Les investisseurs reviendront sur les marchés actions avec la Fed (Dexia)

14/09/2010 - 11:14 - Option Finance

(AOF / Funds) - "La confirmation du ralentissement de l'économie américaine ravive le spectre d'une récession et rend d'autant plus cruciale la réponse des autorités. Soumise à une pression accrue, la Réserve fédérale pourrait ainsi prendre de nouvelles mesures et accroître son bilan, un revirement par rapport à mars dernier lorsque l'intention était de mettre un terme aux achats de MBS", peut-on lire dans la note mensuelle de Frédéric Buzaré, responsable de la gestion actions chez Dexia. Le gestionnaire recommande d'attendre un mouvement de la part de la Fed dans ce "jeu de poker menteur". "Les taux d'intérêt étant déjà proches de zéro, la Réserve fédérale n'a pas d'autre alternative que gonfler la masse monétaire et maintenir les rendements obligataires le plus bas possible afin d'obliger les agents économiques à acheter des actifs risqués ou à se ré-endetter. Le problème est que la Réserve fédérale a déjà racheté plus de 1.700 milliards de dollars d'obligations durant la première phase de son programme d'assouplissement quantitatif, achevé en mars, sans pour autant avoir réussi à relancer la croissance américaine, toujours en berne. On peut ainsi s'interroger sur les raisons de cet échec." "Les responsables de la Réserve fédérale ont fait savoir qu'ils étaient prêts à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la stabilité financière, véritable clé d'une reprise durable. A ce stade, tout brutal regain d'aversion pour le risque aurait des conséquences désastreuses sur une reprise déjà chancelante. La Réserve fédérale dispose indéniablement de l'arsenal nécessaire pour stimuler la croissance, mais reste à savoir si nous avons atteint le stade à partir duquel les bienfaits de nouvelles mesures de relance l'emportent sur les coûts liés aux risques induits. Hors États-Unis, le sentiment général est que tôt ou tard, la Réserve fédérale amplifiera son dispositif d'assouplissement quantitatif. La seule question qui divise véritablement les bears des bulls concerne l'efficacité d'une telle politique." "La montée du risque déflationniste rend nettement plus délicat l'arbitrage entre les avantages et les coûts d'un second volet d'assouplissement quantitatif. Les dirigeants américains sont face à un choix douloureux. La première alternative serait d'accepter une croissance inférieure aux prévisions tant que les ménages n'auront pas totalement assaini leurs finances et que la Réserve fédérale restera prudemment accommodante. Pour les défenseurs du keynésianisme, compte tenu de la menace déflationniste, la solution passe par une nouvelle phase d'assouplissement quantitatif. Cela étant, pour avoir un impact sur le bilan des ménages, ces mesures devraient être d'une ampleur suffisante pour entraîner une revalorisation des actifs, en particulier immobiliers, et relativiser ainsi le poids de la dette. Les sommes à mobiliser seraient si colossales qu'on peut redouter un effet gravement déstabilisateur, avec pour première victime le dollar." "Les regards sont désormais braqués sur le marché du travail, la question étant de savoir si la politique monétaire peut s'avérer efficace dans ce domaine. Face à une hausse du chômage jugée structurelle, la marge de manoeuvre des pouvoirs publics semble bien mince. C'est en tout cas l'argument évoqué récemment par la Réserve fédérale. (...) A l'approche d'échéances électorales clés, on ne peut écarter le risque de pressions politiques sur les banques centrales, les incitant à prendre de nouvelles mesures d'assouplissement quantitatif afin de réduire le chômage." "Théoriquement indépendante comme ses consoeurs, la Fed exerce une double mission : contenir l'inflation et promouvoir le plein emploi. Néanmoins, si la décrue du chômage n'est pas assez rapide, les responsables politiques lui demanderont de mettre en oeuvre les mesures appropriées d'assouplissement quantitatif. Dans ces conditions, l'assouplissement quantitatif peut-il devenir une politique sociale ? La poursuite du ralentissement économique accroît le risque de dérapage budgétaire. Ainsi aux États-Unis, le débat budgétaire se durcit. Dans un contexte électoral, les responsables politiques exigent une solution rapide permettant soit de stimuler la croissance soit de réduire le déficit budgétaire." "Le débat sur la prolongation des allègements fiscaux votés en 2001 et 2003 (en particulier le crédit d'impôt Earned Income Tax Credit et les crédits d'impôt sur les plus-values et les dividendes) et arrivant à échéance le 31 décembre prochain est relancé. La suppression de ces allègements et crédits d'impôt coûterait 145 milliards de dollars à l'économie américaine en 2011 (soit 1% environ du PIB) et amputerait de 2% le revenu annuel des ménages. L'administration Obama veut prolonger en permanence les taux plus bas et augmenter en permanence les deux taux les plus élevés, alors que la plupart des républicains souhaitent la prolongation indéfinie de tous les allègements fiscaux." "Le gouvernement américain doit définir une stratégie crédible de redressement à long terme des finances publiques et trouver un compromis entre relance immédiate et stabilité budgétaire à long terme. Un nouveau programme de relance est envisageable à court terme à condition qu'il s'accompagne d'un plan d'assainissement budgétaire à long terme. Selon nous, les prochaines années seront caractérisées par une croissance nominale avec une résurgence régulière de la menace déflationniste. Il faudra du temps pour résorber les déséquilibres existants, en particulier sur les marchés du logement et de l'emploi, étant entendu que cette fois-ci, la reprise ne pourra s'appuyer sur l'immobilier résidentiel." "Le plus important est de s'intéresser à la dérivée seconde du sentiment des investisseurs sur les perspectives de l'économie américaine et de poser la question : la situation peut-elle empirer ? Bien que le contexte économique soit différent, le comportement des marchés des actions en 2010 est pour l'instant identique à celui de 2004, exception faite de la volatilité, aujourd'hui plus élevée. Le niveau attractif des valorisations explique peut-être pourquoi les actions peuvent résister à une croissance poussive ou à une reprise économique chaotique." "En revanche, l'attitude des investisseurs qui basculent régulièrement entre optimisme et pessimisme est déroutante. Tour à tour, ils recherchent puis fuient le risque, sans que quiconque soit en mesure d'infléchir la tendance pour provoquer un retour vers la moyenne. Les investisseurs boursiers seraient-ils moins intelligents ou moins clairvoyants que les investisseurs obligataires ? Dans ce contexte d'incertitude, une chose est sûre : la plupart des grands investisseurs ne reviendront pas sur les marchés des actions tant que la Réserve fédérale ne soutiendra pas plus fermement une politique de reflation. En effet, pourquoi acheter aujourd'hui ou vendre des actifs risqués si vous estimez que la Réserve fédérale est sur le point de sortir l'artillerie lourde ? Tout le monde craint une période de déflation prolongée, mais personne n'y croit vraiment, situation typique du poker menteur. Plus que jamais, le timing est aujourd'hui essentiel et explique peut-être le clivage observé entre actions et obligations." AUT/ALO