Quand la SNCF ne transporte pas de passagers, elle officie dans le fret, un secteur dans lequel elle nourrit de grosses ambitions et une volonté de développement. L'entreprise publique cherche à "construire un nouveau leader multi-modal et international du secteur de la logistique et du transport de marchandises", à l'image de ce qui a été fait avec succès chez nos voisins allemands. A cette fin, elle a annoncé en fin de semaine dernière son intention de prendre le contrôle de Geodis, l'entreprise de transport et de logistique dont elle détenait jusque-là 42,4% du capital.
Comme Geodis, aux mains de Pierre Blayau, est cotée en bourse, la SCNF se doit de passer par une offre publique d'achat dite amicale, puisqu'elle est concertée avec la direction de sa cible. La semaine dernière, l'action Geodis avait été suspendue en bourse car des informations sur les intentions de l'entreprise publique avaient filtré sur le marché parisien. L'Autorité des Marchés Financiers mène d'ailleurs une enquête sur les mouvements intervenus sur le titre antérieurement à la suspension, mouvements qui ne sont pas le fait de la SNCF, a expliqué son président Guillaume Pépy ce matin dans un entretien publié dans 'Le Figaro'. C'est dimanche donc, que la SNCF a officialisé son intention de proposer 135 Euros par action Geodis (coupon attaché), soit 79% de plus que le cours du titre en moyenne en mars dernier. "Il s'agit là d'une grande première pour la SNCF qui lance sa première OPA en vue de constituer un grand pôle fret / marchandises international, à l'instar de la lettre de mission remise à Guillaume Pépy en février dernier", souligne Ghislain Nicq, du bureau d'études Oddo Securities. L'analyste juge que le prix proposé est équitable, même s'il est plutôt dans le bas des valorisations constatées sur d'autres opérations dans le secteur.
La SNCF a mis en place une vaste stratégie dont cette opération, qui lui coûtera environ 600 Millions d'Euros, est la pierre angulaire. L'entreprise va ainsi créer une branche élargie pour ses activités de logistique et du transport de marchandises réunissant les activités de Geodis, de Fret SNCF et de Transport & Logistique Partenaires. Guillaume Pépy confierait à Pierre Blayau les rênes de ce pôle renforcé, avec pour ambition de ferrailler avec les grands noms de la spécialité. "Le nouvel ensemble ainsi créé se placera parmi les premiers européens du secteur de la logistique et du transport de marchandises et permettra d'offrir à l'ensemble des clients français et internationaux une plate-forme complète de solutions multi-modales - ferroviaires, routières, fluviales, aériennes, maritimes", explique la SNCF, qui précise que cette entité pèsera 8 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et comptera 50.000 salariés. "Le nouvel acteur SNCF Geodis figurera parmi les cinq premier mondiaux conduits par DHL, Deutsch Bahn, Küehne & Nagel", a rappelé de son côté Guillaume Pépy au 'Figaro', en ajoutant que la SNCF aura sans doute à terme à se positionner également dans les services portuaires, la seule corde qui manquera à son arc par rapport à ses grands concurrents.
Le conseil d'administration de Geodis doit encore réfléchir à cette offre et faire appel à un expert indépendant pour en jauger la portée financière. En cas d'aval puis de succès du projet, Pierre Blayau aura à gérer un rapprochement qui s'annonce épineux, compte-tenu des cultures différentes des deux entreprises. Guillaume Pépy en est parfaitement conscient, ainsi qu'il l'a expliqué dans l'interview publiée ce matin, puisqu'il met "la question des cultures" au coeur de la réussite de l'opération. La SNCF déposera d'ici la fin du mois son offre formelle sur Geodis, offre qui sera ouverte après que le conseil d'administration de la société visée aura officiellement donné sa position. Si le calendrier est respecté, le transporteur public pourrait prendre le contrôle de Geodis avant la fin du semestre.
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