Où en est l'ISR ?

26/04/2006 - 18:54 - Option Finance

(AOF) - Avec un encours multiplié par deux sur la seule année 2005, l'Investissement socialement responsable (ISR) se développe à grande vitesse. Néanmoins, en décembre 2005, sur les 1 200 milliards d'euros d'encours cumulés par l'ensemble des OPCVM distribués en France, seuls 10 milliards étaient drainés par les fonds estampillés ISR. Même si le marché français tend à rattraper son retard, l'offre reste donc restreinte, avec seulement 128 fonds ouverts à décembre dernier contre, il est vrai, quatre-vingts OPCVM trois années plus tôt. Des rémunérations prometteuses. à long terme Cette progression des encours intervient alors même que les fonds ISR doivent encore faire leurs preuves en termes de performance. Au 31 mars 2006, le meilleur FCP actions zone euro gagnait sur un an glissant plus de 80 % contre à peine 39 % pour le meilleur FCP ISR de la même catégorie. Sur une période identique, les seconds du classement distribuaient respectivement + 51,39 % et + 36,60 % Malgré tout, les gérants spécialisés réfutent l'idée selon laquelle la rémunération des OPCVM ISR serait structurellement inférieure à celle affichée par les fonds non typés : "La performance des fonds ISR doit être appréciée au-delà de 10 ans, souligne Najib Sassenou, responsable de l'ISR à Sogéposte. L'indice américain éthique, le DSI 400, a réalisé, depuis sa création en 1990 à aujourd'hui, une performance de 12,10 %, contre 11,30 % pour l'indice global, le S&P 500." Les performances seraient donc quasiment identiques, "même si, poursuit-il, la responsabilité sociétale pourrait engendrer, à court terme, des surcoûts pour ces entreprises vertueuses". Pour sa part, Patrick Viallanex, vice-président du directoire d'Agicam, note qu'en termes de risque/rendement les deux gestions se rejoignent, et tempère : "Le cumul des frais liés à l'application du filtrage sociétal peut cependant peser légèrement sur les OPCVM ISR." En somme, toute comparaison de rémunération avec les fonds non ISR est encore difficile, en raison d'un historique de performance restreint - en mars de cette année, seuls 14 FCP affichaient un historique d'au moins 5 ans - et de philosophies de gestion très diverses (politique d'exclusion, surpondération de certains critères.). Les signaux de départ Convaincus qu'à terme, "la vertu paie", ces gérants sont confortés par un faisceau de signaux adressés au marché. "Il y a eu tout d'abord, en juin 2005, le plus important appel d'offres en matière d'ISR jamais lancé en Europe, rappelle Bertrand Fournier, président du directoire de Sarasin Expertise. Le Fonds de réserve des retraites (FRR) a choisi d'injecter 600 millions d'euros sur des supports d'investissement socialement responsable. Dans le cadre de sa mission de solidarité intergénérationnelle, le FRR s'est ainsi affirmé soucieux du comportement des entreprises dans lesquelles il investit. Autre élément, le nouveau régime de retraite additionnelle des fonctionnaires (ERAFP), sorte de fonds de pension pour les retraités du secteur public, a établi un principe selon lequel la totalité des réserves du régime sera investie en prenant en considération des critères d'analyse extra-financière. Les grands investisseurs s'emparent de la gestion socialement responsable ! Cela pourrait constituer le vrai signal de départ de cette spécialité en France", conclut Bertrand Fournier. AGF AM, de son côté, confirme l'intérêt grandissant des investisseurs institutionnels pour cette thématique de gestion qui bénéficiera également de l'envol de l'épargne salariale. Mais ce décollage ne se fera pas sans deux grandes évolutions. La première porte sur la méthode de sélection des valeurs, jugée trop limitée par les gérants car restreinte aux grandes capitalisations. Pour François Lett, gérant d'Ecofi Investissement, "la carence majeure de l'ISR reste sa difficile prise en compte des PME, qui sont tournées davantage vers leur croissance, et qui négligent de fait certains critères de développement durable, ce qui impacte le mode de sélection des agences de notation focalisées sur les grandes capitalisations". La seconde évolution concerne l'offre produit elle-même et la nécessaire création de fonds de gestion de taux socialement responsables, en écho à une demande des institutionnels qui, sous la pression de leurs adhérents et clients, doivent désormais compter avec de nouveaux critères de sélection de leurs actifs.