Chine : privilégier le secteur privé (Edmond de Rothschild AM)

16/09/2010 - 16:12 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Depuis 1978, date des premières réformes initiées par Deng Xiaoping, l'économie a subi une transformation approfondie qui s'est révélée être une grande réussite en termes de croissance et de développement. Le taux de croissance a dépassé 9% de manière régulière et le PIB chinois dépasse désormais celui du Japon, mais de nouvelles étapes de réforme sont nécessaires pour sortir d'un modèle hybride qui est sans doute proche de ses limites", juge Edmond de Rothschild AM. "A la veille d'échéances politiques importantes, le risque est de voir les autorités se limiter à une politique de gestion à court terme, reportant les arbitrages de long terme", ajoute le gestionnaire, recommandant de privilégier le secteur privé. "La Chine est désormais devenue la deuxième puissance économique mondiale (avec un PIB proche de 4.900 milliards de dollars), mais il lui faut gérer sa croissance à court terme et en transformer les bases à moyen terme. La réponse du gouvernement chinois à la récession mondiale de 2008 a été rapide et déterminée. Une vaste mobilisation des ressources budgétaires et de crédit à l'automne 2008 a en effet permis de relancer l'activité au deuxième trimestre 2009. L'ampleur du succès a posé assez vite la question du risque de surchauffe de l'économie entraînant des tensions sur les prix, comme en 2008." "La banque centrale s'est très tôt préoccupée de ce risque et a réagi dès la fin de 2009 ; les premiers résultats de cette action commencent à être visibles. Comment gérer la transition entre relance et freinage de l'emballement du crédit et du marché immobilier ? Cette question résume la difficulté à laquelle sont confrontées les autorités en matière de régulation de l'économie. La surchauffe redoutée de l'économie se manifeste surtout par des phénomènes de hausse spéculative sur les prix de l'immobilier. Les prix de détail ont atteint 3,3% en rythme annuel au mois de juillet, au-dessus du seuil d'alerte de 3% que s'est donné le gouvernement, mais la progression hors alimentation (30% de l'indice) demeure très modérée (1,6%)." "De manière attendue par rapport à un schéma classique de développement, la croissance de la Chine a reposé depuis plus de vingt ans sur l'investissement et sur l'exportation (elle-même génératrice d'investissements). Cette approche a été un grand succès puisque le pays est devenu le premier exportateur mondial. Elle suscite cepandant des réactions croissantes qui menacent sa pérennité. Si l'investissement interne ne pose pas de problème en soi, la persistance d'excédents commerciaux (28,7 milliards de dollars au mois de juillet) fondés sur un cours de change toujours discuté ne peut que mener à des tensions avec les partenaires commerciaux, voire parfois à des réactions protectionnistes." "L'expansion de la consommation chinoise n'a pas manqué de constituer une source de croissance, ainsi le marché automobile chinois est-il devenu le premier marché mondial. Toutefois, les dépenses des ménages n'ont pas progressé dans la même proportion que l'investissement et les exportations. De ce fait, la part de la consommation dans le PIB n'a cessé de baisser au cours des dernières années et n'est plus que de 35%, un chiffre que l'on peut estimer à 47% si l'on réintègre l'investissement résidentiel." "Une des anomalies du régime économico-financier chinois réside dans le poids excessif de l'épargne, lié à l'absence jusqu'à une date récente d'un vrai système de protection sociale. Entre-temps, l'accroissement des salaires, résultat de qualifications plus élevées, a permis de faire progresser le niveau de vie de la population (le revenu par tête dépasse 6.000 dollars, une moyenne qui masque de grandes disparités régionales). La poursuite de ce phénomène soutiendra l'évolution de la consommation (croissance annuelle des ventes de détail en juillet : 17,9%), mais un vrai changement de comportement des ménages est indispensable." "L'économie chinoise connaît à court terme le ralentissement souhaité par les autorités. Après une croissance de 11,1% au premier semestre, la seconde moitié de l'année verra l'activité fléchir à la suite des mesures restrictives sur l'immobilier, mais ce tassement du rythme de la croissance devrait être bref. En attendant que leur efficacité soit établie, les mesures en place ne devraient pas être modifi ées avant quelques mois tandis que les responsables chinois restent par ailleurs attentifs à l'évolution de la croissance mondiale." "A plus longue échéance, le potentiel de croissance de l'économie chinoise n'a jamais été aussi solide parce que mieux diversifié en termes sectoriels. Toutefois, la pérennité de cette forte croissance dépend de la capacité des dirigeants à poursuivre la transformation de l'économie chinoise et à accepter le développement d'un vrai secteur privé. Celui qui a émergé depuis plusieurs années s'est révélé plus créateur de valeur que beaucoup d'entreprises publiques qui dominent les indices boursiers mais qui sont plus soucieuses des intérêts de l'Etat que de ceux des actionnaires minoritaires." "Malgré la forte croissance de l'économie, les indices boursiers chinois ont de ce fait connu une évolution décevante si on les compare à ceux d'autres marchés émergents. C'est ce secteur privé qui doit intéresser l'investisseur à travers une sélection rigoureuse des titres pour son potentiel à moyen terme", conclut le gestionnaire. AUT/ALO