SAINT-GOBAIN va faire appel de l'amende record

12/11/2008 - 15:14 - Option Finance

(AOF) - Saint-Gobain a annoncé son intention d'engager un recours contre l'amende de 896 millions d'euros que lui a infligé la Commission européenne pour entente dans le verre automobile en Europe. Le groupe, qui avait approvisionné un montant de 560 millions d'euros à la fin de l'exercice 2007 pour l'amende, juge cette décision "manifestement excessive et disproportionnée : le montant de cette amende représente environ 95% du chiffre d'affaires annuel de l'activité OEM (Original Equipment Manufacturer) de Saint-Gobain Vitrage automobile en Europe, et plusieurs dizaines années de son résultat net". La procédure de recours est suspensive du paiement de l'amende jusqu'au jugement du Tribunal (la procédure s'étend en général sur plusieurs années) moyennant la remise d'une garantie bancaire, a souligné Saint-Gobain dans un communiqué. La Commission européenne avait annoncé un peu plus tôt "avoir infligé des amendes pour un montant total de 1,4 milliard d'euros aux entreprises Asahi, Pilkington, Saint-Gobain et Soliver pour avoir conclu des accords illicites de partage de marchés et échangé des informations commercialement sensibles concernant des livraisons de verre automobile dans l'espace économique européen (EEE)." "Entre début 1998 et début 2003, ces entreprises se sont consultées sur les prix cibles, le partage de marchés et la répartition de la clientèle à l'occasion d'une série de réunions et d'autres contacts illicites. L'entreprise belge Soliver a également pris part à certains de ces échanges", a indiqué la Commission. D'après elle, les quatre entreprises en cause contrôlaient, à l'époque, approximativement 90 % des ventes de verre utilisé dans l'EEE pour les véhicules neufs ainsi que pour les pièces de rechange d'origine destinées aux véhicules automobiles, marché qui représentait quelque 2 milliards d'euros la dernière année complète de l'infraction. La Commission a majoré l'amende infligée à St Gobain de 60 % pour cause de récidive. En revanche, Asahi qui a fourni des informations complémentaires permettant de révéler l'existence de l'infraction, a bénéficié d'une réduction de 50 % du montant de l'amende, conformément à la communication sur la clémence. Il s'agit des amendes les plus élevées que la Commission ait jamais infligées dans une affaire d'entente, aussi bien à une seule entreprise (en l'occurrence Saint Gobain) qu'à l'ensemble des membres d'une entente. "Le montant total des amendes est élevé en raison de l'étendue du marché, de la gravité de l'affaire et des infractions commises antérieurement par Saint-Gobain. L'importance des amendes infligées par la Commission s'explique par le fait que cette dernière ne peut et n'a pas l'intention de tolérer les comportements illicites de ce genre", a déclaré Neelie Kroes, membre de la Commission européenne chargée de la concurrence. (AOF)

EN SAVOIR PLUS

ACTIVITE DE LA SOCIETE

Saint-Gobain est un groupe industriel organisé en cinq pôles opérationnels: la distribution bâtiment, les matériaux haute performance (céramiques & plastiques, abrasifs et renforcement), le vitrage, le conditionnement et les produits pour la construction (matériaux de construction, isolation et canalisation). Saint-Gobain est de plus le premier verrier mondial. Présent dans 49 pays à travers le monde, Saint-Gobain est l'un des cent premiers groupes industriels mondiaux. En 2005, au terme d'une bataille acharnée de quatre mois, Saint-Gobain a finalement réussi son OPA sur le numéro un mondial du placoplâtre, le britannique BPB, pour un montant de 5,8 milliards d'euros. Il s'agit de la plus importante acquisition de son histoire. Ce leader mondial des matériau, véritable poids de lourd de 35 milliards d'euros -capitalisation et dettes comprises-, a suscité de nombreuses spéculations en 2006. Une rumeur de rachat par Lafarge puis de Leverage Buy Out (LBO) lancé par un fonds d'investissement avait déjà dopé le titre en 2006. Deux opérations qui n'ont jamais eu lieu.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA VALEUR

