Point de vue / La normalisation des taux longs

11/06/2009 - 15:52 - Option Finance

(AOF / Funds) - Le sentiment général sur les marchés semble indiquer que le pire est passé tant au niveau financier qu'économique. Les mouvements des marchés sont, comme souvent, très rapides, voire violents, en avance sur la réalité économique. Ainsi, il est intéressant de considérer le comportement des emprunts d'Etat. La hausse des taux a en effet été très forte, l'"US Treasury" 10 ans est passé de 2 % en fin d'année à environ 3,6 % aujourd'hui (il se situait à 4 % en octobre 2008), ce mouvement a été le même en Europe, le Japon faisant un peu exception. Certains ont vu dans ce retournement de tendance la manifestation du danger inflationniste, de la dégradation à venir des grandes signatures d'Etat et de l'engorgement dû à l'abondance des émissions. L'anticipation du retour de l'inflation n'est pas confirmée quand on observe le niveau des emprunts indexés. L'inflation implicite ressort ainsi à 2 % sur le "US TIPS" 10 ans, elle était tombée à 0,5 % fin 2008. Il apparaît donc que l'on est passé plutôt d'une anticipation de quasi-déflation/dépression (taux longs à 2 %, taux d'inflation implicite à 0,5 %), à quelque chose de plus normalisé, correspondant peut-être au potentiel de croissance nominale des économies développées sur le moyen terme. Cela signifie-t-il que les emprunts d'Etat (US Treasury, Bund, OAT) sont revenus à des niveaux d'achat ? On peut répondre oui si, à court terme, le redressement des indicateurs économiques ralentit quelque peu, et surtout si l'on pense que le retour à une croissance proche du potentiel prendra encore du temps. Ceci apparaît d'autant plus plausible que la plupart des enquêtes et des indicateurs avancés sont toujours positionnés en situation de récession. A moyen-long terme, la gestion de la sortie de crise par les gouvernements et les banques centrales sera déterminante. La rigueur sera incontournable si l'on veut éviter le retour de l'inflation et la dégradation des finances publiques. La manoeuvre sera délicate, faite trop tôt et l'on retournera en récession, trop tard et c'est le dérapage inflationniste qui menacera. Paradoxalement, un krach obligataire provoqué par un fort resserrement des politiques monétaires constituerait la meilleure sauvegarde à long terme pour les investisseurs en emprunts d'Etat. Ce que l'on sait, c'est que le problème ne se pose pas maintenant. Par Jean-Pierre Hellebuyck, vice-président, directeur de la stratégie d'investissement, Axa Investment Managers