportunément aux actionnaires d'Eiffage de reporter leur investissement au niveau de Sacyr et de tirer ainsi bénéfice du rapprochement industriel que la prise de contrôle d'Eiffage rendrait enfin possible. "Compte tenu de l'ensemble des faits relevés, l'Autorité est ainsi amenée à considérer au cas présent : - Qu'il existe un accord entre Sacyr et des actionnaires d'Eiffage - parmi lesquels figurent au moins les Sociétés Explotaciones Forestales Agricolas y Pecuarias Alavesas, Acciones Reunidas, Bens Patricios, Arcomundo, Portman Golf et Inmobiliaria Vano, sans que cette liste puisse être considérée comme exhaustive à ce stade, en l'état actuel des investigations menées par l'Autorité, qui se poursuivent - en vue d'acquérir et d'exercer des droits de vote pour mettre en oeuvre une politique vis-à-vis d'Eiffage ; - Que la politique commune poursuivie par le concert consiste à permettre à Sacyr de prendre le contrôle d'Eiffage et de réaliser le rapprochement entre les deux Sociétés, l'intérêt des parties à cet accord résidant dans la création de valeur espérée de ce rapprochement ; - Qu'en l'état actuel des investigations, il apparaît que d'autres actionnaires d'Eiffage pourraient également avoir participé audit concert ; - Et qu'en tout état de cause, les acquisitions réalisées par ces actionnaires sont susceptibles de porter atteinte à la transparence, à l'intégrité du marché, à la loyauté dans les transactions et la compétition, dans le cadre de l'offre publique examinée". En conséquence, l'Autorité "décide que le projet d'offre publique d'échange déposé par Sacyr visant les actions Eiffage n'est pas conforme aux dispositions législatives et réglementaires qui lui sont applicables, en ce que son initiateur, d'une part, a franchi de concert, au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce - concert dont le périmètre comprend au moins les six Sociétés précitées - les seuils du tiers du capital et des droits de vote de la Société Eiffage et, d'autre part, a acquis en numéraire plus de 5% du capital de cette Société au cours des douze mois précédant le dépôt du projet d'offre. Dès lors, l'initiateur agissant de concert doit se conformer aux dispositions : - De l'article 234-2 du règlement général, sur l'offre obligatoire à raison du franchissement en hausse du seuil du tiers ; - De l'article 234-6 du règlement général, sur le prix de l'offre obligatoire, qui doit être au moins équivalent au prix le plus élevé payé par l'initiateur, agissant seul ou de concert au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce, sur une période de douze mois précédant le dépôt du projet d'offre et ; - De l'article 231-8 du règlement général, sur l'obligation d'assortir une offre d'une option en numéraire lorsque l'initiateur agissant seul ou de concert, a acquis en numéraire, au cours des douze mois précédant le dépôt du projet d'offre, des titres conférant plus de 5% du capital ou des droits de vote de la Société visée". L'Autorité décide également que Sacyr est tenue de déposer ou de s'engager à déposer un projet d'offre publique irrévocable et loyale visant les titres APRR au plus tard à la date d'ouverture de l'offre publique visant Eiffage déclarée conforme par l'Autorité, conformément aux articles L. 433-3 IV du code monétaire et financier et 231-13 du règlement général.



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