MITTAL/ARCELOR : la partie est-elle gagnée ?

22/05/2006 - 13:21 - Option Finance

(AOF) - Après quatre mois d'attente, Mittal Steel vient de finir par lancer son OPA sur Arcelor, tandis que Vivendi fait face à la pression d'un actionnaire "activiste". "Le titre Arcelor ? Il vaut nettement plus de 40 euros s'exclame Didier Roman, gérant du fonds Odyssée chez Tocqueville Finance FCP. La famille Mittal a beau avoir fait des efforts dans la nouvelle mouture du projet, je doute que cela soit suffisant pour remporter l'approbation du conseil d'administration d'Arcelor. La partie est encore loin d'être gagnée". Pourtant, l'offre est dans l'ensemble mieux calibrée. Mittal a en effet essayé de répondre aux critiques émises lors de la première offre. Alors que dans l'offre initiale, le groupe proposait de racheter Arcelor, en partie en titres, en partie en cash, selon le rapport suivant 75/25, ce dernier évolue pour atteindre une proportion de 70 % en titres et 30 % en cash. Les parités d'échange sont significativement améliorées (voir encadré). De plus, Mittal est prêt à supprimer les droits de vote multiples. En cas de succès, il sera dilué par rapport à la première offre puisque sa participation au capital et en droit de vote représentera 45 % (contre 50,7 % du capital et 64,1 % des droits de vote auparavant). Néanmoins, pour beaucoup de gérants, la fusion envisagée d'Arcelor et de Mittal demeure, quelques mois après le début des hostilités, une opération non souhaitable, en raison notamment des cultures, des niveaux de performances, et des positionnements stratégiques très différents des deux groupes. "L'un, Arcelor, présente un profil industrieux et a misé sur les produits haut de gamme de l'acier tandis que l'autre, Mittal, présente un profil opportuniste et est davantage présent sur les produits d'acier basiques, explique-t-on chez Acofi gestion, une société de gestion qui détient des titres Arcelor en portefeuille. C'est pourquoi, nous n'apporterons pas nos titres à l'offre". En outre, les titres des deux sociétés n'offrent pas la même liquidité. Avec 90 % de flottant, Arcelor est aujourd'hui un titre qui se traite dans des volumes 10 fois plus importants que Mittal, dont le flottant avoisine 13 %. Et même en cas de succès, il n'est pas sûr que la situation s'améliore rapidement. "En effet, le titre Mittal est un titre encore peu connu du marché car la société constitue une histoire industrielle récente" relève un gérant. Surtout l'offre présentée par Mittal est très complexe : la répartition entre le cash et les titres est en effet conditionnée aux résultats de l'offre publique de rachat d'actions d'Arcelor, repoussée au 21 juin. "Or, si celle-ci réussit, Mittal devra, compte tenu de ses capacités de financement, réduire la proportion de cash, explique un banquier d'affaires. Il n'est donc pas sûr que l'offre aboutisse". Devant tant d'incertitudes, beaucoup de gérants ont préféré attendre, misant sur une surenchère. D'autres, comme Richelieu Finance ou de grandes maisons, ont d'ores et déjà choisi de vendre leurs titres pour engranger leurs plus-values, plutôt que de prendre le risque que le titre Arcelor ne chute si l'opération ne devait pas se faire ou que celui de Mittal ne se dégonfle après l'acquisition.

Une nouvelle offre améliorée

En termes financiers.

Dans la limite d'une proportion de 70 % de titres et 30 % de cash, contre 75/25 dans l'offre initiale, les actionnaires d'Arcelor ont le choix entre : - apporter une action Arcelor et recevoir en contrepartie une action Mittal et un complément en cash de 11,1 euros par action ; - recevoir 17 actions Mittal contre 12 actions Arcelor ; - apporter une action Arcelor contre 37,7 euros de cash. Cette dernière option valorise le titre Arcelor de plus de 70 % par rapport au cours observé par le titre le 26 janvier dernier avant l'annonce de l'offre par Mittal. - Au total, la nouvelle offre de Mittal valorise Arcelor à 25,8 milliards d'euros contre 18,3 milliards d'euros dans le projet initial.

Gouvernement d'entreprise.

Mittal accepte de renoncer aux droits de vote double. La famille Mittal détiendrai 45 % des droits de vote et 45 % du capital. (AOF)

EN SAVOIR PLUS

ACTIVITE DE LA SOCIETE

Arcelor, issu de la fusion en février 2002 d'Usinor, d'Arbed et d'Aceralia, est le numéro deux mondial de l'acier avec une production d'environ 46 millions de tonnes par an. Il est présent dans quatre domaines d'activités : il est le premier producteur mondial dans les Aciers Plats Carbone, activité principale du groupe avec près de la moitié du chiffre d'affaires, et les Aciers Longs Carbone, l'un des leaders mondiaux pour la production d'Aciers Inoxydables, et parmi les premiers en Europe pour le secteur Distribution-Transformation-Trading.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR

Les points forts de la valeur

- Arcelor est engagé dans la poursuite des synergies, dont les bénéfices sont attendus jusqu'à fin 2006. - Après deux années et demie dédiées à la mise en oeuvre de la fusion, Arcelor a initié au mois de juillet 2004 un vaste programme de transformation. La consolidation des actifs de CST (Brésil) et la consolidation d'Acindar (Argentine) en 2004 ne représentaient que la première étape visant à améliorer profondément les niveaux de rentabilité du Groupe. Arcelor entend continuer les cessions d'activités non stratégiques. - Le groupe a amorcé avec succès depuis deux ans le virage vers les pays à bas coût de main-d'oeuvre et à croissance élevée. - Les trois-quarts du chiffre d'affaires du groupe sont réalisés en Europe, ce qui lui permet de n'être que peu affecté en cas de repli du dollar.

Les points faibles de la valeur

- Arcelor a perdu en 2004 son statut de leader mondial de l'acier au profit de Mittal Steel, né de la fusion de l'empire sidérurgique de l'homme d'affaires indien Lakshmi Mittal avec l'américain International Steel Group. - A moyen-long terme, les sidérurgistes d'Europe de l'Ouest risquent de souffrir de la concurrence des pays en voie de développement, dont les capacité de production se développent et dont les coûts sont moins élevés. - Les sidérurgistes du Vieux Continent sont généralement moins bien valorisés que les autres acteurs du secteur, car ils sont jugés vulnérables à la concurrence des producteurs à bas coût (Russie, Ukraine...) .

COMMENT SUIVRE LA VALEUR

-Arcelor est une valeur cyclique, qui est très liée à la conjoncture économique. A ce titre, l'évolution de ses prix et débouchés est à surveiller. -A suivre également, l'évolution du prix des matières premières entrant dans la fabrication de l'acier. C'est particulièrement le cas du minerai de fer, qui représente environ 30 % du coût des achats des producteurs d'acier. - La concentration dans le secteur de la sidérurgie reste à l'ordre du jour dans la mesure où les dix premiers sidérurgistes ne contrôlent que le quart % du marché de l'acier alors que leurs fournisseurs de minerai de fer sont concentrés à l'extrême. Trois compagnies assurent la majorité de l'extraction mondiale. - La vulnérabilité d'Arcelor à une OPA est d'autant plus grande que la fusion à trois l'a laissé avec un actionnariat éclaté, sans noyau dur. Le flottant en Bourse représente près de 87 % du capital. Le principal actionnaire, l'Etat du Luxembourg, ne détient que 5,6 %.