Point de vue / Trois ans, trois vitesses et trois paradoxes

13/04/2010 - 10:31 - Option Finance

(AOF / Funds) - Au moment où les chiffres de créations d'emplois aux Etats-Unis donnent le premier signe du "bout du tunnel", pour reprendre le commentaire du président Obama, la sortie de cette longue crise, se distingue par trois régimes de croissance différents et présente trois paradoxes manifestes. La crise économique s'est déclenchée de façon synchronisée dans le monde et dans tous les secteurs en octobre 2008 quand les Etats ont pris quasi simultanément des mesures de soutien à leur secteur bancaire et mis en place des plans de relance de leurs économies. Depuis, les stabilisations et les rebonds se sont au contraire illustrés par leur désynchronisation comme en attestent les prévisions de croissance du FMI. C'est en Asie, à l'évidence, que la croissance 2010 sera la plus forte : celle de la Chine, autour de 10 %, va entraîner le monde émergent, à un rythme de l'ordre de 6 %, proche de la croissance potentielle. Dans les économies développées, l'Amérique du Nord, Canada en tête, se relève plus vite et plus fort, avec une perspective autour de 3 % alors qu'en Europe la croissance dépassera difficilement 1 %. Premier paradoxe de cette reprise, le dynamisme des émergents tranche superbement avec les crises précédentes, la crise asiatique en particulier. Les leçons des années 1990 ont été tirées par les acteurs économiques, notamment en matière de change et de financement à court terme. Du coup, le moteur des pays émergents a généré une demande industrielle qui a stimulé les entreprises occidentales également soutenues par les plans de relance. Cette reprise par l'offre se caractérise ainsi par un deuxième paradoxe dans le monde : l'industrie est en fort rebond alors que la consommation reste médiocre. Dernier paradoxe, les entreprises qui ont traversé la crise sont riches en "cash" et saines (surtout les grandes), alors que les Etats sont appauvris et endettés pour longtemps. Investir dans les entreprises, dans leurs dettes ou en fonds propres, est la conclusion naturelle... pour autant que les valeurs de marché restent abordables et avec la sélectivité nécessaire, notamment au travers de cette grille de lecture inédite mais non dénuée de rationalité. Par Jean-François Boulier, président du directoire d'Aviva Investors France