La Grèce est une bonne chose pour l'Allemagne (JP Morgan AM)

20/09/2010 - 15:40 - Option Finance

(AOF / Funds) - "Les marchés sont revenus sur les points hauts récents, malgré une légère dégradation de l'environnement macro-économique avec un retournement des indicateurs avancés dans les pays occidentaux. Pour les pays émergents, les sondages PMI se situent sous le seuil des 50 points au Brésil et à Singapour, signalant une contraction à venir, tandis que les exportations coréennes et taïwanaises se sont également retournées. En Allemagne, désormais modèle de croissance dynamique, les exportations et la production industrielle faiblissent", note JP Morgan Asset Management. "Cela est cohérent avec la poursuite du désendettement, et il ne serait pas surprenant que les faibles taux de croissance du PIB perdurent, sans tomber en récession. Mais cela jette un doute sur les anticipations du consensus, qui prévoit une croissance des bénéfices de 18% en 2011 et de 13% en 2012 en Europe." "A court terme, les investisseurs sont préoccupés par la périphérie de l'Europe. Les spreads obligataires se sont à nouveau élargis en Irlande, au Portugal et en Grèce. Si les tests de résistance de la BCE ont eu des aspects positifs et négatifs, ils ont eu le mérite d'offrir une certaine visibilité : nous savons désormais quelles sont les banques les plus fortes et les plus fragiles en Europe, ces dernières étant de plus en plus dépendantes du financement de la BCE. Si les déposants en prennent conscience, le risque est que la base constituée par ces dépôts soit menacée et que cette dépendance vis-à-vis de la BCE s'accroisse. Il s'agit d'un cercle vicieux dont nous sommes désormais familiers et sur lequel nous avons très peu de visibilité." "Mais il y a des signes de tension préoccupants - le franc suisse par exemple a franchi à la hausse la borne de fluctuation dans laquelle il évoluait depuis environ 15 ans contre l'euro. La faiblesse de l'euro a une contribution nette positive pour la zone euro, la plupart des pays étant tournés vers l'exportation, et c'est sur cette base que la Grèce est une bonne chose pour l'Allemagne." "Un stratégiste du Crédit Agricole a fait part d'une analyse intéressante montrant que l'Europe peut être divisée en trois zones : les PIIGS, les exportateurs (la Suisse et les pays au nord de la Suisse) qui bénéficient de la faiblesse de l'euro et de finances publiques satisfaisantes, et enfin la France et le Royaume-Uni sur lesquels le jury ne se prononce pas - bien que les exportateurs prospèrent en France. Autre avantage pour les pays exportateurs, leur coût de financement diminue du fait de la fuite des capitaux hors de la périphérie." "Un des paradoxes de l'euro tient au fait que la fixation d'un même taux directeur pour l'ensemble de la zone euro peut ne pas du tout convenir à la situation individuelle d'un pays membre tout en étant parfaitement approprié à l'ensemble de la zone. Il y a dix ans, une simple règle de Taylor suggérait que, si les taux de la zone euro étaient trop élevés pour l'Allemagne, ils étaient bien trop faibles pour l'Espagne, l'Irlande, le Portugal et la Grèce. Cela a contribué à une bulle immobilière insoutenable dans ces pays. Depuis que cette bulle a éclaté, la règle de Taylor suggère que les taux devraient être plus élevés pour l'Allemagne et moins élevés pour les pays périphériques - qui auraient probablement besoin de taux d'intérêt négatifs." "Les flux sur les actions sont anémiques, mais ce n'est guère surprenant, les actions ayant sous-performé les obligations sur les deux dernières décennies. Il en résulte que la valorisation des obligations est devenue élevée, ce que les flux ne montrent pas : d'après Bloomberg, les investissements des particuliers dans les fonds obligataires ces deux dernières années ont été aussi élevés que sur les fonds technologiques entre avril 1998 et avril 2000. Une des difficultés rencontrées par les sociétés de gestion tient au fait que les particuliers achètent avant tout le momentum." "Les marchés émergents sont revenus à la mode : ils ont plus que doublé depuis le point bas de mars 2009, ayant surperformé le MSCI World de 50% sur la période, et leur valorisation intègre un profil de croissance supérieur. Le bon moment pour acheter les marchés émergents remonte à 1998, en pleine crise asiatique (lors que les valorisations étaient basses et que les primes de risque actions étaient élevées). Depuis lors, ils ont surperformé le MSCI World de plus de 200% - mais l'appétit des particuliers était alors inexistant, car les marchés émergents avaient sous-performé de 72% entre 1994 et 1998." "Le fait que les valorisations soient attrayantes en Europe et que les primes de risque soient élevées constitue un amortisseur pour les éventuelles turbulences à venir. Cette situation incite par ailleurs les entreprises à la discipline financière. Lorsque le coût du capital est faible, les entreprises gaspillent les capitaux levés dans des acquisitions pharaoniques destructrices de valeur (AOL/TimeWarner en étant le dernier avatar)." "Lorsque le coût du capital est élevé, les entreprises suivent de très près leurs investissements de manière à ce qu'ils créent de la valeur. Malheureusement, les politiciens et les régulateurs n'ont pas intégré cela au niveau des banques, et les forcent à lever énormément de capitaux sous forme d'actions, bien que cela coûte cher, en remplacement de la dette et des capitaux hybrides pourtant attrayants. Il en résultera inéluctablement une hausse du coût du crédit bancaire, comme c'est déjà le cas pour les emprunts hypothécaires britanniques, où les marges ont quintuplé en deux ans. La Banque Nationale de Grèce et la DeutscheBank ont émis des actions la semaine dernière, mais en dehors du secteur financier nous anticipons des rachats d'actions progressifs, le coût du capital étant élevé, ce qui devrait également soutenir les performances pour les investisseurs." AUT/ALO