Va-t-on entrer dans un bear market durable ?

15/06/2006 - 12:51 - Option Finance

(AOF) - Par Patrick Artus, directeur des études et de la recherche d'Ixis CIB On a vu, au printemps 2006, des reculs spectaculaires des marchés d'actions dans les grands pays de l'OCDE mais encore plus dans les pays émergents. Certains analystes ont alors pronostiqué qu'on allait entrer dans un "bear market" durable avec recul conséquent des cours boursiers. Mais, pour qu'un "bear market" durable s'installe, il faut que les conditions fondamentales de ce recul des cours soient remplies. La croissance mondiale est aujourd'hui forte, et elle a plusieurs moteurs : la Chine, le Japon, les autres pays émergents d'Asie, l'Europe Centrale, les pays producteurs de matières premières, à un moindre degré les États-Unis et le Japon. . De même, la profitabilité domestique des entreprises continue à croître dans la plupart des pays : États-Unis, Japon, Allemagne, Espagne., la France et l'Italie étant des exceptions. La profitabilité des entreprises cotées continue à croître dans toutes les régions. Le niveau élevé et ascendant de la profitabilité implique que l'inflation, donc les taux d'intérêt nominaux, ne peuvent pas aller bien loin. L'inflation est en effet une réaction des entreprises face à la dégradation de leurs profits. Aux États-Unis, en Europe, dans l'ensemble du Monde, les taux d'intérêt nominaux à long terme restent inférieurs à la croissance nominale, ce qui est normalement favorable à la valorisation des actions. On peut comprendre la correction boursière de 2001-2003 par le niveau déraisonnable de valorisation des bourses ; cette explication n'est absolument pas valable aujourd'hui, avec des valorisations boursières anormalement faibles. Quant au risque de réduction de la liquidité mondiale, il est inexistant, avec le maintien de politiques actives d'intervention de change en Asie, même la réapparition d'interventions dans des pays qui les avaient interrompues (Japon, Singapour, Thaïlande...), l'accumulation de réserves de change étant, on le sait, une des causes majeures de création de liquidité (de base monétaire) mondiale ; que les marchés financiers sont devenus averses au risque, présenté par les pays émergents qui ont des déficits extérieurs importants (souvent associés à des déficits publics importants). Ceci peut aider à comprendre les dépréciations du change et les chutes des cours boursiers des pays émergents qui présentent ces caractéristiques (Hongrie, Turquie, Inde), mais certainement pas de tous les pays émergents. Au total, une crise boursière globale ou un "bear market" global durable nous paraît impossible, en l'absence de toute cause fondamentale convaincante de recul des cours boursiers.