Les points forts de la valeur

- La distribution est devenue la plus importante division du groupe en termes de revenus. Elle génère un flux de cash stable pour une intensité en capital plus faible que les autres divisions du groupe. - Pierre-André de CHALENDAR a succédé à Jean-Louis BEFFA comme Directeur Général en juin 2007. Les analystes espèrent du nouveau management une meilleure discipline financière et la création de valeur. - Saint-Gobain est régulièrement la cible de rumeurs d'OPA. - La variété de ses marchés finaux (automobile, bâtiment, aménagement de la maison, etc.) rend Saint-Gobain moins sensible aux aléas économiques et lui assure une certaine récurrence des revenus. - Saint-Gobain sous-performe le marché depuis plusieurs années. En 2006, l'action a progressé de 26,7% contre + 35,9% pour l'indice DJ Stoxx Construction. Le titre amorce son rattrapage depuis 2007. Les bureaux d'études semblent commencer juste à intégrer la stratégie du groupe concentré autour de trois branches : les produits pour la construction, les matériaux innovants et la distribution pour le bâtiment. - Saint-Gobain pourrait céder son pôle conditionnement afin d'achever son positionnement sur les métiers de la construction. Les analystes en attendent un produit de vente entre 4,5 et 5 milliards d'euros. - Le groupe a porté ses objectifs de rentabilité de capitaux investis de 22% à 25% d'ici 2010. Un plan d'économie de 300 millions sur trois ans a été annoncé.

Les points faibles de la valeur

- Saint-Gobain doit faire face à la hausse des coûts énergétiques et au déclin du marché du logement américain. - Le groupe a été handicapé par les procès aux Etats-Unis mettant en cause sa responsabilité dans le domaine de l'amiante. - Les bureaux d'études ont reproché à Saint-Gobain son "mix business" trop proche d'un conglomérat, avec un portefeuille d'activité trop important. - La commission européenne a lancé en avril 2007 une procédure contre plusieurs fabricants de verre automobile, dont Saint-Gobain, qu'elle soupçonne de cartel. Le français a rapidement passé dans ses comptes du premier semestre une provision de 650 millions d'euros pour faire face aux futures amendes. Le jugement final de cette affaire devrait cependant être tardif, éloignant ainsi la perspective d'une sortie effective de cash.

COMMENT SUIVRE LA VALEUR

- Les cours des matières premières qui sont à la base des produits de Saint-Gobain doivent être surveillés. - L'évolution du cours de Saint-Gobain est liée à celle du secteur de la construction. Il faut donc suivre de près les indicateurs du bâtiment (mises en chantiers, permis de construire…). - La cession du pôle conditionnement est partculièrement attendue par les marchés.

LE SECTEUR DE LA VALEUR

Construction - Matériaux

Les entreprises de matériaux de construction souffrent généralement de trois facteurs : d'une baisse des volumes, liée au repli du marché du BTP en particulier aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Espagne, d'une forte hausse des coûts énergétiques et des matières premières et, enfin, d'un effet de change négatif (pour les groupes européens). Ainsi Holcim, numéro deux mondial du ciment, a affiché, au cours du premier semestre, un bénéfice d'exploitation en retrait de 15,7% et un chiffre d'affaires en baisse de 4,4%. Les intervenants qui tirent leur épingle du jeu, dans un contexte déprimé, sont ceux qui ont misé sur les pays émergents, et qui ont mené des réductions de coûts drastiques, à l'instar de Lafarge. Le leader mondial des matériaux de construction a publié un résultat net hors éléments exceptionnels en hausse de 15% pour le premier semestre. Les performances du groupe sont tirées par les marchés émergents, qui ont bénéficié d'un bond de 53% de leurs résultats d'exploitation au premier semestre, et représentent désormais 67% des résultats de la branche ciment. Le groupe, qui est parvenu à accroître son objectif initial de 340 millions d'euros de réduction des coûts en 2008, annoncera un nouveau plan de restructuration en fin d'année. Quant à Ciments Français, moins présent dans les pays émergents, et donc plus exposé aux difficultés des marchés matures, son résultat net part du groupe a fléchi de 20,1% à 181 millions, sur la première partie de l'année.