EXCLUSIF AOF / Romain Boscher, GROUPAMA AM

27/09/2007 - 18:08 - Option Finance

(AOF) - 795 000 ventes de logements neufs ont été enregistrées aux Etats-Unis au mois d'août en rythme annuel, soit une baisse de -8,3%. Ce chiffre est inférieur à la prévision moyenne des économistes de 825 000 ventes. Romain Boscher, directeur de la Gestion Actions chez Groupama AM, a accepté de mettre ses chiffres en perspectives pour AOF.

L'AGENCE OPTION FINANCE: Comment analysez-vous le nouveau recul des ventes de logements neufs aux Etats-Unis?

Romain Boscher

 : Avec 85 000 ventes de logements neufs de moins en août, nous sommes aujourd'hui au niveau le plus bas depuis deux ans. Nous avions atteint un plus haut dans le courant de l'été 2005 avec 1,4 million de transactions, ce qui signifie que le marché a chuté de 44% depuis. Il faut remonter plus de dix ans en arrière (1996) pour trouver un chiffre équivalent à celui d'aujourd'hui. La crise est donc confirmée et elle se poursuit, mais ce n'est pas surprenant. Plusieurs facteurs ont provoqué ce recul, à commencer par les taux de financement de prêts des ménages qui se tendent un petit peu puisqu'ils intègrent à la fois une prime de risque plus importante et les graves difficultés rencontrées par les prêteurs encore vaillants pour se refinancer. L'autre problème concerne la disparition du marché du subprime. Un huitième des acheteurs potentiels qui se situent dans l'extrémité basse en sont exclus. A l'autre extrémité, les prêts d'un montant élevé dit "Jumbo" peinent également à se concrétiser. Dans le coeur du marché, les Américains moyens sont frappés par une crise de confiance qui les incite à reporter leurs achats. On ne connaît pas la proportion de transactions annulées ou différées, mais le marché immobilier doit faire face à un cumul de toutes ces situations. Rappelons que dans le marché du neuf, l'ajustement est plus sévère, car il sert de variable d'ajustement et les stocks doivent être écoulés à tout prix. Pour les logements existants, qui représentent plus de 80% des transactions, les propriétaires peuvent toujours retarder leur vente et lisser ainsi la pression vendeuse.

AOF :Quand peut-on espérer une sortie de crise ?

Romain Boscher

 : Il faut s'attendre à ce que la crise immobilière aux Etats-Unis soit comme à l'accoutumée dans pareille configuration de purge d'excès, relativement longue, de l'ordre de 3 ans. Les situations les plus dramatiques concernent les Etats industriels qui n'avaient que très peu goûté à la hausse et qui enregistrent de surcroît les plus fortes baisses, comme le Michigan par exemple. Ceux qui ont fait l'objet de fortes spéculations, Floride et Californie en tête, sont également particulièrement touchés mais cela est plus "normal". Sauf à patienter pendant trois longues années, les marchés devront donc plutôt espérer respirer une fois la crise de confiance évacuée. Cela nécessite un inventaire exhaustif des risques et des pertes engrangés par la multitude d'acteurs concernés par cette perte de valeur immobilière. La bonne nouvelle est que ce risque, colossal, sera mieux absorbé car très disséminé, la mauvaise est qu'il nous faudra des mois avant de retrouver tous les porteurs du risque et de disposer d'un clair état des lieux, préalable indispensable à une normalisation. Propos recueillis par Marie-Laure Hardy.