La supervision financière [-16]ðeuropéenne est en marche

13/09/2010 - 10:13 - Option Finance

(AOF / Funds) - Il aura fallu une crise sans précédent pour que l'Europe se décide enfin à accélérer la mise en place d'une supervision financière unique ! Les ministres des Finances des 27 ont en effet approuvé le 7 septembre dernier la réforme préparée par la Commission de Bruxelles et avalisée par le Conseil et le Parlement quelques jours auparavant. Le texte doit encore être finalisé sur des points techniques, mais le principe d'une supervision financière européenne est désormais acté. Une étape historique dans un processus enclenché il y a un peu plus de dix ans. A la fin des années 1990, en effet, l'Europe lance un programme ambitieux destiné à créer un cadre juridique unique en matière financière. Pour faciliter le processus législatif, elle met notamment en place un comité technique dénommé CESR dont le rôle consiste à assister la Commission européenne dans la préparation des textes législatifs et réglementaires financiers, puis à veiller ensuite à leur application harmonisée dans l'ensemble des Etats membres. Par la suite, deux autres comités de même nature seront créés : CEIOPS pour l'assurance, CEBS pour la banque. En l'espace de dix ans, l'ensemble des règles financières ont été harmonisées en Europe. Mais une législation unique appelait nécessairement une supervision unifiée, sauf à admettre qu'un même texte puisse être appliqué de 27 manières différentes. C'est le pas décisif qui vient d'être franchi. Simples organes techniques jusqu'à présent, les trois comités vont acquérir le statut de véritables agences dotées d'une existence juridique et de pouvoirs renforcés. "La création d'une supervision financière européenne est d'autant plus nécessaire que la concurrence entre les superviseurs se fait au détriment du bon fonctionnement d'un grand marché unique et des investisseurs, observe Fabrice Demarigny, directeur de l'activité marchés de capitaux chez Mazars et ancien secrétaire général de CESR. On voit bien la nécessité d'une supervision européenne quand on observe ce qui se passe depuis quelques mois s'agissant par exemple des ventes à découvert. La décision unilatérale de les interdire dans un Etat membre déclenche des dysfonctionnements et des incertitudes juridiques sans toutefois résoudre le problème." Inspirée du rapport sur les leçons de la crise financière commandé par José-Manuel Barroso à Jacques de Larosière et publié en février 2009, la réforme risque d'être à l'arrivée - le texte n'est pas encore définitivement arrêté - un peu moins ambitieuse que les propositions émises par l'ancien gouverneur de la Banque de France. Les trois nouveaux organes de supervision pourront s'opposer, dans des conditions qui restent à définir, à des activités ou à des produits dangereux. Ils disposeront par ailleurs d'un pouvoir contraignant sur les autorités de régulation nationale, voire d'un pouvoir direct sur les établissements dans certains cas particuliers. Toutefois une réserve, très controversée, a été imposée à la demande de la Grande-Bretagne. Les agences ne pourront prendre aucune décision susceptible d'avoir un impact budgétaire sur les Etats membres. De l'interprétation qui sera faite de cette clause, dépendra en partie l'étendue des pouvoirs réels des institutions concernées. "Si l'on peut regretter que la supervision européenne ne débute pas sur des bases plus fortes, admet Fabrice Demarigny, l'essentiel est que les agences aient été créées. Par la suite, leurs pouvoirs évolueront naturellement en fonction des besoins. Outre ces trois agences de supervision, le nouveau dispositif prévoit également la création d'un Comité européen du risque systémique qui rassemblera les banquiers centraux. Il aura un rôle d'alerte et de recommandation, mais ne sera doté d'aucun pouvoir contraignant. "Contrairement aux autorités de supervision de la banque, de l'assurance et des marchés, qui ont donné lieu à des négociations importantes, le Comité européen du risque systémique n'a pas soulevé de difficulté particulière, analyse Fabrice Demarigny. La crise a montré en effet que le danger venait des zones non régulées, et a donc mis en lumière la nécessité de mettre en place en Europe une tour de contrôle chargée de surveiller l'ensemble des risques macro-prudentiels et de marché". Le texte sera soumis une dernière fois au Parlement le 20 septembre prochain et devrait entrer en application dès le 1er janvier 2011. [8]Olivia Dufour AUT/ACT